7 mars 2020, 23:52

SAOR + CARACH ANGREN + BORGNE + SULPHUR AEON + SPECTRALE

@ Denain (In Theatrum Denonium)

Avant toute chose il convient de tirer un immense coup de chapeau à l’association Nord Forge, organisatrice du In Theatrum Denomium. Face à l’annulation, la veille de l’événement, de la venue de CARPATHIAN FOREST, la tête d’affiche du festival, les organisateurs ont remué ciel et terre, fait chauffer les portables pour trouver un groupe de remplacement... et y sont parvenus ! Un grand bravo à eux... pour ce tour de force comme pour l’organisation générale, de grande qualité. Les 540 spectateurs présents – sold out ! – ont apprécié !

Ce cinquième acte du ITD, dans le cadre majestueux du théâtre à l’italienne de Denain – parenthèse culturelle : ce bâtiment est la réplique au cinquième de l’Opéra Garnier – débute avec la prestation de SPECTRALE, dans l’intimité feutrée du fumoir, sous un magnifique lustre en cristal. Les musiciens, pour certains anciens membres de THE GREAT OLD ONES, en mode acoustique, livre une prestation remarquable. Une émotion puissante se dégage des morceaux féeriques du groupe, traversés des stries oniriques du violoncelle palpitant de Raphaël Verguin. Comme l’impression d’être à l’abri, au sein d’une clairière, quand les bois alentours menacent... Parfois gronde la batterie, comme si des créatures féroces s’apprêtaient à attaquer. Envoûtant.
 


SULPHUR AEON, tout de noir vêtu, commence sa messe lovecraftienne avec l’incantatoire "Cult Of Starry Wisdom". Il est suivi, comme sur leur dernier disque, « The Scythe Of Cosmic Chaos », par la paire "Yuggothian Spell" / "The Summoning Of Nyarlathotep", ce morceau étalant une puissance malsaine portés par des riffs d’une efficacité indicible, avec le chanteur scandant « Nyar-La-To-Thep !» – quelle claque ! Et arrive ensuite le "hit" du groupe, issu de son incontournable premier album : "Inexorable Spirits", avec son solo, son feeling black metal, son sens épique, son chant possédé. Ce début de concert plonge la salle dans l’ambiance malsaine du mythe de Cthulhu, porté en étendard par les membres du groupe. Les mélodies noires, les atmosphères lugubres se marient ainsi à la furie, au mur de guitares et aux blast beats – "Lungs Into Gills". Le bassiste, caché derrière ses cheveux, ressemble à une créature d’un autre monde quand résonne le magnifique "Swallowed By Ocean’s Tide", entre arpèges hantés et tentation heavy. « Ph'nglui mglw'nafh Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn ».
 


BORGNE, tout en froideur tranchante, en folie blanche, assène sa musique avec rage et conviction, nimbées d’une certaine distance. Pas de communication, à l’image de la claviériste qui se fond dans l’obscurité, s’y confond, ombre grise dans le noir. Seul l’un des guitariste, yeux déments écarquillés, regarde parfois le public, comme pour l’attirer dans les arcanes sombres du groupe. Le black metal des Suisses, porté par le tempo élevé d’une batterie programmée, se marie à l’indus ("La Porte du Chaos"), s’offre de brèves respirations avant de replonger dans une obscurité sous tension, à la violence intense et primitive. Les morceaux – cinq au total – s’étirent en un long fleuve boueux, hypnotique... qui invite à la noyade, au suicide – à l’image du désespéré "The Last Thing You Will See". Seul un problème technique, vite résolu, vient briser un bref instant la malsaine magie qui enveloppe le théâtre de Denain.
 


CARACH ANGREN... Voilà le genre de groupe qui ne laisse pas indifférent... Le black atmosphérique des Bataves, carré des claviers emphatiques à la batterie généreuse sur la double pédale, est assurément de qualité... mais le groupe n’est jamais loin du ridicule, de la caricature. Une partie du public adore, captivée par la présence théâtrale de Sérénor. Le frontman à l’énergie débordante arpente la scène, joue à merveille son rôle, alterne cris stridents et growls. Il est bien secondé par le claviériste qui semble possédé par l’esprit de Michael Jackson tant il mime son moonwalk – jamais je n’aurais pensé écrire le nom de cet artiste dans une chronique... Massif, le guitariste en tablier de boucher assène ses riffs efficaces, entre black et thrash/death dans une quasi immobilité. Le back drop et un masque difforme de poupée contribuent à l’ambiance de films d’horreur chère au groupe. Toutefois, entre des compositions qui ont parfois tendance à partir dans tous les sens, et des accoutrements grotesques – la couronne en tête de mort – on a parfois l’impression de plonger dans une mauvaise série Z. Et que penser d’un groupe qui à une culotte à sa gloire dans son merchandising ?
 


Arrivé le matin même d’Écosse, complété par un guitariste lancé dans le grand bain sans préparation, SAOR a livré une prestation enthousiasmante. Certes une partie du public a déserté le théâtre – les invités de dernière minute n’ont que peu de rapport avec CARPATHIAN FOREST – mais, après un début timide, le concert trouve son rythme, et atteint son apogée sur un "Tears Of a Nation" gorgé d’émotions. Le black metal maîtrisé du groupe se teinte de touches celtiques incarnées par le violon. La furie née des growls du chanteur/bassiste disparaît derrière des passages atmosphériques, comme si un nuage mordoré venait cacher le monstre du Loch Ness. Le mariage entre puissance et pureté est réussie. Le violoniste s’adresse en français à la foule, le frontman lance de petites blagues et la fosse se prend au jeu... au point de se voir gratifier d’un rappel !
Musiciens et spectateurs se quittent le sourire aux lèvres !

InTheatrumDenonium.fr
 

Blogger : Christophe Grès
Au sujet de l'auteur
Christophe Grès
Christophe a plongé dans l’univers du hard rock et du metal à la fin de l’adolescence, au tout début des années 90, avec Guns N’ Roses, Iron Maiden – des heures passées à écouter "Live after Death", les yeux plongés dans la mythique illustration du disque ! – et Motörhead. Très vite, cette musique devient une passion de plus en plus envahissante… Une multitude de nouveaux groupes a envahi sa vie, d’Obituary à Dark Throne en passant par Loudblast, Immortal, Paradise Lost... Les Grands Anciens – Black Sabbath, Led Zep, Deep Purple… – sont devenus ses références, comme de sages grands-pères, quand de jeunes furieux sont devenus les rejetons turbulents de la famille. Adorant écrire, il a créé et mené le fanzine A Rebours durant quelques années. Collectionneur dans l’âme, il accumule les set-lists, les vinyles, les CDs, les flyers… au grand désarroi de sa compagne, rétive à l’art métallique.
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