3 septembre 2020, 19:00

UN JOUR, UN ALBUM

• JUDAS PRIEST : "Painkiller"


​Le 3 septembre 1990 sortait « Painkiller » de JUDAS PRIEST. L'idée n'est pas d'en faire la chronique, mais d'effectuer une rapide remise en contexte tout en rappelant quelques faits ou anecdotes que vous ignoriez peut-être sur le douzième album studio des métallurgistes britannique, qui fête aujourd'hui ses 30 ans.
 

• Après avoir placé la barre très haut avec « Screaming For Vengeance » (1982), et surtout avec son successeur, « Defenders Of The Faith » (1984), JUDAS s'est – selon comment l'on se place – fourvoyé ou a agrandi son spectre musical avec le décrié mais néanmoins très bon « Turbo »… pour qui n'a pas d'œillères en cuir noir clouté s'entend. Mais « Ram It Down » marque le pas. Les parrains du heavy metal seraient-ils sur le point de se faire détrôner par les METALLICA, MEGADETH et autres ANTHRAX sur qui ils ont eu une véritable influence ?
Non, car dans un sursaut d'orgueil, les Britanniques qui ont inspiré tant de jeunes formations vont puiser une énergie nouvelle. Et trouver une seconde jeunesse en même temps qu'une nouvelle crédibilité avec « Painkiller » qui durcit le ton et accélère le tempo, histoire de rappeler qui sont les patrons. Et aussi que le speed metal, ça les connaît.

• Enregistré sur une période de trois mois, de janvier à mars, aux Studios Miraval à Correns en France, le douzième JUDAS sera terminé aux Wisseloord Studios à Hilversum au Pays-Bas. A la console, on retrouve Chris Tsangarides (THIN LIZZY, BLACK SABBATH), qui avait produit « Sad Wings Of Destiny » (1976) avant d'être "remplacé" sur le long terme par Tom Allom. 

• « Painkiller » marque les débuts de Scott Travis à la batterie, remplaçant de Dave Holland qui, selon le communiqué de presse de l'époque, connaît des problèmes familiaux et de santé et « n'est plus en mesure de jouer » (c'est une boîte à rythmes qui a d'ailleurs été utilisée en studio sur « Ram It Down »). Ex-membre de RACER X, groupe américain signé chez Shrapnel qui comptait dans ses rangs le virtuose Paul Gilbert (MR. BIG), Travis s'y connaît "un peu" en double grosse caisse, ce qui tombe bien.
Trente ans plus tard, le grand batteur – par le talent et par la taille (1,93 m) – officie toujours derrière les fûts, ce qui fait de lui celui qui aura passé le plus d'années au sein du groupe.

JUDAS voulait sortir l'album le plus rapidement possible. Pas de chance, CBS Records, sa maison de disques, décide d'attendre le verdict du procès aussi grotesque que sordide qu'a intenté au groupe James Vance, un fan. Rappelons les faits : en 1985, deux jeunes Américains ont fait un pacte après avoir écouté en boucle, sur fond de consommation de drogues et d'alcool, « Stained Class », album du PRIEST sorti sept ans plus tôt, sur lequel figure une reprise de "Better By You, Better Than Me" de SPOOKY TOOTH. 
"Poussés" par un prétendu message subliminal dans la chanson qui dirait « do it » ("Fais-le"), ils ont décidé de se suicider avec un fusil de chasse calibre 12. L'un est mort mais Vance, défiguré, a survécu et décide d'attaquer le groupe en justice en 1990. Le procès, très médiatisé, durera trois semaines, et le plaignant, qui décèdera par la suite d'une overdose de médicaments, sera débouté. Pendant les auditions, Rob Halford fera remarquer que si messages subliminaux il y avait, ils choisiraient plutôt d'inciter les fans à acheter davantage de leurs albums qu'à se suicider…
Le jugement est rendu le 24 août et c'est ainsi que « Painkiller » atterrit (lourdement) dans les bacs le 3 septembre. 

• Le mois de la sortie de l'album, le premier single déboule – littéralement… 

 


• L'album se classe directement 26e des charts américains et, quatre mois plus tard, est certifié disque d'or (500 000 ventes) outre-Atlantique. Il dépassera les 2 millions de ventes dans le monde, ce qui en fait le plus gros succès commercial de la carrière du PRIEST

• En 1991, le morceau sera nominé dans la catégorie "Best Metal Performance" aux 33e Grammy Awards, qui récompense une chanson ou un album (ça n'est pourtant pas la même chose). Sont également en lice ANTHRAX (« Persistence Of Time »), MEGADETH (« Rust In Peace »), METALLICA ("Stone Cold Crazy", une reprise de QUEEN) et SUICIDAL TENDENCIES (« Lights… Camera… Revolution »). Comme en 1990, année de création de la catégorie, mais aussi en 1992, c'est METALLICA qui repartira avec les honneurs.

