29 mars 2019, 18:30

RAMMSTEIN

• Quelques explications sur la nouvelle vidéo


De "Deutschland", nouveau clip foisonnant de 9 minutes 20 de RAMMSTEIN, beau comme un court métrage et presque aussi énigmatique qu’un film de David Lynch, le grand public n’aura retenu que la scène où quatre des musiciens, la corde autour du cou sur une potence, sont vêtus de la tenue à rayures que portaient les Juifs dans les camps de concentration (dans la vidéo, Christoph Schneider et Richard Z. Kruspe apparaissent sous les traits d'officiers nazis). Soit les 35 secondes du teaser publié en amont de la sortie de la vidéo, signée Specter Berlin, qui ont fait les gros titres de tous les sites d’informations qui se sont hâtés de le partager et de débattre sur cette nouvelle "provocation" des musiciens. Mais il est vrai qu'en Allemagne, il a ému – voire horrifié – de nombreux représentants de la communauté juive qui l'ont directement dénoncé sans attendre la diffusion de "Deutschland" dans son intégralité.

Pourtant, au milieu de lasers rouges omniprésents que l'on retrouve à toutes les époques du clip, on voit aussi, dans le désordre : des chevaliers ; des guerriers ; des hommes venus du futur (se pourrait-il qu'ils soient venus "visiter" les différentes époques de l'Allemagne ?) ; des rescapés (?) du crash du zeppelin Hindenburg dans le New Jersey en 1937 ; des moines (sous l’Inquisition ?) ; des braqueurs/terroristes (la Fraction armée rouge, la Bande à Bader) ; un autodafé ; des combats clandestins dans l’Allemagne des années 30 ; une superbe Noire (Germania, symbole allégorique de l’Allemagne, comme Marianne incarne la France), tantôt guerrière, tantôt otage ou victime, qui accouche d’un chien (six même si l’on considère que chaque membre du groupe à un chiot berger allemand dans les bras à 6:30)… Une image “dérangeante” mais peut-être qu’après avoir montré le meilleur ami de l’homme sous un jour négatif (chiens policiers menaçants, le chien avec un membre du parti…), ceci est un symbole d’espoir pour une nouvelle Allemagne, un chien, fidèle et aimant par essence, étant ce que son maître fait de lui ? Une interprétation toute personnelle.

Choisir une Noire pour incarner le pays n'est pas anodin et il est on ne peut plus révélateur de l’état d’esprit des musiciens que l’on ne pourra pas accuser de "suprémacisme blanc". Sans oublier cette brève séquence vers la fin où des SS, encerclés par leurs prisonniers juifs, sont abattus d’une balle dans la tête à bout portant… Preuve s'il en était encore besoin que RAMMSTEIN dénonce le passé violent de son pays plutôt qu'il le glorifie.

Dans un texte imagé, Till Lindemann chante les sentiments ambivalents qu’il éprouve pour l'Allemagne « qui a tant pleuré » en raison de ses divisions, de ses guerres et de l'horreur qui reste à tout jamais attachée à son nom. Un mélange d’amour et de haine pour cette nation, à la fois violente et belle, marquée dans sa chair par le nazisme (« Deutschland/ mein Herz in Flammen/ Will dich lieben und verdammen Deutschland/ dein Atem kalt So jung, und doch so alt Deutschland!/ deine Liebe Ist Fluch und Segen Deutschland – meine Liebe Kann ich dir nicht geben Deutschland! », c’est-à-dire : « Allemagne/ Mon cœur en flammes/ Veut t'aimer et te maudit, Allemagne/ Ton souffle est froid, Si jeune et pourtant si vieille, Allemagne ! / Ton amour est une malédiction et une bénédiction/ Allemagne/ Je ne peux pas te donner mon amour, Allemagne ! »).

Quant au pont (« Toi/ Moi/ Nous/ Toi/ Toi (écrasante/obsolète)/ Moi (surhommes/exténués)/ Nous (plus on monte haut, plus dure sera la chute)/Toi (l’Allemagne au-dessus de tous) » (cf. « Deutschland über allen », «L’Allemagne au-dessus de tous», en référence au "Deutschland über alles" "l'Allemagne au-dessus de tout" de l'hymne national allemand), il oppose les idées de supériorité et de puissance à celui d’échec moral.

Au-delà de la polémique, les fans auront remarqué un certain nombre de clins d’œil à d’anciens morceaux ou vidéos de RAMMSTEIN : "Germania", qui apparaît avec des ailes d’ange (comme Till en live sur "Engel"), pendant que les musiciens avancent à quatre pattes (comme à la fin du clip de "Mein Teil"), la robe écarlate du prêtre (comme celle du personnage féminin principal de "Du riechst so gut" ?) ou encore le cercueil transparent (comme celui de Blanche-Neige dans celui de "Sonne") semblant contenir le corps de Germania qui flotte dans l’espace… Sans oublier bien entendu le thème au piano de "Sonne" à la fin de la chanson, présent sur « XXI-Klavier », sorti en 2015, alors que défilent les crédits.

Il faudra patienter jusqu’au 26 avril pour que "Deutschland" sorte en single, en version CD, vinyle et digitale. Quant à l’album, sobrement intitulé « Rammstein » et dont vous pouvez découvrir le visuel ci-dessous, il sera commercialisé le 17 mai. Vous pouvez d’ores et déjà le précommander sous ses différents formats ici.

Rappelons également que les deux concerts parisiens des Allemands, les 28 et 29 juin prochains à La Défense Arena, affichent complet.
 


 

Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK