23 octobre 2019, 23:52

SKÁLD

@ Villeneuve D'ascq (Le Kino)

Le Kino est plus connu pour être le cinéma d'art et d'essais de l'Université de Lille, situé sur le campus du pôle lettres et sciences humaines à Villeneuve d'Ascq. Pourtant une fois n'est pas coutume, nous nous y rendons pour assister à un concert. Mythique s'il en est, c'est dans ce lieu que LOUDBLAST débuta sa carrière dans les années 80. Ce soir, c'est le groupe SKÁLD qui est invité à se produire dans le cadre d'un programme culturel autour du chamanisme et rites ancestraux. C'est à 19h que nous sommes invités à nous rendre au Kino pour assister au premier concert de SKÁLD dans la Métropole Européenne de Lille. Nombreuse est la foule qui attend l'ouverture des portes car c'est à guichet fermé que le concert a lieu. Avec deux clips qui dépassent chacun le million de vue sur YouTube et en cumulent prêt de 16 millions à ce jour, le groupe a fait une apparition très remarquée en ce début d'année avec la parution de son premier album « Le Chant des Vikings » chez Decca Records qui vient d'être réédité avec cinq inédits. En norrois, langage des vikings, SKÁLD veut dire barde. Les skáld étaient donc des messagers qui allaient de village en village pour conter et chanter les exploits des héros de la nation vikings et de leurs dieux. « Le Chant des Vikings » n'ayant de français que l'orgine de ses membres et son titre, les chants sont interprétés en norrois. Par conséquent, la restitution scénique de l'album est en soit un challenge. Vont-ils relever le défi et nous emmener dans leur univers ? Vont-ils réussir à briser la glace malgré la barrière de la langue ?

En prenant place dans la salle, nous découvrons une scène plongée dans une ambiance brumeuse et bleutée qui donne une impression de crépuscule. Ce détail laisse à penser que les SKÁLD sont entourés de professionnels qui ne sont pas là pour faire de la figuration, mais bien pour faire le spectacle. Le public est comme une tribu viking qui s'installe dans la grande halle placée au centre du village pour écouter les SKÁLD venus raconter les derniers raids victorieux des guerriers partis à la découverte de nouveaux horizons. Sur scène aucun instrument électrique seuls des instruments accoustiques amplifiés ont leur place. La pénombre s'installant une clameur s'élève et Jaufré Darroux, harpiste et le percussionniste Marti Uibo prennent discrétement place. Mattjö Haussy est le premier des trois SKÁLD à faire son entrée sous les applaudissements de l'auditoire. Sur un fond sonore aussi discret que lugubre, il introduit la soirée par un récit. Sa voix grave installe une ambiance pesante. L'entrée de Pierryck Valence qui reprends le récit chanté à la limite du growl par moment fait monter la tension d'un cran. A son tour, Justine Galmiche vétue de rouge les rejoint pour reprendre le récit secondée par la voix d'outre-tombe de Pierryck. Bien plus que le rouge écarlatte de sa robe et sa position au centre de la scène, la puissance de son chant l'installe comme la prétresse de la soirée. Le personnage autour duquel l'ensemble trouve sa cohérence. Le trio enchaîne par un chant polyphonique qui sonne comme une invocation au dieu Óðinn qui se termine sur un rythme endiablé soutenu par un superbe ensemble de percussions très efficace.

Lorsque Justine introduit "Yygdrasill", l'Arbre Monde, à la guimbarde et que Pierryck et Mattjö sonnent de leurs lurs, nous ne sommes pas loin de nous imaginer comme des guerriers qui embarquent au rythme du tambour pour aller découvrir et conquérir de nouveaux territoires. Alors que nous voguons sur l'océan, Jaufré accompagne de sa harpe, le doux bruit de l'eau qui glisse sur la coque du drakkar. C'est le moment que Mattjö choisi pour invoquer la protection du dieu des océans. Justine enchaîne sur "Niù" qui lui permet de montrer son niveau de maîtrise du chant en norrois. Pour le chant suivant "Ó Valhalla", Pierryck invite le public à reprendre en chœur l'incantation au paradis des vikings. Une fois de plus, la polyphonie du trio envoûte l'auditoire.

Fraîchement accosté sur cette nouvelle terre d'exploration, nous sommes accueillis par les cris d'un corbeau, c'est sur un rythme épuré que Justine nous enchante sur "Rún". Le temps d'une pose, Mattjö vient nous conter "Enn Átti Loki Fleiri Börn" accompagné de Jaufré à la harpe et de Pierryck à la nyckelharpa avant d'enchaîner sur l'entraînant "Flúga" qui remet le focus sur Justine décidément très en voix comme elle le montre sur la reprise de Björk "Jóga", sur laquelle elle vient y poser joliment sa voix. Sur un tempo plus lent que l'original, avec ses graves, elle rend le morceau plus chaleureux.
C'est au rythme des tambours que les trois chanteurs nous content l'histoire de Fenrir, ce loup gigantesque que les dieux enchaînent avec la magie du lien "Gleipnir". Pierryck reprend sa nyckelharpa afin de nous conter "Krákumál". C'est ensemble que nos trois conteurs finissent le concert. D'abord par le triste "Ginnunga" et le joyeux et entraînant "Valfreyjudrápa". C'est sous un tonnerre d’applaudissements que les musiciens quittent la scène. C'est aussi sous ces même applaudissements, qui n'ont pas cessés, que le groupe revient pour interpréter à capela et à quatre voix "Ec man iötna". La soirée se termine par une seconde interprétation de "Ó Valhalla" repris en chœur par le public qui bat la mesure.

C'est ravi que le public quitte la salle et attend le groupe au stand de merchandising et obtenir quelques dédicaces. Le groupe n'a eu aucun mal à briser la glace malgré la barrière de la langue. Sa maîtrise du norrois et de ses instruments était un pré-requis pour la réussite de ce concert. Mais bien plus que l'aspect technique, les membes de SKÁLD ont interprété leurs chansons avec cœur. Accompagné d'une équipe technique dont le professionnalisme est une réelle valeur ajoutée, SKÁLD est aussi un groupe de scène d'une grande qualité !

Blogger : Bruno Cuvelier
Au sujet de l'auteur
Bruno Cuvelier
Son intérêt pour le hard rock est né en 1980 avec "Back In Black". Rapidement, il explore le heavy metal et ses ramifications qui l’amèneront à devenir fan de METALLICA jusqu'au "Black Album". Anti-conformiste et novateur, le groupe représente à ses yeux une excellente synthèse de tous les styles de metal qui foisonnent à cette époque. En parallèle, c'est aussi la découverte des salles de concert et des festivals qui le passionnent. L'arrivée d'Anneke van Giersbergen au sein de THE GATHERING en 1995 marquera une étape importante dans son parcours, puisqu'il suit leurs carrières respectives depuis lors. En 2014, il crée une communauté internationale de fans avant que leur retour sur scène en juin 2018 ne l'amène à rejoindre HARD FORCE. Occasionnellement animateur radio, il aime voyager et faire partager sa passion pour la musique.
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