17 novembre 2019, 19:35

KLONE

• interview Guillaume Bernard

Après l’excellent « Here Comes The Sun » sorti en 2015, KLONE revient avec « Le Grand Voyage » qui confirme le talent du groupe français dans son accession sur la scène rock progressive et part pour une dizaine de dates automnale afin de fêter l’événement. Nous avons rencontré le guitariste et membre fondateur Guillaume Bernard avant sa monté sur scène lors de leur passage à Savigny-le-Temple.


Nous sommes à l’Empreinte en région parisienne pour la release-party de votre dernier album « Le Grand Voyage », comment te sens-tu au lendemain de votre date à Poitiers d’où vous êtes originaire ?
Eh bien ça va très bien, là on vient de se restaurer, il faut qu’on se remette dedans car hier on s’est couché tard, on a pris la route et on n’a pas eu trop le temps de dormir, donc il va falloir être en forme pour tout à l’heure mais ça va bien se passer, le café sera là pour nous réveiller. Hier on a joué devant cinq cent personnes au Confort chez nous à Poitiers, c’est la première fois qu’on a autant de monde, pratiquement deux fois plus que d’habitude, donc super ambiance et tout le monde était très content. Ça fait toujours plaisir de jouer à la maison.

Comment se sont passées les répétitions des nouveaux titres en vues de les interpréter face au public ? Jusqu’à présent seul "Yonder" avait été joué live au Hellfest.
On joue cinq morceaux du nouvel album je crois mais on ne les a pas beaucoup répétés finalement. On ne les avait jamais joués avant de les enregistrer, on a fait une résidence de quatre jours au Confort Moderne à Poitiers justement où on a travaillé le set, on avait bossé les morceaux chacun de notre côté en enregistrant l’album mais on ne savait pas comment ça allait rendre en live. "Yonder" a très bien fonctionné et là les autres sonnent tout aussi bien, le rendu est très bon. Les premières fois où tu joues un morceau tu n’es jamais super à l’aise mais au fil des premières dates on se sent de mieux en mieux avec les nouveaux titres. Techniquement c’est pas un problème, on sait les jouer mais c’est le fait de bouger sur scène, on n’a pas encore nos repères contrairement aux morceaux plus anciens qu’on a joué un paquet de fois où là c’est automatique, alors que sur les nouveaux on doit prendre nos marques, s’habituer à les jouer mais ça nous avait fait ça aussi pour les chansons de « Here Comes The Sun » au début, on se sentait nus et puis avant on avait plus de distorsion dans nos morceaux, là on joue plus avec des sons clairs ce n’est pas le même boulot, ça change un peu la donne. Mais t’inquiètes pas ce soir ça va aller. (rires)

La section rythmique est toute nouvelle, Martin Weill derrière les futs succède à Morgan Berthet qui a enregistré l’album avec vous, et en ce qui concerne le poste de bassiste, il semblerait qu’il y ait du mouvement.
Jonathan Joly qui était à la basse a joué sa dernière date avec nous à l’Euroblast, normalement c’est Julian Gretz (PSYKUP) qui nous accompagne depuis 2013 pour les lives, mais ce soir c’est Enzo Alfano qui est aussi le guitariste d’UnCuT, qui fait la basse pour nous. On a fait des tests avec lui pendant la résidence et ça s’est super bien passé, il est de Poitiers donc c’est pratique et on se voit souvent, il assure sur scène. Après le but pour nous c’est d’avoir si possible une formation avec des musiciens de Poitiers afin d’éviter tous les soucis d’organisation pour les concerts, Julian habite Toulouse, l’ingénieur du son à Nancy donc ça rend les choses compliquées et avant on avait aussi le batteur qui était sur Lyon, donc quand tu as tout le monde qui est dispatché et avec en plus des projets annexes ça devient compliqué, c’est pourquoi on souhaite rassembler des musiciens de Poitiers , les meilleurs poitevins, et là on est plutôt pas mal. Martin est arrivé il n’y a pas très longtemps, c’est un ancien élève de Florent Marcadet (batteur sur les précédents albums, ndlr) et ça la fait très vite avec lui, il bossait déjà les morceaux de KLONE avec Florent durant ses cours, il est arrivé dans le groupe déjà bien préparé. Là on est content du fonctionnement tel qu’il est et il y a de grandes chances pour qu’on continue avec cette formation.
 

