19 mai 2022, 21:15

SEPTICFLESH

Interview Sotiris Vayenas


Pour le onzième album de SEPTICFLESH, les grecs n’ont pas fait dans la mesure : orchestre symphonique, instruments traditionnels, chœurs d’adultes et d’enfants et bien sûr gros riffs de guitares et rythmes bien lourds sont les éléments clés de ce nouveau disque « Modern Primitive ». Les neuf chansons sont à la fois théâtrales, intenses et bourrées d’émotions. C’est le guitariste et chanteur Sotiris Vayenas qui nous en dit un peu plus sur la conception de ce qui est déjà en passe de devenir un monument de la scène death metal.
 

Depuis le premier EP de SEPTICFLESH « Temple Of The Lost Race » sorti en 1991, il s’est écoulé trente ans. Est-ce que tu es fier de ce que vous avez réalisé pendant ces belles années ?
En effet beaucoup de temps s'est écoulé depuis notre première sortie vinyle. Les choses à l'époque étaient vraiment dures pour un groupe de metal grec. Il n'y avait pas d'infrastructure locale capable de répondre à nos besoins et nous avons dû surmonter de nombreux obstacles. Mais comme on dit, plus les circonstances sont difficiles, plus on devient puissant si toutefois on parvient à passer outre les difficultés. Alors oui, nous sommes fiers, non seulement que nous soyons toujours actifs, mais que notre carrière ait le vent en poupe.

SEPTICFLESH continue d'évoluer et de devenir de plus en plus célèbre dans le monde entier. Vous êtes maintenant universellement reconnu et acclamé. Saurais-tu pourquoi vous parvenez à fédérer de plus en plus de fans ? Quelle est votre recette ?
Eh bien, beaucoup de travail acharné et de dévouement à ce que nous faisons. SEPTICFLESH est pour nous comme un gigantesque atelier artistique au sens large, où nos rêves musicaux, visuels, conceptuels sont présentés au public. Nous continuons donc à nous donner le mal nécessaire afin de les présenter de la meilleure façon possible.

Si tu pouvais t’adresser au jeune Sotiris du début des années 90, que lui dirais-tu ? Changerais-tu quelque chose ? Y aurait-il des choses à craindre ou au contraire est-ce que tu lui dirais d’avoir confiance en lui, en l’avenir ?
Il n'y a pas de plaisir quand on connaît la fin de l'histoire. Essayer également de vaincre tes peurs et ton insécurité est essentiel, afin de développer tes capacités à réussir. Si je pouvais voyager dans le temps, j'en profiterais plutôt pour observer ce qui s'est passé, mais d'un point de vue extérieur, "à la 3e personne" cette fois. Quand tu arrives à prendre du recul par rapport au rush du moment, tu peux voir les choses plus clairement et objectivement.

Parlons maintenant de votre nouvel et onzième album « Modern Primitive ». Ce titre marque-t-il une forme de dualité, omniprésente dans la musique de SEPTICFLESH ?
La dualité et le contraste en général font effectivement partie intégrante de notre identité en tant que groupe. Donc, le titre est quelque chose de vraiment représentatif non seulement de toute la situation actuelle sur les affaires humaines, mais aussi de notre style.

Qu'est-ce qui est moderne dans la primitivité et qu'est-ce qui est primitif dans la modernité ?
La couverture du livre est moderne, tandis que l'histoire racontée à l’intérieur est plutôt ancienne et basée sur des éléments primitifs. Nous inventons et utilisons simplement des moyens modernes pour raconter l'histoire, mais la fin est étrangement familière. Et ce n'est pas une bonne fin. C'est un cercle de création/destruction, paradis/enfer.

