23 décembre 2021, 19:36

THE TEA PARTY

Interview Stuart Chatwood

THE TEA PARTY est un groupe de rock/blues/progressif dont la carrière a explosé en Amérique du Nord et ses 30 ans passés, malgré un break de 6 ans, prouvent que le succès fut au rendez-vous. Mais il reste confidentiel en Europe, et particulièrement en France. Heureusement, grâce au dernier album sorti le 26 novembre « Blood Moon Rising », qui regroupe les EP « Black River » (2019) et « Sunshower » (2021), il semble que le vent tourne et qu’il lui soit favorable. Avant de venir en tournée, ce qui marquerait un réel accomplissement depuis 2001, Stuart Chatwood, le bassiste de la formation revient avec nous sur ce qui fonde THE TEA PARTY et la création de ce 9e album spécialement conçu pour le public européen.
 

Vous avez un nouvel album « Blood Moon Rising » qui est sorti depuis quelques semaines maintenant. C’est le premier depuis 2014 et « The Ocean At The End », et il semble qu’il soit spécialement conçu pour l’Europe et la Russie.  C’est bien cela ?
Eh bien pour commencer, cet album était prévu pour en fait paraître sous le format de deux EP au Canada, notamment. Mais notre maison de disques, InsideOut Music, voulait en faire un seul album. On est très contents du résultat car on adore les albums mais à chaque fois dans notre carrière on a eu des soucis : on passait deux ou trois ans à enregistrer un album puis quelque chose n’allait pas avec le management ou la maison de disques ou les stations de radio. Et l’album était ignoré du grand public. On a pensé qu’il serait bon de séparer nos enregistrements en deux parties. On a donc sorti l'EP « Black River » en 2019 et au Canada tu as l'EP « Sunshower ». Pour l’Europe, les deux EP ont été réunis en un seul disque : « Blood Moon Rising ». En plus, on a ajouté quelques reprises pour en faire quelque chose de différent. Pour le moment, l’accueil est plutôt bon. Les gens n’ont plus accès aux concerts donc ils se rabattent sur les albums. Les livestreams ont bien commencé au Canada mais les fans se rendent compte qu’il ne s’agit pas de la même expérience qu’un concert. Donc plus que jamais, la musique enregistrée bat son plein et égaye la vie des gens. On pensait que les CD étaient devenus obsolètes mais ils reprennent doucement du grade. Il est bon de voir que les gens ont toujours cette adoration pour la musique.
 

  


C’est un album très rock et en même temps très blues. Il est plein d’énergie et de punch. C’est vraiment un album qui redonne le sourire, spécialement en cette période un peu triste...
Oui, ça aurait été facile de faire un album avec 12 chansons hyper dépressives ! Mais on a préféré un côté plus vivifiant et certaines de nos chansons reflètent l’esprit du groupe lorsque nous avons commencé, donc lorsqu’on était encore plein de hargne. Des chansons pour l’été en fait ! On a bien sûr des chansons plus sérieuses et plus sombres mais on avait vraiment envie pour cet album de revenir à des morceaux plus légers, avec des paroles optimistes. Quand nous étions ados, nous vivions dans la région de Detroit donc notre influence hard rock était très présente dans le groupe. Au lycée, on était plus dans le punk mais quand on a commencé à mieux savoir jouer de nos instruments, on a commencé à nous intéresser au rock des années 60-70.

Vous avez une carrière très intéressante ! Cela fait maintenant 30 ans que THE TEA PARTY existe. Comment expliques-tu que vous n’êtes pas très connus en Europe par exemple, en France particulièrement ? Alors que votre musique fédère les foules ailleurs et surtout en Amérique du Nord ?
Je ne sais pas. Pour la France, c’est une combinaison de malchance je pense. En plus, notre chanteur et notre batteur parlent tous les deux français couramment. Notre batteur a étudié le français à l’université et voulait devenir professeur de français au Canada ! Notre chanteur a une de ses grands-mères qui est française donc il lui parlait en français. D'ailleurs, quand on joue au Québec, on parle en français à nos fans. Mais malheureusement, nous n’avons pas joué suffisamment de concerts en France pour marquer les esprits dans votre pays. Peut-être que si nous avions enregistré nos titres en français pour la France, on aurait eu plus de succès. Au Pays-Bas, par contre, on a beaucoup de fans. On est passé de salles de 600 personnes à des lieux de 1500-2000 personnes, ce qui devient ma zone de confort. On a ouvert pour pas mal de groupes là-bas, on a fait des festivals dans les autres pays d’Europe. C’est vraiment dommage car j’adorerais venir jouer en France, à la Cigale à Paris ou dans le Sud de la France, que j’adore. J’aime le vin français, le parfum, la nourriture. Notre batteur a passé du temps à Montpellier où il a mangé dans un restaurant primé dans le guide Michelin : il y a mangé le meilleur repas de sa vie et je voudrais vivre la même expérience !