"On remarque durant les concerts que certaines chansons ont un impact sur certaines personnes dans le public"



© Benjamin Delacoux | HARD FORCE


Le grand voyage est une invitation à l’exploration mentale, à l’évasion, voire à la spiritualité. Ta démarche est-elle spirituelle justement ?
Oui certainement et peut-être plus encore avec cet album. Après je ne suis pas baptisé, je n’ai pas de religion, je ne suis pas non plus athée et je ne crois pas en quelque chose de particulier mais avec ce disque j’ai eu une phase de questionnement, des questions qui se sont transformées en réponses musicales et c’est marrant car quand je composais j’étais un peu dans ma bulle, concentré sur ce que je faisais et au final quand Yann a posé sa voix et ses textes dessus on a eu plein de retours de personnes qui ont écouté le résultat en nous disant qu’ils avaient ressenti quelque chose aussi. Ça fait toujours plaisir de réaliser que d’autres personnes ressentent la même chose que toi quand tu composes. Pour certaines d’entre elles, elles y voyaient comme une sorte de quête spirituelle. Avec « Le Grand Voyage » on a voulu proposer quelque chose de vague, de ne pas donner une direction précise aux gens au niveau des paroles. Des personnes m’ont dit que tel ou tel titre faisait directement référence à une expérience personnelle qu’ils avaient vécue. Pour « Here Comes The Sun » durant la tournée, on a joué un soir en hommage à une personne décédée qui nous avait programmés dans sa ville et durant le concert les paroles résonnaient d’une façon particulière pour ceux qui la connaissaient et quand on pensait aux raisons pour lesquelles on était là en train de jouer dans ce lieu précis et que tu voyais les gens pleurer… C’était très fort comme sensation. On remarque durant les concerts que certaines chansons ont un impact sur certaines personnes dans le public, il y a ceux qui se laissent aller et d’autres qui ont peur de montrer leurs émotions. On nous a dit que notre musique avait des effets thérapeutiques et je reçois de plus en plus de messages dans ce sens, c’est étonnant pour moi, je suis touché et aussi un peu gêné parce que je n’ai jamais prétendu vouloir faire ça dans ce sens. Notre but dans le groupe c’est de faire une musique en raccord avec ce qu’on est et quand on nous demande pourquoi on ne fait plus d’album typé metal comme les premiers c’est parce qu’on est comme ça aujourd’hui tout simplement, quand on a commencé avec KLONE on ne s’est jamais donné de restrictions. On pourrait refaire des morceaux bourrins mais je ne m’y retrouve pas forcément même si on prend plaisir à jouer les vieux titres. Du coup aujourd’hui je joue ce qui me vient en tête, j’ai un son qui me plait et je sais que ça va plaire aux autres membres du groupe, avec Yann globalement tout ce que je propose lui convient et pareil pour moi avec les paroles qu’il écrit, ça a toujours très bien fonctionné entre nous deux et je pense que ça se ressent dans notre musique, que le groupe n’est pas dans un rapport conflictuel.

Quel a été l’album qui t’as fait basculer dans la musique à en devenir finalement musicien.
Difficile à dire… dans le bourrin je dirais PANTERA…

Tu as d’ailleurs un petit côté Phil Anselmo !
Ah (rires) un peu plus mince peut-être, il a grossi, quoi que moi aussi mais moins que lui (rires). Il y a plein d’albums et d’artistes à travers différentes phases, j’ai eu ma période metal avec PANTERA, SEPULTURA mais aussi grunge avec NIRVANA, SOUNDGARDEN et aussi typé gothique avec TYPE O NEGATIVE, PARADISE LOST, KATATONIA et dans un autre style j’ai bouffé beaucoup de BEATLES, du PINK FLOYD, Les DOORS avec mon père, même de la variété avec Bernard Lavilliers, c’était mon tout premier concert, j’avais huit ans.

Vous avez fait la première partie de Devin Townsend sur plusieurs dates, lui aussi apprécie beaucoup les productions où foisonnent les delays et echos, avez-vous appris des choses au contact du Canadien ?
Oui j’ai appris de lui mais avant même de le rencontrer car j’ai commencé à écouter Devin Townsend avec l’album « Ocean Machine » et j’ai tout de suite kiffé les morceaux, la production, le son, les effets, j’ai vite capté tout ce qui se passait derrière et je trouvais qu’il avait complètement raison de faire comme ça, c’est une démarche vers quoi je voulais tendre aussi mais à l’époque les ingénieurs du son avec qui on bossait quand on était jeunes nous disaient « non c’est ringard de mettre de la reverb » et au final aujourd’hui on a enfin réussi à faire ce qu’on voulait, on aurait même dû le faire plus tôt mais peut être qu’on aurait pas assumé et puis les morceaux s’y prêtaient moins qu’aujourd’hui mais le fait d’avoir joué avec Devin, d’avoir vu ses balances, d’entendre le son de sa guitare et qu’il n’a pas peur de mettre une reverb de malade ! Ça fait l’effet d’une vague qui passe, des vagues de sons. Puis j’aime la façon dont il traite sa voix. Après je suis moins fan de ses dernières productions, j’ai dû lâcher après « Terria » et aujourd’hui il un côté un peu heavy dans sa voix que j’aime moins et puis j’ai aussi moins le temps pour écouter des albums.
 