La musique de SEPTICFLESH ne peut pas être décrite comme primitive car elle mélange beaucoup d'éléments symphoniques et mélodiques à un death metal agressif. Mais as-tu l'impression de revenir à tes fondamentaux, de revenir à tes racines en quelque sorte, à quelque chose d'essentiel peut-être ?
Nos racines sont importantes et toujours présentes car elles ont défini notre personnalité musicale. Il y a toujours des riffs et des mélodies caractéristiques qui sont au cœur de notre identité. Et pour une raison qui nous est propre, nous avons tendance à nous tourner naturellement vers des humeurs et des atmosphères spécifiques. Mais bien sûr, nous ne cessons de développer notre style, d'implémenter de nouveaux éléments qui pimentent notre musique. Après toutes ces années, nous avons acquis beaucoup d'expérience et nous pouvons nous attarder sur des trucs vraiment avancés et exigeants comme dans "Coming Storm". C'est un bon exemple de notre attitude musicale, car il combine du metal agressif, des parties symphoniques déchaînées mais aussi des éléments mélodiques remplis d’émotions.

« Moderne Primitive » poursuit en quelque sorte l'évolution de SEPTICFLESH, avec une musique très épique donc émotionnelle et lourde comme tu le dis. Penses-tu que vous gagnez en maturité ?
En effet. La maturité est quelque chose qui vient avec l’expérience des années. Nous avons tellement d'éléments dans notre musique qu'il est essentiel de garder un équilibre entre eux afin d'avoir le meilleur impact possible. On met un point d’honneur à toujours garder une vue d'ensemble lorsque nous créons un album et de ne pas nous perdre dans les détails. Bien sûr, cela signifie que parfois, il est préférable de laisser quelque chose de côté, plutôt que de continuer à insérer des parties qui finissent par bouffer les autres.

"Notre objectif est de donner à notre public une expérience très intense."

 


Vous avez collaboré avec l'orchestre philharmonique de Prague. Pourquoi ce besoin d'utiliser des instruments d'orchestre ? Confèrent-ils un son plus chaud et plus lourd à vos chansons ?
Notre musique est vraiment constituée de plusieurs couches. Nous les avons toujours eues. Au début, nous utilisions plusieurs sections de guitare et des samples. Puis petit à petit nous avons ajouté des voix féminines et un chœur. Maintenant, nous sommes en mesure de faire ce que nous voulons, en choisissant parmi une très large gamme d'instruments. Pour présenter des idées, en fin de compte, tout est question de musique et des émotions que tu parviens à susciter chez le public. Bien sûr, c'est aussi une question de goût et d'instinct. Nous avons une relation longue et fructueuse avec l'orchestre en question, car ils parviennent à obtenir la qualité que nous exigeons.

Est-ce Christos qui s'occupe de toute cette partie orchestrale ?
Christos est titulaire d'une maîtrise en musique de concert. En fait, le Berklee College Of Music a quatre de ses partitions pour SEPTICFLESH dans sa bibliothèque musicale, que ses élèves peuvent étudier. C'est donc notre choix d'être à la tête de l'élément symphonique du groupe. Ce que vous écoutez est créé à 100% par SEPTICFLESH. Les autres musiciens impliqués sont des interprètes qui lisent des partitions fournies par Christos.

Avez-vous déjà prévu de jouer avec l'orchestre sur scène, comme vous l'avez fait pour « Infernus Sinfonica » ?
Nous voulons continuer dans cette voie et apporter ce spectacle en Europe aussi. Mais pour le moment, les choses ne sont pas assez stables pour tenter de le faire. Nous attendrons le bon moment et l'opportunité.

Et peux-tu nous en dire plus sur les chœurs ? Comment avez-vous choisi toutes ces personnes qui travaillent avec vous ?
Christos, en plus d'être en charge de la partie symphonique de SEPTICFLESH, a beaucoup de relations dans ce domaine musical, donc c'est lui qui fait les choix.

La chorale d'enfants sur "Self Eater" par exemple donne encore plus une dimension théâtrale ainsi qu’une ambiance inquiétante à l'ensemble du morceau. Avez-vous cherché à créer un sentiment immersif pour vos auditeurs ?
Oui. C'est exactement ce que nous visons. Le chœur d'enfants est un élément assez différent du chœur d'adultes. Les enfants ne sont pas parfaits et pas trop confiants. Ils ont aussi cette innocence dans leur voix. Tous ces éléments, ce pouvoir émotionnel indompté, s'ils sont combinés avec des mélodies appropriées, peuvent créer des résultats captivants.

