C’est à se demander quand Mike Hill trouve le temps pour dormir. En plus de ses activités musicales, il est le PDG d’une marque de café qu’il a fondé (eh oui, y a pas que BEHEMOTH qui en fait), il créé/produit/anime plusieurs podcasts ("Everything Went Black", des conversations avec des musiciens, des écrivains, des artistes martiaux et d’autres, "Metal Matters" et un troisième, "Necromaniacs" dédié à l’horreur) et il est journaliste sportif spécialisé dans le MMA. Et accessoirement, entre tout ça, il a un one-man band VASILEK, un projet musical sous le nom de SCORPION THRONE, et il est depuis treize ans le cœur du groupe TOMBS dont il est chanteur, guitariste et s’occupe de parties de clavier. Après l’EP « Monarchy Of Shadows » en février dernier et un live en avril, TOMBS sort « Under Sullen Skies ». Entre le précédent « The Grand Annihilation » et ce cinquième effort, le line-up a été totalement remanié et le groupe a accueilli le bassiste Drew Murphy, le guitariste lead Matt Medeiros et le cogneur Justin Spaeth, soit les trois quarts du groupe de death metal KALOPSIA. Pour « Under Sullen Skies », une palanquée d’invités participe dont Todd Stern (PSYCROPTIC), Ray Suhy (SIX FEET UNDER), et Andy Thomas (BLACK CROWN INITIATE), conviés à poser chacun un (sublime) petit solo des familles, respectivement sur les morceaux "Mordum", "Barren" et "Void Constellation". Les présentations de la photo de famille (enfin, d’une partie) étant faites, voyons voir ce que « Under Sullen Skies » a sous le capot.
Faisant partie des rares formations étatsuniennes de black metal ayant percé (aux côtés de quelques happy few comme WOLVES IN THE THRONE ROOM, ou DEAFHEAVEN), TOMBS oscille entre black metal classique et post-black aux influences variées. Dès le morceau introductif "Bone Funace", on est plongé dans une ambiance malsaine et lugubre, sans rien sacrifier à la mélodie, en attestent les superbes riffs entêtants. Sur "Barren", la voix de Mike Hill varie entre guttural menaçant et passage en chant clair finalement plus inquiétant encore. "The Hunger" sort des sentiers battus avec son intro au clavier limite synthpop et son penchant bien heavy limite stoner avec en plus l’apport de Dwid Hellion des coreux d’INTEGRITY dont le registre vocal évoquerait presque celui du Dieu Lemmy (ce qui finit d’accentuer le côté hyper rock'n'roll de l’entreprise). Sans transition, on passe au morceau fleuve "Secrets Of The Black Sun", un titre mêlant doom écrasant (un registre qu’on retrouve dans le tout aussi bon "Sombre Ruin"), black metal épique, imprécations vocales menaçante et chœurs féminin (de Sera Timms d’IDES OF GEMINI) lumineux. "Descensum" revient à un style plus classique et menaçant avec Mike Hill qui rappelle le style d’Attila Csihar. Le court interlude "We Move Like Phantoms" fait PRESQUE office de semblant de respiration avec son superbe riff de Matt Medeiros. Un titre qui s’articule à merveille (de manière générale, « Under Sullen Skies » bénéficie d’un mixage, signé Bobby Torres, d’une précision chirurgicale) avec l’effrayant "Mordum" avant que "Lex Talionis" envoie une énorme déflagration à coups de cordes torturées et d’un travail de sape de Justin Spaeth (qui offre un très bel abattage aux fûts tout au long de l’album).
On pourrait décortiquer ainsi tous les morceaux de l’album et à chaque fois ce serait un concert de louanges. « Under Sullen Skies » fait partie de ces albums où, arrivé même pas à la moitié, on a le sentiment d’avoir enchaîné des tueries sans aucun défaut et, au final, le constat s’impose de lui-même que les adjectifs pour qualifier un album tellement bon ne seraient que des superlatifs. Riche en influences et en variété de styles tout en conservant une identité black metal pur, « Under Sullen Skies » est un monstre sans pitié qui va tout déchiqueter sur son passage, un album qui, à chaque coup, donne l’impression d’embrasser un train. Personne n’est physiquement prêt à se prendre une telle branlée.