"On a gardé l’énergie metal en live, en terme de son même si sur le disque c’est un peu plus spatial, plus doux"



© Kscope Music


Avoir signé chez Kscope Music vous ouvre un peu plus les portes du marché international et vous faite parti d’un catalogue plus adapté...
Avant on était chez Pelagic qui travaillait déjà pas mal à l’étranger depuis « Here Comes The Sun » et là avec Kscope on profite de leur réseau et de la fan-base qui les suit, ils ont un catalogue au style proche de ce qu’on fait, les progeux qui ne nous connaissaient pas avant ont commencés à nous écouter depuis car on est dans le bon canal et les retours sont très bons. En même temps avec KLONE on a jamais eu de mauvais retours de presse, depuis qu’on a commencé on a toujours eu de bons échos sur notre musique donc c’est bien on est content.

Arrives-tu à trouver le temps de gérer le label Klonosphere ?
Oui et puis je ne suis pas tout seul, il y a Pat Agaoua et Julie Trouvé qui gèrent aussi, on bosse à trois dessus, aujourd’hui je ne m’occupe plus de la promo directement, on a des groupes de discussions avec des échanges de fichiers à valider, je supervise les activités, ça fait six ans que je travaille avec Pat, Julie qui est aussi la chanteuse de POLAR MOON est arrivée dans le projet en début d’année et elle est très motivée, elle bosse bien donc c’est cool.

KLONE à 20 ans cette année, c’est ce qu’on peut appeler aussi un grand voyage, quel regard poses-tu sur ces deux décennies ?
Beaucoup de choses. Déjà neuf disques, un bon nombre de concerts, des tournées à l’étranger, en Australie, en Europe mais on va dire dix ans de grosses galères au début et puis on a senti que le public commençait à nous suivre entre « All Seeing Eye » et « Black Days » avec la reprise "Army Of Me" de Björk, c’est le truc qui nous a fait monter et c’est constant depuis, ça ne fait que monter.



© Axelle Quétier | HARD FORCE


Et même avec votre évolution de style musical, l’ascension continue, il n’y a pas eu d’impact négatif finalement...
Non et à l’époque de « Here Comes The Sun » le label Verycords nous disait « ah quand même c’est risqué ce que vous faites, vous changez de style, ce serait mieux de faire comme avant… », mais non, on a fait ce qu’on voulait, on avait rien à perdre et je ne voulais pas faire du SLAYER ou du CANNIBAL CORPSE ou ce qu’on peut entendre aujourd’hui où c’est principalement que du metalcore, je ne trouve pas qu’il y ait une identité musicale là. Déjà au début de KLONE on avait quelques rythmiques qui faisaient penser à du MESHUGGAH et ce n’était pas encore à la mode de faire ça mais j’avais senti le truc et je voyais que plein de groupes qui commençaient à faire de la syncope et là j’ai dit « ok bon, bah on va leur laisser ça et nous on va s’orienter vers autre chose », en plus techniquement ce n’était pas ce qu’on maîtrisait le mieux non plus et on ne voulait pas faire du sous DAGOBA. On a gardé l’énergie metal en live, en terme de son même si sur le disque c’est un peu plus spatial, plus doux, on a une énergie physique en live qui vient clairement du metal, c’est ce qu’on aime le plus d’ailleurs, c’est le son, l’énergie, plutôt que de faire du tricotage à la guitare, de toute façon je ne sais pas faire les trucs de shredder (rires).

Certains artistes ne sont pas à l’aise sur scène et préfèrent l’expérience studio avec le rendu sur disque alors que pour d’autres le studio est juste une étape à passer pour pouvoir retourner sur scène car c’est là où ils aiment être. Pour toi jouer sur scène c’est synonyme de... ?
J’aime bien les deux, déjà parce que c’est tripant de voir la réaction des gens quand tu sors le gros son en live comparé à celui que tu fais en studio. Non, Je ne suis pas stressé à l’idée de faire des concerts, j’aime bien la phase créative en studio mais le côté chiant c’est la rigueur liée à l’enregistrement, avec le clic, la concentration tout ça c’est plus relou évidemment mais bon c’est le moment de travail on va dire. Le moment que je préfère c’est lorsque je fais mes démos, que je pose mes idées et que j’arrive à visualiser le résultat, ce que ça va donner à la fin et en live car lorsqu’on les compose pour le disque on le fait aussi en vue de pouvoir les jouer en live, je ne ferais pas un truc qui sonnerait tout pourri en concert ou qu’on serait incapable de pouvoir reproduire du coup, on garde toujours ça en tête.


« Le Grand Voyage » est disponible depuis le 20 septembre chez Kscope Music, tentez l'expérience, vous vous sentirez pousser des ailes...

Blogger : Benjamin Delacoux
Au sujet de l'auteur
Benjamin Delacoux
Guitariste/chanteur depuis 1991, passionné de musique, entré dans les médias à partir de 2013, grand amateur de metal en tous genres, Benjamin Delacoux a rejoint l'équipe de HARD FORCE après avoir été l'invité du programme "meet & greet" avec UGLY KID JOE dans MetalXS. Depuis, il est sur tous les fronts, dans les pits photo avec ses boîtiers, en face à face en interview avec les musiciens, et à l'antenne de Heavy1, dont l'émission MYBAND consacrée aux groupes indépendants et autoproduits.
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