En fait la musique de SEPTICFLESH permet une réelle immersion dans votre monde...
Notre objectif est de donner à notre public une expérience très intense. Une sombre porte artistique vers notre royaume. Tout ce que nous créons, musique, paroles, visuels fait partie de l'expérience. Je pense que « Moderne Primitive » en particulier, est un album dans lequel quelqu'un peut s'enfoncer profondément, comme avoir une rêverie intense.

Un autre aspect de « Modern Primitive » est bien sûr l'utilisation de sonorités exotiques avec des instruments traditionnels. Peux-tu nous en dire plus à leur sujet et sur l'impact que tu voulais qu'ils aient sur tes chansons?
Un certain nombre de chansons que Seth (Spiros Antoniou, chant/basse) a apportées ont été construites sur une guitare électro-acoustique à 12 cordes. Donc non seulement il y a beaucoup de parties jouées avec des instruments spécifiques mais aussi des parties qui ont été retranscrites pour des instruments ethniques comme le bouzouki, la mandoline, le luth, le oud, le santour. Cela a donné un côté plus naturel au son de l'album. On peut dire que le but était de mettre en avant le côté primitif.


Que peux-tu nous dire à propos de votre collaboration avec Jens Bogren ? Est-ce la personne la plus fiable avec laquelle travailler et celle qui sait le mieux gérer votre musique ?
C'est un génie. Notre production musicale est très exigeante car il y a tellement de fréquences différentes à traiter. Sans un producteur vraiment compétent, le son global pourrait facilement se transformer en catastrophe. Et bien sûr, nous voulons toujours avoir un son lourd, ce n’est pas négociable. Nous avons été impressionnés par notre première collaboration sur « Codex Omega ». Nous avons donc décidé de collaborer à nouveau pour celui-ci.

Une dernière question concernerait votre signature avec Nuclear Blast Records : le label a-t-il encore plus de pouvoir pour vous que Season Of Mist ?
Season Of Mist est un bon label fiable et nous sommes reconnaissants pour son soutien pendant toutes ces années. C'était et c'est toujours une relation mutuellement bénéfique, car Season Of Mist a tout notre catalogue. À ce stade, nous avons simplement senti que nous avions atteint les limites de son potentiel compte tenu de notre expansion vers le public metal. Nuclear Blast est un géant de la musique heavy metal et metal extrême, et maintenant c'est notre maison en tant qu'artistes. Dès le premier jour, nous avons été traités de manière très professionnelle et amicale. De plus, nous avons déjà fait un grand bond en avant car il est évident que nous avons atteint un public plus large rien qu'avec la sortie de nos singles jusqu'à présent. Nous nous sentons vraiment excités et optimistes pour l'avenir.

On espère vous voir bientôt car SEPTIC FLESH manque aux fans français !
La France nous tient toujours à cœur. Nous vous devons tant, tellement vous nous soutenez depuis nos tous premiers jours. Rendez-vous en juin au Hellfest ! •
 

Blogger : Aude Paquot
Au sujet de l'auteur
Aude Paquot
Aude Paquot est une fervente adepte du metal depuis le début des années 90, lorsqu'elle était encore... très jeune. Tout a commencé avec BON JOVI, SKID ROW, PEARL JAM ou encore DEF LEPPARD, groupes largement plébiscités par ses amis de l'époque. La découverte s'est rapidement faite passion et ses goûts se sont diversifiés grâce à la presse écrite et déjà HARD FORCE, magazine auquel elle s'abonne afin de ne manquer aucune nouvelle fraîche. SLAYER, METALLICA, GUNS 'N' ROSES, SEPULTURA deviendront alors sa bande son quotidienne, à demeure dans le walkman et imprimés sur le sac d'école. Les concerts s'enchaînent puis les festivals, ses goûts évoluent et c'est sur le metal plus extrême, que se porte son dévolu vers les années 2000 pendant lesquelles elle décide de publier son propre fanzine devenu ensuite The Summoning Webzine. Intégrée à l'équipe d'HARD FORCE en 2017, elle continue donc de soutenir avec plaisir, force et fierté la scène metal en tout genre.
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