Je comprends, tu es un épicurien ! Revenons à la musique. Comment s’est passé l’enregistrement de « Blood Moon Rising » ?
On a dû jongler avec la COVID et on a donc enregistré à Vancouver. Les parties de batterie ont été enregistrées fin 2019 et Jeff Martin, le chanteur, a assuré la production depuis son domicile. Il a terminé quelques lignes de chant et de guitares en Australie. L’album a ensuite été mixé par un ami, ici au Canada, un jeune gars. Mais on a toujours été un groupe de rock très distant socialement car je vis à Vancouver, notre batteur Jeff Burrows vit à Detroit et Jeff Martin en Australie donc on a du mal à se voir, même en temps normal. On est de ce fait habitués à être séparés. Par contre, on a encore du mal à passer par internet quand nous enregistrons donc on compte sur notre temps-libre avant et après les tournées pour écrire les albums. Il faut donc que l’on progresse sur ce point si la situation n’évolue pas favorablement. Au début, l’album devait sortir en 2020 mais tout a été retardé.

Tu aurais voulu faire autrement ?
Non pas forcément mais j’aimerais ajouter à notre musique plein d’instruments du monde entier et surtout une part plus grande d’electro. Sur cet album, une grande place est donnée à la basse et je voudrais continuer en ce sens. Nous avons notre propre identité et j’en suis fier, mais je voudrais faire aussi évoluer notre musique, nous ouvrir au monde.

D’ailleurs, quelques-unes de vos chansons sont très heavy, très rock, peut-être à cause de la basse justement. D’autres sont plus groovy et bluesy comme "Sunshower" ou "Way Way Down". Comment se passe la composition des chansons ? Est-ce que votre humeur du moment a une influence sur la musique ?
Les chansons les plus psychédéliques commencent par des effets à la guitare qui parlent vraiment aux gens. C’est la même chose avec les morceaux folk qui sont plus introspectifs, qui transmettent des émotions. Mais toutes ces chansons ont été écrites au même moment. Quand nous sommes ensemble, on a vraiment cette énergie et cette puissance qui nous permettent de travailler toutes nos émotions en même temps. Cet album est plutôt rock car c’est ce qui fonctionne le mieux à présent pour nous.


​La chanson-titre "Blood Moon Rising" est un titre hommage à votre producteur de longue date, John Watt, qui est tristement décédé pendant l’enregistrement de l’album. De quoi parle-t-elle ?
John était un fan de heavy metal des années 80 et on était une jeune génération qui jouait du Jimi Hendrix, du LED ZEPPELIN. On a beaucoup parlementé avec lui car on voulait sonner comme du LED ZEP mais lui voulait qu’on sonne comme du METALLICA. Après quelques disputes, il finissait toujours par trouver la meilleure production pour notre musique. On travaillait bien ensemble, il travaillait aussi pour d’autres groupes au Canada. Il était aussi un ami fidèle et quelqu’un sur qui on pouvait compter en tournée. Il a eu de gros soucis au cœur et en allant en Australie, il a dû faire une halte à Hong Kong pour aller à l’hôpital, ce qui nous a fait très peur. Il a tout de même pu rentrer au Canada mais il est décédé 6 mois après cet épisode. Donc on voulait vraiment lui rendre hommage et garder sa mémoire vivante. Ce fut une période très triste et la chanson reflète ça.

Est-ce que ce genre d’expérience vous inspire ou au contraire, avez-vous envie de ne plus rien composer pendant ces périodes de tristesse ?
Il est difficile de communiquer pendant ces périodes mais la musique est un bon moyen de faire passer des émotions. Cela nous aide à sortir de notre léthargie. C’est un bon exutoire.

