29 avril 2017, 9:36

METAL OPER'ART

@ Strasbourg (Opéra National du Rhin)

Tout le monde se prépare à une soirée de metal inédite à l’Opéra National du Rhin. Dans ce cadre majestueux, cinq groupes vont se succéder sur une scène encore toute chaude de l’opéra de la veille. Les décors et les chaises des musiciens de La Callisto de Cavalli sont même restés en place ! Durant les balances je suis déjà saisi par le cadre grandiose et impressionné par le travail accompli en amont pour réaliser les réglages sonores. Cet amphithéâtre étant traditionnellement réservé à l’acoustique naturelle, le son amplifié de nos métalleux a sans aucun doute nécessité une vraie adaptation qui semble très réussie !

LANIAKEA est un groupe français de metal très moderne basé principalement sur l’instrumental. L’accueil qui leur est réservé est assez déroutant pour tout le monde car le public ne sait pas s’il doit se taire ou hurler et le groupe reste un peu béat devant tant de quiétude. C’est finalement le batteur qui va rompre le silence en envoyant le fameux "trois coups" en guise d’ouverture. Ce qui est frappant d’emblée c’est la faible amplification du son qui lui donne quelque chose d’unique. On entend tous les détails du jeu des musiciens à la perfection et c’est sans doute pour cette raison que le public du Metal Opér’Art a un peu de mal à se mettre dans une ambiance "concert". Il faudra trois morceaux de LANIAKEA avant que tout le monde se détende un peu et commence à applaudir avec enthousiasme même si ce n’est pas encore très démonstratif.

Côté musique, ce que proposent les Avignonnais est intéressant : un mélange de passages rapides, limite blast, avec d'autres lents et torturés. Cela rend un côté viscéral à leur death atmosphérique et les parties plus expérimentales donnent un aspect unique aux compos. Un excellent choix pour démarrer cette soirée opéra metal !
 


C’est au tour de GRORR de faire résonner son death progressif sous les ors de l’opéra ! Le dépaysement commence à être total car sa musique est lourde et imprégnée de riffs sombres qui font trembler les anges de la salle. On est aux antipodes de l’opéra traditionnel et c’est bien le but recherché ce soir. Le public strasbourgeois commence à se chauffer doucement puisque les cornes se lèvent dans la salle et les applaudissements se font plus nourris.

GRORR propose un metal très conceptuel, très travaillé avec des sonorités qui font un peu penser à MESHUGGAH par moments. Les titres teintés de notes orientales ou arabisantes sont ceux qui m'ont le plus plu, vraiment réussis et tirés du dernier album « The Unknow Citizens ». L’emploi d’un instrument traditionnel (dont le nom m’échappe totalement !) est là aussi à bon escient dans cette configuration où l’acoustique est géniale. On rentre dans l’univers aventureux de GRORR et on se laisse porter durant 45 minutes. Une vraie réussite pour les Français qui récolteront en fin de set de nombreux applaudissements et quelques fans en plus !
 


PSYGNOSIS, formation de Mâcon, et troisième groupe du soir. Parlons d’abord du chant : rien à dire ! Ou plutôt beaucoup à dire car le concept actuel du groupe est de remplacer le chanteur par d’enivrantes mélodies au violoncelle. Dans l’opéra de Strasbourg, le résultat est tout bonnement bluffant. 45 minutes de metal rapide et acéré, allié à la tendresse d’un violoncelle.
Le public ressent alors dans ce lieu extraordinaire toute la férocité et la noirceur de PSYGNOSIS colorées de mélodies exaltantes. L’auditoire du Metal Opér’Art comprend enfin à 100% qu’il assiste à un évènement exceptionnel.

Le groupe joue sur scène sans batteur un ajout supplémentaire à l’originalité de leur prestation. Malgré cela, leurs compos sont bien lisibles et suffisamment mélodiques pour captiver le plus grand nombre. Armé de leur dernier EP « AALIEN », les Français ne lâcheront rien jusqu’au bout du set. En récompense, un public moins timide qui réagira un peu plus de manière "metal". Une belle performance de PSYGNOSIS qui tenait visiblement à profiter à fond de ce concert !
 


