15 février 2021, 19:30

LE JOUR OÙ…

• RUN-DMC a remis AEROSMITH en selle


AEROSMITH n'était plus que l'ombre de sa splendeur passée quand, un beau jour de 1986, le producteur Rick Rubin propose à la paire Tyler-Perry de faire une apparition sur leur “Walk This Way”, repris par les rappers de RUN-DMC... Et c'est la résurrection !
 

En 1986, AEROSMITH appartient au passé. Si les Bostoniens ont écrit un chapitre de l'histoire du hard rock 'n' roll électrique américain dans les années 70, ils traînent désormais une image de has-been, rongés qu'ils sont par les drogues et les excès en tout genre. Et, malgré le retour un an plus tôt de Joe Perry, moitié finalement indissociable de Steven Tyler, et du guitariste rythmique Brad Whitford, « Done With Mirrors » (1985) n'est pas parvenu à redorer leur blason terni. Arrive alors l'homme providentiel, Rick Rubin

Jeune producteur new-yorkais fondateur du label Def Jam, il n'a alors à son actif que des singles et albums de hip-hop, dont « Radio » de LL Cool J, ainsi que "Rock Hard", maxi-single des BEASTIE BOYS qui, pour l'anecdote, utilisait un sample de "Back In Black" d'AC/DC. Sans que les BB aient pris la peine de demander la permission aux Australiens, ce qui entraînera son retrait des bacs. En compagnie de Russell Simmons, Rubin travaille alors avec RUN-DMC sur « Raising Hell », leur troisième album. En entrant en studio un beau jour (ou peut-être une nuit), il entend un sample de "Walk This Way" d'AEROSMITH. « Vous savez de qui il s'agit ? » demande-t-il aussitôt au trio originaire du Queens. « Ouais, c'est TOYS IN THE ATTIC ! » répondent du tac-au-tac Joseph "Run" Simmons, Jason "Jam Master Jay" Mizell et Darryl "DMC" McDaniels.


Ces derniers ne sont jamais allés plus loin que la pochette du troisième album du groupe, sorti onze ans plus tôt, sur lequel figure la chanson mythique du groupe de Steven Tyler & Co., et ignorent totalement qu'il s'agit de l'un des plus grands groupes américains des années 70. Question de culture musicale. « Avant qu'il y ait des albums de rap, on était obligés de trouver des beats et "Walk This Way" était un de nos préférés, expliquera DMC. Le beat et la façon dont les guitares rentraient étaient super cool. Le DJ le coupait et la boucle repartait du début. »


Visionnaire, Rubin leur propose alors de reprendre la chanson à leur sauce. Silence. A l'époque, le hip-hop est un genre underground et les trois hommes refusent de se lancer dans cette fusion rap-rock, trop éloignée de leurs racines, qui, craignent-ils, risque de les décrédibiliser auprès de leurs fans. Car il n'existe alors absolument aucun crossover entre ces deux styles musicaux qui sont à des années-lumière. Mais le producteur sait se montrer persuasif, alors ils acceptent d'écouter la chanson en entier. Et, presque à contrecœur, d'en enregistrer une version sur laquelle apparaîtront Steven Tyler et Joe Perry, le chanteur et le soliste d'AEROSMITH. Car Rubin les a déjà contactés et s'est attaché leurs services, moyennant un billet de 8 000 dollars pour une journée de studio. Les deux rockers avoueront par la suite qu'ils n'avaient pas la moindre idée de ce qu'était le rap...

RUN-DMC s'exécute sans grande conviction avant de faire la connaissance des Toxic Twins aux Magic Venture Studios de New York. Comme c'est leur album, ils se permettent de donner leur vision des choses à Steven Tyler, une des plus grandes voix du rock et co-compositeur de la chanson. « Il faut que tu chantes le texte comme si c'était un morceaux de RUN-DMC » impose Jay. Il suffit de demander. Tyler est un chanteur hors pair qui n'avait pas attendu la naissance du rap pour poser le phrasé si particulier de "Walk This Way", et Perry, un rocker inspiré mais un taiseux de première. Le frontman, hyper enthousiaste, s'intéresse à tout et discute avec les rappers pendant que le guitariste, très “Let The Music Do The Talking”, ne desserre pas les dents et répond en hochant la tête. Dans Walk This Way - The Autobiography Of Aerosmith, sortie en 1997, Tyler se souvient : « A un moment, Run, DMC et Jay étaient dans un coin, très concentrés. J'ai demandé : "Joe, qu'est-ce qu'ils font ?". "Ils doivent fumer du crack" m'a-t-il répondu. Un peu plus tard, quand on s'est approchés, on a vu qu'ils mangeaient des MacDo. »

Si “Walk This Way”, second single extrait de « Raising Hell », déclenche aussitôt des réactions enthousiastes, c'est son clip, diffusé en heavy rotation sur MTV pendant tout l'été, qui va marquer durablement les esprits. Des années plus tard, la chaîne de télé américaine VH1 la classera d'ailleurs "meilleure vidéo de tous les temps" de son top 50. Car il est vrai que l'air de rien, cette rencontre à laquelle aucun des deux partis ne croyait a ni plus ni moins que changé la face de la musique du dernier quart du 20e siècle.


L'original, ou AEROSMITH dans ses œuvres à Houston, en 1977


La réaction du public dépassera toutes les espérances. Grâce à la vista de Rubin, RUN-DMC, propulsé par cette collaboration dont ils n'attendaient pas grand-chose, deviendra le premier groupe superstar du hip-hop et ouvrira la brèche à une déferlante qui, trente-cinq ans plus tard, a (malheureusement) tout balayé aux USA et un peu partout dans le monde. Quant à AEROSMITH, c'est la résurrection. Remis en selle ("Back in the saddle", comme le chantait Tyler en 1976 sur « Rocks »), les musiciens suivent une énième cure de désintoxication – la bonne semble-t-il, du moins pour un temps – et vont connaître une seconde jeunesse en même temps qu'un énorme succès commercial. Initié par « Permanent Vacation » (1987), il culminera avec le monument « Pump » (1989) et « Get A Grip » (1993), qui se vendront tous deux respectivement à 7 millions de copies aux USA. Pas tous les jours que l'on a droit à un deuxième tour de manège comme ça... Merci Mr. Rubin !

Toujours en 1986, c'est lui qui aura l'idée de faire jouer à Kerry King, guitariste de SLAYER dont il a produit « Reign In Blood », le riff et le solo de "No Sleep Till Brooklyn" des BEASTIE BOYS sur leur « Licence To Ill ». Le fait que le guitariste clouté n'aimait pas le rap et que les New Yorkais ne l'appréciaient pas particulièrement est une autre histoire...
 


AEROSMITH est même apparu dans un épisode des Simpson...

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Blogger : Laurence Faure
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Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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