Après avoir été le pape d'une église sataniste d'opérette, Tobias Forge se serait-il métamorphosé en père Noël en débarquant avec sa hotte en cette fin d'année ? Cette tournée européenne dans de grandes salles est un chouette cadeau pour les fans de GHOST, de plus en en plus nombreux. C'est aussi l'événement idéal pour se rendre compte de la réalité et de l'évolution du groupe, relatée par son glorieux leader dans moult interviews. A Toulouse, on n'a pas été déçus : GHOST revient pour la dernière date de cet "Ultimate Tour Named Death" avec un fabuleux spectacle, pensé pour les grandes salles. Il fait beau et pas encore nuit devant le Zénith, C'est vrai qu'il est 18 heures, mais ça commence tôt, il y a deux premières parties. Les files d'attente sont assez courtes, les imposants stands d'images presque pieuses à la gloire des Suédois ne sont pas pris d'assaut, les bars non plus.
La grande salle toulousaine n'est pas dans sa configuration maximale, des rideaux ont été tirés pour la réduire. Et c'est devant une salle pas encore pleine que les lumières s'éteignent pour accueillir d'autres Suédois. TRIBULATION est en ville ce soir pour un set de sept titres issus de ses deux derniers albums. Le groupe a quasiment lâché son death metal d'antan pour du metal bien plus classique aux influences diverses, ne conservant de ses premières amours que son chant d'outre-gorge, avec un bassiste-chanteur aux cordes vocales épaisses comme des rails de chemin de fer. Le groupe joue devant un backdrop géant, les amplis sont cachés, la sorcière Jonathan Hulten virevolte avec sa guitare et ses talons. C'est bien joué et ça ne fait pas peur aux enfants.
Ces derniers n'auront pas peur non plus des Américains ALL THEM WITCHES, un groupe qu'on attend impatiemment après leur bluffant passage au dernier Hellfest. La formule en trio leur convient toujours, le clavier Jonathan Draper, parti l'année dernière, n'ayant pas été remplacé. Leur musique est un peu plus compliquée à appréhender, plus lente, plus barrée, du stoner assez blues avec des grandes parties de guitare. Formidable, à condition de se laisser emporter.
Après ces mises en bouche agréables, place aux héros de la soirée. GHOST est de retour 4 ans après son passage dans un Bikini bien rempli, aux coutures prêtes à craquer. Après avoir transformé la salle de concert en église, avec encens et vitraux, rebelote au Zénith, qui s'est mué en megachurch pour la grand messe à l'américaine du Cardinal Copia, venu en force avec ses sept Ghouls sans nom (pratique pour les présenter), tels les samouraïs, les mercenaires ou les péchés capitaux. Le décor est dans la même configuration que sur la tournée “Meliora”, mais en plus grand, en plus beau, en plus impressionnant, avec un damier au sol et un escalier presque magistral. Ce soir, c'est encore plus de GHOST. Plus de musiciens, plus de lumières, plus d'effets spéciaux et plus de musique, avec 20 titres joués sur cette tournée pour un show de 2 heures. Et quel show ! Finis ou presque les soutanes, la grosse mitre de Papa Emeritus et les costumes aussi impressionnants qu'inquiétants, mais tellement peu pratiques pour bouger sur une grande scène. Tout l’espace est occupé par les Ghouls à manche qui courent et le Cardinal Copia, maître de cette cérémonie. La plateforme en haut de l'escalier est occupée d'un côté par deux Ghouls aux claviers et de l'autre par la Ghoul à baguettes et sa batterie plus grosse, et par une autre à manche assez discrète. C'est d'ailleurs plus une Ghoul à micro qui œuvre là, non pas la doublure vocale d'un chanteur fatigué, c'est même loin d'être la cas, mais un super choriste qui double à de nombreuses reprises la voix de Tobias Forge, permettant à GHOST de se rapprocher du riche travail de production effectué en studio.
Côte setlist, les titres de « Meliora » sont plus joués que ceux de « Prequelle », on a droit à “Mary On A Cross” et “Kiss The Go-Goat", deux nouveaux titres assez pop dévoilés il y a quelques semaines, encore des tubes et quelques titres des deux premiers albums. Il y a aussi ces quatre instrumentaux, dont "Miasma" et son chouette solo de saxophone, joués alors que le Cardinal est encore allé se changer.
Mais même en coulisses, c'est encore du Tobias Forge, le leader de GHOST ayant tout pensé, tout écrit, tout prévu et tout enregistré tout seul ou presque. Comme un meneur de revue, il chante, esquisse quelques pas de danse, joue la comédie, parle moins qu'en festival, avec des propos toujours au-dessous de la ceinture. Il est aujourd'hui question de nichons, pas trop raccord avec ce qu'on apprend des habitudes de certains dans l'Eglise.
Revoir GHOST aujourd'hui, c'est comme un aboutissement ce qui avait été fait avant, d'une excellente ébauche, avec duels de guitares, apparitions, encens et tout le reste. On dira ce que l'on voudra, mais GHOST est devenu en moins de 10 ans une très grosse machine. Le groupe impressionne toujours autant, même en ayant rangé son sulfureux côté sataniste un peu malsain qui lui a permis de se faire connaître. On le lisait à longueur d'interviews, Tobias Forge voyait l'avenir de son groupe dans des stades et de grandes salles et il a conçu ce spectacle en ce sens, ce que tout le monde a pu vérifier ce soir. Vivement la prochaine !
Photos © Lilian Ginet - Portfolio