IGORRR est un peu l’OVNI du Metal Opér’Art. Une formation assez inattendue composée d'un batteur, du compositeur derrière ses platines, d’un chanteur et d’une chanteuse. Le tout pour un résultat étonnant qui décrasse les oreilles ! Le public assiste à un véritable spectacle avec les chanteurs qui jouent sur scène leur personnage. Le set se compose en majorité de titres bien cossus avec des blasts incessants à la batterie. Le chant est alors principalement composé de cris suraiguës. On croirait un mélange de CHAOSTAR et CARNIVAL IN COAL avec un résultat à la fois délirant et pourtant très bien construit !

Un intermède folklorique vient ponctuer le milieu de set : la chanteuse danse et on frise le ridicule assumé. C’est vraiment un privilège d’assister à un spectacle aussi décalé en live dans un opéra. Le set se termine avec le retour du batteur et des hurlements sans fin du chanteur qui déchirent le calme de la nuit alsacienne.

IGORRR est un choix ambitieux du Metal Opér’Art qui s’avère payant. Le public est conquis et réclame un rappel qui n’aboutira malheureusement pas…
 


EMPYRIUM et la fin de soirée se profilent quand les roadies préparent la scène pour le légendaire groupe allemand. Tout est passé si vite jusque là, et nous espérons tous un concert mémorable de la part d’un groupe rare que l’organisation du Metal Opér’Art a mis 4 mois à convaincre.

Sur scène, tout est sobre et fait pour mettre en avant les musiciens et leurs instruments. Mis à part les membres du groupe, on note la présence d’une violoniste.

EMPYRIUM ouvre sur "Mourners" tiré de « Songs Of Moors & Misty Fields » qui nous ramène en 1997. La rythmique est lente et convient parfaitement au cadre semi-acoustique que souhaite donner le groupe lors de ce concert dans l’Opéra du Rhin. Nous faisons ensuite un bond en avant avec "The Days Before The Fall" et "The Mill" (2014-2015). C’est à la fin de ces trois premiers titres que Markus Stock se décide timidement à adresser quelques mots au public. Il n’y aura d’ailleurs pas beaucoup d’échanges et c’est un grand regret car pour un concert si rare, l’alchimie avec le public passe par un peu de complicité avec le groupe.

Nous pouvons néanmoins nous consoler avec la musique, si douce et si enivrante, à l’image de "Where at Night the Wood Grouse Plays" et "Heimwärts". Le dark-folk des Allemands nous emmène dans des paysages musicaux qu’ils sont seuls à produire et l’opéra vibrera encore longtemps à la suite de morceaux comme "Lover's Grief" ou encore "Many Moons Ago".
 


EMPYRIUM met donc un point d’honneur à satisfaire tous ses fans en piochant un titre dans tous ses albums et c’est logiquement que pour terminer le show, "The Ensemble Of Silence" suivi de  "A Gentle Grieving Farewell Kiss" tiré du premier album « A Wintersunset... », sont joués par les Allemands. Ce sera le grand moment si attendu par les fans. Les deux morceaux enchaînés font plus de dix minutes mais passent comme dix secondes.

Pas de rappel, un simple et humble au revoir pour finir le concert. Une heure quinze d’un éphémère bonheur musical que beaucoup auront trouvé bien trop court ! EMPYRIUM ne pouvait bien sûr pas jouer toute la nuit mais un petit retour sur scène après l’ovation du public strasbourgeois aurait été du plus bel effet.

Ce détail ne pourra cependant pas gâcher l’immense plaisir que chacun a éprouvé à voir et à entendre dans ce lieu extraordinaire cinq groupes différents et reliés par la passion du metal. Un grand coup de chapeau à l’organisation qui a travaillé dur et réussi (avec raison !) à convaincre le petit monde de l’opéra que les métalleux sont sérieux et avant tout mélomanes. Ni sièges arrachés, ni décors abimés, rien que des fans qui ont profité un maximum d’une inoubliable soirée !

Pascal C.
Photo par Fanny Larcher - Portfolio

Blogger : Fanny Larcher
Au sujet de l'auteur
Fanny Larcher
Photographe indépendante depuis 2009 dans toute la région nord-est, en Belgique et au Luxembourg, Fanny s'est mise à la recherche d'un web magazine cool (mais sérieux !) pour l'accompagner dans sa vocation. C'est chose faite depuis cette rentrée 2011 où elle a rejoint l'équipe de HARD FORCE !
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