3 mars 2020, 19:00

BODY COUNT

• "Carnivore"

Album : Carnivore

Il y a des histoires d'amour longues et improbables. Tout a démarré comme le plan d'un soir en 1992, de façon anecdotique : «des blacks de Central Park font du metal !» criaient les potes, ça a fait un buzz mémorable en mêlant avec brio rap et metal et en déchaînant les hard rockers des 90's qui prenaient un plaisir indéniable. 28 ans après l’histoire se poursuit, avec des parutions irrégulières mais de qualité. On peut appeler ça une vraie romance... Après leurs retours aux affaires il y a deux albums de cela, BODY COUNT sort de son ghetto un disque intitulé «Carnivore».

Démarrage violent au milieu des sirènes de police, avec le titre éponyme. C’est comme à la grande époque, enlevé et lourd à la fois. Les riffs thrash sont au rendez-vous, avec la rythmique qui martèle façon pistolet mitrailleur uzi un hardcore furieux. Ice-T toujours en verve investit les rues de nos plaisirs obscures. Ca growl et ça rappe dans la nuit. Intensité viscérale et soli old-school, comme c'est bon. BODY COUNT a évolué dans son style, la structure est plus développée, mais le plaisir premier est toujours présent. En bref, on se prend une dizaine de titres bien vénèr dans les oreilles et on en redemande. C'est jouissif comme lors du premier album, sans être ni redondant, ni facile. Les rythmes sont changeant, les guitares s’inspirent d’énormément de genres : hardcore, thrash, groove metal, punk…

Ice-T invite des amis, Riley Gale de POWER TRIP vient crier sur "Point The Finger", avec pour notre bonheur des digressions graisseuses à la SLAYER. Nous nous souvenons tous de l'amour que porte BODY COUNT au groupe de Kerry King depuis leur reprise de "Raining Blood". "Point The Finger" fonce tête baissée dans le gras.
Autre invité de luxe, Jamey Jasta de HATEBREED. "Another Level" offre une introduction plus "South Of Heaven" que South Central, le duo de chanteurs monte haut comme pour dépasser les barrières des genres musicaux. Un autre niveau ? Après tout c'est ce que ces messieurs scandent. Hypnotique et pénétrant. Mais la surprise est le duo avec Amy Lee d'EVANESCENCE. "When I'm Gone" fait s'entremêler la rythmique hardcore avec de somptueux échos gothiques. Titre inspiré s'il en est (ça aurait pu être complètement foiré, mais non), avec accélération et breaks, voilà une ouverture à saluer.

Sur chaque album de BODY COUNT nous avons droit à une reprise d’un groupe qui a beaucoup influencé le groupe. Une tradition sympathique. Après SUICIDAL TENDENCIES ou SLAYER, quelle surprise d’entendre démarrer "Ace Of Spadse" de MOTÖRHEAD, et le moins qu'on puisse dire c’est que c’est enlevé. La voix de Ice-T se substitue à merveille à celle de Lemmy et on se laisse embarquer dans un west coast british heavy metal jouissif.
Un album riche je vous disais. On retrouve le BODY COUNT groovy-metal sur "Bum Rush", "Colors" et "Critical Beatdown", avec des allitérations légendaires, je parle bien sûr des légendaires "Fuck Motherfucker". Autant ça sonne et résonne bien, autant faut pas chercher à décrypter. Ah, Ice-T, sacré poète Cornélien !

«Carnivore» est un must have peut-être moins extrême dans l'usage de la violence du riff que sur « Bloodlust » (et encore, la plupart des morceaux défoncent bien), mais il est extrême dans son exploration des sens. Ses divers titres réveillent en nous toutes les nuances qui peuvent composer les sentiments de l'auditeur à leur écoute. La badassitude du rockeur en somme. Une histoire d’amour compliquée mais qui perdure, on se déchaîne en chantant sur "The Hate Is Real" mais on a une "nom de Dieu de banane". Beauté et hargne primale. Plus que toute chose, c’est ça BODY COUNT !

Blogger : Christophe Scottez
Au sujet de l'auteur
Christophe Scottez
Chris est ethnologue à ses heures perdues, vétéran des pogo joyeux en maillots de core. Un explorateur curieux, grand amateur de riffs et de chants sauvages. Il a grandi dans les glorieuses années 80, bercé par les morceaux canoniques d’ACCEPT, SCORPIONS, MOTLEY CRUE et autres GUNS N ROSES. Traumatisé par le divorce entre Max Cavalera et son groupe, ainsi que par un album des Mets un peu «chargé» en n’importe quoi, Chris a tourné 10 ans le dos au hard rock. Puis, un jour, il a par hasard découvert qu’une multitude de nouveaux groupes avait envahi la scène … ces nouveaux sauvages offraient des sons intéressants, chargés en énergie. Désireux de partager l’émo-tion de ce style de metal sans la prétention à s’ériger en gardien d’un quelconque dogme, il aime à parler de styles de metal dit classiques, mais aussi de metalcore et de néo-metal. Des styles souvent décriés pour leurs looks de minets, alors que l’importance d’un album est d’abord le plaisir sonore que l’on peut en tirer, la différence est la richesse du goût. Mais surtout, peut-on se moquer de rebelles coquets alors que les pères fondateurs du metal enfilaient des leggins rose bonbon et pouponnaient leurs choucroutes peroxydées ?
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK