25 juin 2017, 23:25

Festival des Artefacts

@ Strasbourg (Zénith)

Il est 13h30, nous arrivons à l’heure pour ROYAL REPUBLIC. Etrange groupe suédois, intemporel avec ses costumes de rockers des Fifties. Souvenez-vous de Retour Vers Le Futur, semblent-ils clamer. Des gaillards exprimant sans timidité leur passion pour le rock'n'roll. Adam, le frontman électrisé, est une sorte de Will Bill Hickok se la jouant Marty McFly avec, en prime, un déhanché "cash". Nous sommes fascinés par les coupes improbables des trois autres loustics. Les bananes sont revues à la sauce punk et volent dans tous les sens. Et Il y a ce batteur fou sorti tout droit du Muppet Show. J'adore, les pieds d'un public conquis dansent façon "Great Balls Of Fire". Nous ne connaissons aucun titre ? Pas grave, l'énergie et l'échange font de la représentation un spectacle rock en diable. Ce que je ne trouve plus chez VOLBEAT, je le prends ici en pleine face. Oui, il y a du neuf du côté de chez Huey Lewis... La fosse est déjà bien remplie, oubliée la salle vide de l’an passé. Douze titres sont exécutés, tirés des trois albums, avec en bonus un medley "Battery/Ace Of Spades" salué comme il se doit par les spectateurs.



15h15. Il est un peu tôt pour l'apéro mais nous fonçons pourtant au pub irlandais du coin. Voici FLOGGING MOLLY, venu répandre son folk-rock festif. La fosse est remplie, ça commence à s'agiter sec. Tous les instruments séculaires sont de la partie, la touche électrique et punk en prime. Il manque toutefois un petit je ne sais quoi, c'est fébrile. Je m'attendais à un démarrage sur les chapeaux de roue. On monte d'un cran avec "Selfish Man". A défaut de danser, on apprécie la musique celtique. Belle alliance entre violon, accordéon, banjo et soli de guitare moderne. C'est au son du banjo que l'on voit le Zénith se réveiller enfin, mis en avant avec "Drunken Lullabies". Ça y est, nous sommes dans le groove. Ça tape dans les mains, on peut scander "bière et punk... irlandais". Enchaînement de tubes célébrant la fête et la paix, avec jeter de Guinness au public. Moins rageux que les DROPKICK MURPHYS, nous voyons pourtant se dégager de l'harmonie entre public et groupe, extériorisée par de sincères sautillements et circle-pits, le guitariste finira le set sur un slam. Nos T-shirts sont définitivement trempés à la fin de "The Seven Deadly Sins". Voilà une édition des Artefacts bien partie...



17h50. Place au thrash pur jus. Les ancêtres pas grabataires ANTHRAX déboulent avec neuf titres judicieusement choisis, et les New-Yorkais vont tout balayer pendant une heure montre en main ! Ouverture avec "Among The Living" et "Caught In A Mosh", forcément. Magnifiquement exécutés par un groupe heureux d’être là, vous devinerez que nous nous enflammons en moins de deux. C’est la frénésie dans le Zénith, les cheveux s’envolent et les baskets font du surf au-dessus de nos têtes. Je suis à 5 mètres de Ian, il m’électrise par son jeu de maître. Joey joue les Mr Loyal avec le public, voilà un groupe qui n’aura jamais la grosse tête. Merci messieurs. La moitié de la set-list se concentre sur « Among The Living », donc pas de réelle surprise. Regret : un seul titre issu du dernier et très bon album, l’élu sera "Breathing Lightning". Mais honnêtement, ni l’absence de nombreux titres célèbres, ni la courte durée du set ne nous fera oublier la leçon de thrash metal livrée pour nous en ce dimanche. Anecdote : "Antisocial" ne sera pas joué en raison de la présence de qui nous savons.



18h20. L’introduction "Lupus Daemonis" installe l’ambiance cérémonielle et nous voyons arriver les Allemands grimés en loups, manifestement ravis d’être présents. POWERWOLF nous lâche d’emblée "Blessed And Possessed" et "Army Of The Night", issus du dernier album. Attila et ses Huns déferlent sur Argentoratum et déversent leur messe ironique en diable sur des oreilles plus réellement chastes. La réaction des spectateurs ? Nous sommes tout simplement au bord de l'explosion... Le groupe reçoit un accueil digne de celui qu’il connait sur ses terres teutonnes. Les Alsaciens n’ont pas trop à rougir de leurs cousins germains. L'explosion a bien lieu ! La chorégraphie est parfaite, avec le ballet des frangins lycanthropes Matthew et Charles, leurs riffs qui s'envolent et le claviériste Falk Maria Schlegel toujours aussi fou harangue la fosse. Les flammes sur scène viennent laver… ou encourager nos péchés.
Votre serviteur, fan des loups puissants, se retrouve évidemment à headbanger devant tant de puissance, d'énergie dégagée par ce rituel musical païen. Si on peut chipoter sur une set-list classique, il faut voir comme ce déferlement d'énergie balaye toute objectivité... on se fond dans un plaisir heavy metal pur et sincère.
L'interaction d'Attila le chanteur avec le public fait toute la différence. C’est d’un vrai frontman dont nous parlons. Il sait, avec des mots français judicieusement placés, préparer son auditoire à participer, à l’aider à amplifier le show. Les magnifiques "Resurrection By Erection" et "Werewolves Of Armenia" enflamment le Zénith. Le bouquet final ? "Sanctified With Dynamite" et  "We Drink Your Blood", évidemment. POWERWOLF, ou comment avec du metal basique, sans être péjoratif, on crée une alchimie, un moment unique.