Il y a également trois reprises sur l’album : une de LED ZEPPELIN, une de JOY DIVISION et une de MORRISSEY. Comment avez-vous choisi les titres de ces groupes, surtout celui de LED ZEPPELIN car il semble que vous jouiez leurs chansons depuis toujours ?
Oui, LED ZEPPELIN est le groupe que nous préférons avec les BEATLES mais on voulait cette fois une chanson peu connue, que les gens n’avaient peut-être jamais entendue. On avait l’habitude de jouer cette chanson, "Out On The Tiles", depuis 30 ans mais on voulait la faire proprement en studio. Les deux autres titres ont été enregistrés après coup pendant la période de confinement. Je me suis réveillé un jour et je me suis senti isolé des autres membres du groupe et j’écoutais JOY DIVISION, donc j’ai appelé Jeff Martin pour que nous jouions une chanson car c’est un de nos groupes préférés. Le titre "Isolation" m’est tout de suite venu à l’esprit, vu le contexte. Et je savais en plus que le titre avait été enregistré à la va-vite par JOY DIVISION donc je pensais qu’on pouvait en faire quelque chose de bien. Je n’aurais jamais pu enregistrer un monument du rock pour en faire quelque chose de moins bien. Pas que je pense qu’on ait fait mieux que JOY DIVISION mais on a réussi à l’interpréter de manière différente. Pour la chanson de MORRISSEY, on la jouait au lycée mais pareil, pendant la COVID, il me semblait que tous les jours c’était dimanche, d’où mon idée de reprendre "Everyday Is Like Sunday".

Cela a beaucoup de sens en effet ! Quelles sont les groupes qui vous influencent d’ailleurs ? Est-ce que de nouveaux groupes vous donnent de l’inspiration ou restez-vous fidèles aux années 70 ?
Pour être honnête, je passe la plupart de mes journées à composer de la musique pour des jeux vidéo comme Darkest Dungeon II. J’avais déjà fait le 1 en 2016. Je travaille beaucoup pour Epic Games et cela me prend énormément de temps car parfois il faut composer 150 chansons ! J’écris, j’enregistre, je mixe donc c’est long. J’essaye de ne pas écouter d’autres bandes sons pour rester original dans ma création. Donc en fait, je n’écoute que de la musique classique pour les harmonies qu’elle comporte. J’ai fait la bande son de Prince Of Persia et à l’époque j’écoutais beaucoup de musique du monde ou du folk. Ah j’écoute aussi de la musique africaine.

Pour terminer, que peut-on te souhaiter pour 2022 ?
Eh bien, InsideOut Music fait un excellent boulot donc on peut espérer venir jouer en Europe bientôt mais cela va prendre un peu de temps, et quelques festivals avant de vraiment fédérer les foules je pense. J’ai hâte en tous cas de venir vous voir. Espérons que la situation redevienne favorable surtout. On va continuer quoi qu'il arrive à rester créatifs et passionnés en attendant.
 

Blogger : Aude Paquot
Au sujet de l'auteur
Aude Paquot
Aude Paquot est une fervente adepte du metal depuis le début des années 90, lorsqu'elle était encore... très jeune. Tout a commencé avec BON JOVI, SKID ROW, PEARL JAM ou encore DEF LEPPARD, groupes largement plébiscités par ses amis de l'époque. La découverte s'est rapidement faite passion et ses goûts se sont diversifiés grâce à la presse écrite et déjà HARD FORCE, magazine auquel elle s'abonne afin de ne manquer aucune nouvelle fraîche. SLAYER, METALLICA, GUNS 'N' ROSES, SEPULTURA deviendront alors sa bande son quotidienne, à demeure dans le walkman et imprimés sur le sac d'école. Les concerts s'enchaînent puis les festivals, ses goûts évoluent et c'est sur le metal plus extrême, que se porte son dévolu vers les années 2000 pendant lesquelles elle décide de publier son propre fanzine devenu ensuite The Summoning Webzine. Intégrée à l'équipe d'HARD FORCE en 2017, elle continue donc de soutenir avec plaisir, force et fierté la scène metal en tout genre.
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