A peine remis de la dérouillée encaissée à l'écoute du deuxième méfait du trio madrilène, paru l’année dernière chez Debemur Morti, que me voilà à nouveau en présence d’une nouvelle livraison d’AVERSIO HUMANITATIS. Ce n’est pas pour me déplaire d’ailleurs puisque j’ai une affection particulière pour ce groupe qui officie dans un black metal dit "orthodoxe" depuis maintenant près d’une décennie. Et qui se fend ici de son premier live avec, au programme, cinquante-trois obscures minutes réparties en neuf morceaux qui retracent une grande partie de la discographie du groupe. Et par "live" il faut comprendre un enregistrement brut de pomme réalisé en fin d’année dernière, d’un trait et sans public (pandémie oblige), qui se plie à une discipline exigeante. De celles qui impose à la fois une rigueur sans faille dans son exécution et d’un soupçon d'audace pour redonner un second souffle à des morceaux déjà éprouvés. Et pour certains, enregistrés il y a plus de sept ans ("Spears Of Unlight").
Nous y voilà donc : méthode, rigueur et structure. Il ne faut d'ailleurs pas moins d’une poignée de secondes avant que les choses ne se mettent en place sur "Longing For The Untold" et qu’AVERSIO HUMANITATIS ne distille riffs dissonants et autres ambiances hostiles avec doigté. Avant de laisser place à un maelström de trémolos du meilleur effet soutenu par des parties de batteries toutes en nuances qui appuient de nombreux breaks ne relâchant jamais vraiment la pression sur l'auditeur. Intenses et sauvages, les guitares tournoient et la basse montre les crocs, accompagnant sans jamais baisser la garde ce magma compact qui annihile toute forme de résistance. A quoi bon d'ailleurs ? Il suffit de tendre l'oreille pour guetter ces changements de rythmes incessants, déroulant des tempos plus massifs sur les morceaux les plus récents tirés du dernier album, « Behold The SIlent Dweller ». Au fil des écoutes, cette relecture a quelque chose de passionnant et de passionnée, chaque membre du groupe déployant ici une énergie, une urgence dans l’exécution comme si sa vie en dépendait. Une énergie et une urgence qui rappellent le contexte troublé par la COVID qui a engendré tant de frustration pour nombre de musiciens privés de concert pendant trop longtemps.
L’exercice de la retranscription "live" est ici réussie haut la main. Doté d'une production limpide, peaufinée dans la moindre de ses tournures, ainsi que d'un artwork énigmatique, ce « Silent Dwellers - Live MMXX « est une petite merveille. De celles qui réclament de nombreuses écoutes attentives, prolongées pour en saisir toute la noire quintessence. Vivement recommandé, l’acquisition de cet album est possible pour une poignée d’euros sur le bandcamp du groupe et une version digipak limitée à 100 exemplaires devrait, elle, pointer le bout du nez courant octobre chez Nebular Carcoma. Vous savez ce qu’il vous reste à faire...