20h00. MASTODON prend possession de la scène. Riffs puissants et rythmiques, porteurs de lourdeur, voix stoner sur "Sultan’s Curse". Un chanteur malheureusement statique, le bassiste assure la présence vivante sur une scène lointaine. C'est beau mais moins accessible que les groupes précédents. De très bons soli, c’est du metal alternatif et progressif. Un deuxième titre au rythme plus enlevé, heureusement car je m'assoupissais. "Divinations" est un mélange des genres, intéressant. La voix du chanteur est moins haut perchée, cela me plaît davantage. La guitare rythmique sert de tremplin à de belles envolées, et la basse accélère la cadence.
Un concert tout de même difficile à vivre, difficile à décrire. Ils sont très bons, je le vois et l'entends, mais ça ne me parle pas tant que ça. Niveau public c'est une communion silencieuse puis des acclamations expriment le ravissement. Une musique inspirante qui me parlerait plus dans mon salon. La représentation live musicalement excellente n'établit pas de lien d'emphase avec moi. Peut-être que si le chanteur avait été plus charismatique, plus présent… MASTODON, une autre voix, ou voie, du rock. Restent les riffs lourds et entêtants. En Alsace ça tombe bien, on aime le gras.



Arrive l’heure du groupe tant attendu. TRUST, le furoncle de la France de Giscard, je vais enfin les voir. La montée en scène est déroutante. Vient en premier le batteur, petit nouveau, qui fait résonner longuement ses cymbales comme pour pousser ses comparses encore absents à le rejoindre. Nono arrive, solitaire tout en soli. Il ne quittera pas cette guitar hero attitude pendant une heure dix. Le deuxième guitariste ne respire pas la joie de vivre. Absent, il est comme ennuyé d'être là. Rate-t-il une partie de pêche importante ? Il n’a pas été payé ?
Bernie est une énigme. Il est dans une autre dimension, souvent de dos, mais surtout écrasé par le poids de son bob et de ses lunettes. Nous attendions un représentant de la rage, le poète urbain au lieu de cela affiche un dédain qui nous met mal à l'aise. Nous reproche-t-il d'être là ? De soutenir une formation mythique sortie de sa vitrine ? Je me dis que tout cela fait partie du spectacle.
Les morceaux vont s'enchaîner, beaucoup de tubes reconnaissables, "Marche ou Crève", "Instinctde Mort” ou encore "L’Elite", mais le rendu est assez froid malgré une musique accrocheuse et l’excellent jeu de guitare de Nono déjà souligné. Dans la fosse les fans purs et durs apprécient heureusement. Au bout de trois titres, l'attitude du groupe n'a pas évolué. Ce n'est pas une mise en scène, les musiciens ne prennent pas de plaisir à jouer et leur ennui est contagieux. TRUST est triste. Et ce n'est pas le final avec ANTHRAX en guest qui ôtera ce goût amer. Pourtant l’idée était bienvenue. TRUST, le chantre de la France marginale est malheureusement devenu... antisocial.

Nous avons passé une agréable journée, l'affiche aurait simplement due être remaniée dans son ordre de passage. La performance de la plupart des groupes fut énorme. Le manque de vie de l'un d'eux n'est qu'un larsen vite oublié.


Blogger : Christophe Scottez
Au sujet de l'auteur
Christophe Scottez
Chris est ethnologue à ses heures perdues, vétéran des pogo joyeux en maillots de core. Un explorateur curieux, grand amateur de riffs et de chants sauvages. Il a grandi dans les glorieuses années 80, bercé par les morceaux canoniques d’ACCEPT, SCORPIONS, MOTLEY CRUE et autres GUNS N ROSES. Traumatisé par le divorce entre Max Cavalera et son groupe, ainsi que par un album des Mets un peu «chargé» en n’importe quoi, Chris a tourné 10 ans le dos au hard rock. Puis, un jour, il a par hasard découvert qu’une multitude de nouveaux groupes avait envahi la scène … ces nouveaux sauvages offraient des sons intéressants, chargés en énergie. Désireux de partager l’émo-tion de ce style de metal sans la prétention à s’ériger en gardien d’un quelconque dogme, il aime à parler de styles de metal dit classiques, mais aussi de metalcore et de néo-metal. Des styles souvent décriés pour leurs looks de minets, alors que l’importance d’un album est d’abord le plaisir sonore que l’on peut en tirer, la différence est la richesse du goût. Mais surtout, peut-on se moquer de rebelles coquets alors que les pères fondateurs du metal enfilaient des leggins rose bonbon et pouponnaient leurs choucroutes peroxydées ?
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2 commentaires

User
Christophe Hagmann
le 02 juil. 2017 à 17:23
excellent article : très bonne analyse ! j'ai retrouvé quasi mot pour mot mon ressenti à la sortie du Zénith.
User
Christophe Scottez
le 02 juil. 2017 à 22:05
Merci. J'ai eu du mal à restituer les points négatifs, car ce fut une belle édition, vraiment. Des groupes ne donnèrent pas des prestations, ça arrive, mais nous pouvons comprendre leurs difficultés<br />
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