• Le 13 septembre 1990, les cinq hommes donnent un "concert d'échauffement" d'une heure et 11 titres au 3e Foundations Forum à Los Angeles. Une convention 100 % metal qui se tiendra une fois par an, de 1988 à 1997, et où se côtoient les plus grands noms, sur scène, mais qui permet également aux fans de rencontrer leurs idoles qui participent également à des conférences thématiques.
Leur performance, réduite à 8 morceaux, apparaîtra sur un split live album pirate, « Los Angeles 1990 » avec, sur l'autre face, le concert de Bruce Dickinson époque "Tattooed Millionaire" enregistré le 27 juin de la même année. A L.A., JUDAS n'interprètera que deux extraits de « Painkiller », "Between The Hammer And The Anvil" et "Leather Rebel".
 


• Après un concert au Transbordeur, à Villeurbanne, le 12 mars 1991, le "Painkiller Tour" emmènera cinq jours plus tard Halford & Co dans la capitale, au Zénith, avec ANNIHILATOR et PANTERA qui assurent l'intégralité de la tournée européenne, bien qu'à l'origine, ce soient EXODUS et DEATH ANGEL qui avaient été annoncés. Aux USA, par contre, les Anglais tournent avec MEGADETH et TESTAMENT.

• C'est d'ailleurs à Rob Halford que l'on doit la présence de PANTERA à l'affiche. Les Texans, qui ont sorti l'été précédent leur « Cowboys From Hell » qui pose les bases du groove metal, ont tapé dans l'oreille avertie du Metal God. Un an plus tard, les Américains et lui enregistreront ensemble "Light Comes Out Of Black" pour la B.O. du film Buffy The Vampire Slayer (Buffy, Tueuse de Vampires en V.F.).

• Second single, "Touch Of Evil" est l'unique titre coécrit par le producteur Chris Tsangarides. Les parties de claviers (les seules de l'album) sont l'œuvre du vétéran Don Airey (Ozzy Osbourne, BLACK SABBATH, WHITESNAKE et futur DEEP PURPLE).


• Malheureusement, bien que l'album soit très favorablement accueilli par la presse et les fans, les tensions entre Rob Halford et les autres membres du groupe ne font qu'empirer. Le frontman souhaite en effet se lancer dans un projet parallèle plus thrashisant, mais Glenn Tipton et K.K. Downing, les guitaristes, ne l'entendent pas de cette oreille et considèrent qu'il n'y a pas de place pour une "danseuse" dans la carrière des membres de JUDAS
Halford claquera officiemment la porte en mai 1992, dès la fin des obligations contractuelles qui le lient au groupe dont il est le frontman depuis dix-neuf ans, et lui signifiera officiellement son départ … par fax. La guerre est déclarée, comme l'indique le titre du premier album de FIGHT (« War Of Words »), premier groupe post-JUDAS du Metal God, enregistré avec Scott Travis.
Sa "parenthèse" en solitaire – qui le verra également fonder 2WO, un projet plus indus, puis HALFORD – durera douze ans avant qu'il ne fasse son come-back au sein du PRIEST avec l'album « Angel Of Retribution » (2005). Pendant ce temps, il sera remplacé par Tim "Ripper" Owens, chanteur d'un tribute band JUDAS, qui enregistrera deux albums avec ses idoles, ainsi que deux live. Mais les Anglais s'essoufflent…

• La pochette, un rien clichesque il faut bien le dire (mais elle est basée sur la chanson qui donne son nom à l'album, ceci expliquant cela), est l'œuvre de Mark Wilkinson. L'artiste britannique au nom prédestiné a travaillé avec JUDAS de « Ram It Down », leur précédent album sorti en 1988, jusqu'à « Redeemer Of Souls » (2014). Il a également collaboré avec MARILLION, Fish et IRON MAIDEN (on lui doit, entre autres, l'artwork de « The Book Of Souls »).

• Dernier single de « Painkiller », "Night Crawler" sortira en 1993 mais, pour des raisons évidentes, il n'y aura pas de vidéo.

Discographie

Rocka Rolla (1974)
Sad Wings Of Destiny (1976)
Sin After Sin (1977)
Stained Class (1978)
Killing Machine (1978)
Hell Bent For Leather (1979)
Unleashed In The East (Live - 1979)
British Steel (1980)
Point Of Entry (1981)
Screaming For Vengeance (1982)
Defenders Of The Faith (1984)
Turbo (1986)
Priest... Live! (Live - 1987)
Ram It Down (1988)
Painkiller (1990)
Jugulator (1997)
'98 Live Meltdown (Live - 1998)
Demolition (2001)
Live In London (Live - 2003)
Angel Of Retribution (2005)
Nostradamus (2008)
A Touch Of Evil: Live (Live - 2009)
Redeemer Of Souls (2014)
Battle Cry (Live - 2016)
Firepower (2018)

Un jour, Un Album

Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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