3 septembre 2021, 19:46

THE BRONX

"Bronx VI"

Album : Bronx VI

Est-ce que leur singularité est aussi liée à une éventuelle haute estime de leur rang ? C’est la question que l’on pourrait se poser tant la discographie de THE BRONX se calque en apparence sur celle de LED ZEPPELIN, les Anglais ayant enfin su décliner leurs titres d’albums autrement que par leur numérotation chronologique à partir du cinquième album. A l’identique, les Californiens ont dès leur cinquième disque opté pour... un simple et laconique « V » !!! Parce que précédemment, les quatre premiers se dénommaient respectivement « The Bronx », « The Bronx », « The Bronx », et encore « The Bronx » !!! A nous donc, avec l’appui de leurs étranges pochettes arty (aussi), de les distinguer les uns des autres, sous les appellations « The Bronx I », « The Bronx II», « The Bronx III », etc... – notre préférence allant à l’extraordinaire « The Bronx » (!), soit le « IV », comme par hasard, paru en 2013, soit celui à la splendide pochette bosselée et asiatique, celle du tigre blanc sur fond rouge : un chef d’oeuvre tant graphique que musical, propulsé par des bombes telles que "Pilot Light" ou "Last Revelation". 

Apôtres d’un punk-hardcore typiquement californien, aussi mélodique que brutalement frondeur et énergique, dans une lignée old-school héritière du label Epitaph mais avec un verni sensiblement plus actuel, THE BRONX se démarque aussi, et ce n’est pas un détail anodin, par l’existence de son entité schizophrénique, le side-project latino MARIACHI EL BRONX, soit une exploitation aussi cool que festive du mode mariachi mexicain, revisité par des blancs becs de Los Angeles – dont on ne comprend toujours pas l’absence de featuring dans un film de Quentin Tarantino, tellement, yeeeah, c’est raaaaad.

THE BRONX, on avait découvert ça dès le premier album en 2003 : directement réceptionné pour une chronique aussi enflammée qu’enthousiaste une fois l’objet digéré, voire même littéralement avalé – à l’image de son affreuse pochette gourmande et dégoulinante. Alors quand on a vu que le groupe allait réaliser la première partie de DANKO JONES au Nouveau Casino l’année suivante en avril 2004, on ne pouvait décemment pas laisser passer l’opportunité d’assister à une soirée aussi rock'n'roll et prometteuse. C’est donc depuis une histoire d’amour inconditionnelle avec ce groupe dont la formule repose sur un subtil équilibre entre old et new-school, entre chansons mémorables et force de frappe terrassante, entre arrangements discrets et sensible saturation de l’ensemble, en particulier dans le traitement de la voix de Matt Caughthran, à la fois si prompte aux inflexions harmonieuses qu’aux hurlements granulés, virils et convaincants, à l’instar d’un Josh Todd très énervé en solo ou avec THE CONFLICT. 

En 2021 c’est donc « Bronx VI » qui prévaut : la première moitié de l’album, expédiée avec vélocité et fougue, ne voit pas nos sympathique punks changer grand chose à leur formule habituelle – et c’est tant mieux, leur douce violence apprivoisée étant rassurante quand on les aime et les attend tant : avec "White Shadow" en guise d’introduction la mousse vient perler au coin des lèvres tant le niveau est très, très, très, très bon. "Watering The Well" annonce cette petite couleur seventies que l’on retrouvera ailleurs, avec sa charge power hard-rock pop qui aurait pu être accouchée par des FOO FIGHTERS au meilleur de leur forme. Dès "Peace Pipe", l’heure est aux gros gros refrains et le morceau fait écho au meilleur du IVème album précité : je ne sais pas si THE BRONX aura un jour l’occasion d’avoir un stadium à ses pieds, mais le chorus s’y prêtera volontiers – ce qui n’empêchera jamais son chanteur de venir se frotter aux fans jusqu’au tout dernier rang dans le maxi-pit, comme à son habitude, l’art de mouiller sa chemise étant chez eux devenu une maxime. 

Et comme le « The Bronx » numéro 4, la production est ici particulièrement soignée, soulignant idéalement ce mariage entre intensité, robustesse et soin des compositions – signée Monsieur Joe Barresi, forcément bien connu des fans de TOOL, des MELVINS, de BAD RELIGION, de EVERY TIME I DIE, ou encore des QUEENS OF THE STONE AGE... A noter que c’est l’un des batteurs historiques de ces derniers qui tient désormais l’ensemble avec son kit et qui lui donne un sacré coup de kick : ladies & gentlemen, bienvenue au bûcheron Joey Castillo. 

On notera aussi le très speed et très rock'n'roll "New Lows", hérissé de soli à l’ancienne, ainsi que le fulgurant et plus vif encore "Breaking News", et surtout le final "Participation Trophy", plus chaloupé, voire funky, laid-back et donc à nouveau assez 70’s dans sa rythmique qui invite au basculement sexy de hanches – on est proche ici d’un truc suffisamment langoureux pour s’inviter sur le cat-walk d’un bar à strip-tease digne de ce nom. Attention hot !

Mais c’est en conservant cette inflexible verve que THE BRONX touche parfois au sublime en venant tutoyer des contours pop, en générant ainsi des tubes potentiels absolument énormes et séduisants, prompts à rameuter un public plus large que celui qui lui est habituellement destiné. Tel est l’objet de "Mexican Summer", dont certains airs rappelleront les amateurs encore plus confidentiels de MARIACHI EL BRONX, avec ces mélodies légèrement hispanisantes et ce doux parfum de chaudes soirées d’été prometteuses de danses et de joyeuses ivresses – « c’est la vie » comme le chante avec conviction Caughthran.

Blogger : Jean-Charles Desgroux
Au sujet de l'auteur
Jean-Charles Desgroux
Jean-Charles Desgroux est né en 1975 et a découvert le hard rock début 1989 : son destin a alors pris une tangente radicale. Méprisant le monde adulte depuis, il conserve précieusement son enthousiasme et sa passion en restant un fan, et surtout en en faisant son vrai métier : en 2002, il intègre la rédaction de Rock Sound, devient pigiste, et ne s’arrêtera plus jamais. X-Rock, Rock One, Crossroads, Plugged, Myrock, Rolling Stone ou encore Rock&Folk recueillent tous les mois ses chroniques, interviews ou reportages. Mais la presse ne suffit pas : il publie la seule biographie française consacrée à Ozzy Osbourne en 2007, enchaîne ensuite celles sur Alice Cooper, Iggy Pop, et dresse de copieuses anthologies sur le Hair Metal et le Stoner aux éditions Le Mot et le Reste. Depuis 2014, il est un collaborateur régulier à HARD FORCE, son journal d’enfance (!), et élargit sa collaboration à sa petite soeur radiophonique, HEAVY1, où il reste journaliste, animateur, et programmateur sous le nom de Jesse.
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