17 août 2022, 19:23

SOILWORK

Interview Björn "Speed" Strid

Avec aujourd'hui 26 ans de carrière et douze albums au compteur, SOILWORK fait partie du paysage mélodique et mélancolique du metal. Avec les 14 nouvelles chansons de « Övergivenheten », le sextet plonge encore plus profond dans l'introspection et délivre autant de puissance que d'émotions. Björn "Speed" Strid, chanteur et compositeur du groupe, revient avec nous sur tout ce qui fait l'essence de cet album et sur l'état d'esprit des membres au moment de son écriture...
 

Merci Björn de prendre le temps de répondre à nos questions à propos du douzième album de SOILWORK. Il semble très influencé par la pandémie qui a frappé le monde. Est-ce le cas ? Est-ce que cette période particulière a été inspirante ?
Oui, c'était vraiment un moment très créatif. Je ne sais pas si c'est la pandémie en elle-même qui a été inspirante ou si elle nous a permis de mieux nous concentrer sur notre musique. Nous avions déjà des idées auparavant et on a sorti l'EP « A Whisp Of The Atlantic » en 2020 qui a été une belle expérience. Personnellement, j'avais besoin d'un break. Le moment de la pandémie a été opportun pour moi même si bien sûr je ne souhaitais pas cette situation ! David (Andersson, le guitariste) a été super créatif pendant le confinement, il n'arrivait pas à s'arrêter et d'ailleurs l'EP est en fait en partie sa création. Pour ma part, je me suis reposé, tout en continuant à chanter, mais en terme de composition de chansons, je me suis presque forcé à écrire, pour redémarrer la machine. J'avais besoin de me créer des objectifs et cet album est un défi. Il est en ce sens très varié et c'est un bon résumé de toute notre carrière. Grâce à ce break, je peux encore plus apprécier notre travail et j'ai finalement été fier de ce que j'ai pu écrire. Des fois, une pause est salvatrice et te permet de reprendre ce que tu faisais plus naturellement alors que sinon, tu entres dans un cercle vicieux qui te fera tout abandonner. Mais je n'ai pas envie d'abandonner du tout ! Je me sens totalement prêt pour de nouveaux défis.

Ce doit être gratifiant de retrouver un nouveau souffle après cette pause ?
Oui, je crois que c'est vraiment une bonne chose. Cela ne m'était jamais arrivé auparavant, j'enchaînais les albums et les tournées. Cette distanciation temporaire a très bien fonctionné pour moi.

Et est-ce que tu as remarqué une différence dans ta façon de composer ? Entre 2019 et 2022 par exemple, vois-tu une évolution ?
Peut-être oui. J'ai mis du temps à prendre confiance en moi, aussi bien en tant que compositeur qu'en tant que chanteur et je pense que cette situation m'a permis de me focaliser plus sur ce que je voulais écrire moi-même plutôt que sur ce que les autres voulaient que j'écrive. Je me soucie bien sûr des fans et je ferais n'importe quoi pour qu'ils se sentent galvanisés par mes compositions mais je crois qu'en faisant ce que j'aime, cela fonctionne très bien. Et je crois qu'une bonne partie de notre public aime qu'on leur apporte des surprises, qu'on ne se contentent pas du minimum. Si certains d'entre eux sont là depuis le début, c'est qu'on arrive finalement à composer ce qui leur plaît. Ce qui est bien, c'est qu'on arrive à garder notre audience tout en nous réinventant à chaque album.

Cet album apporte son lot de surprises : il est plus sombre, peut-être plus personnel mais aussi envoûtant. L'atmosphère y est différente de celle de « Verkligheten » par exemple. As-tu cette impression aussi ? Etait-ce votre intention d'être plus introspectif peut-être ?
Oui et cela vient du fait qu'on a pris de la distance, qu'on s'est plus projeté. Cela a rendu l'écriture plus personnelle car on s'est impliqué de manière différente, on s'est adapté à la situation aussi. David a écrit presque tous les morceaux de l'album à part un et il est dans un monde complètement différent du mien. On est très différents et on est à des stades différents de nos vies personnelles. Il est dans une passe plutôt sombre alors que je suis en train d'en remonter. Je suis dans une phase plus stable et plus optimiste de ma vie. Cela crée vraiment un contraste et on peut le sentir sur l'album et la musique. On a trouvé le bon équilibre pour nous exprimer ensemble, même si on est sur des plans différents. Ce qu'il a écrit est plutôt sombre, j'apporte pour ma part plus de puissance et d'optimisme. Tous les deux, on crée un cocktail intéressant de ce qu'est l'humanité.

Est-ce que le titre de l'album « Övergivenheten », qui signifie "l'abandon", reflète cette envie de lâcher prise et cette prise de distance par rapport à la vie ?
Oui, c'est un mot très puissant que l'on peut interpréter de différentes façons. Tout le monde, au moins une fois dans sa vie, a peur d'être abandonné. Mais il y a aussi la peur d'abandonner quelque chose ou quelqu'un. Ce qui est tout aussi effrayant. J'ai ressenti ce besoin de tout abandonner mais c'est aussi quelque chose qui m'a poussé à aller de l'avant. Ecrire des mélodies m'a permis de me sentir à nouveau vivant. Ecrire des paroles aussi mais c'est plus la musique qui m'a motivé.

Il semble que vous ayez beaucoup de choses à dire car l'album est assez long, avec 14 titres. Comment vous êtes-vous organisés pour la composition, le choix et l'enregistrement des chansons ?
En fait, on n'a vraiment pas écrit grand chose tous ensemble. On a tout fait séparément, on s'envoyait les parties écrites les uns aux autres. David a été très productif, il a écrit peut-être 30 ou 40 chansons ! Je suis arrivé bien plus tard dans le processus d'écriture mais avec des chansons que j'aimais beaucoup et le reste du groupe aussi. C'était un processus d'écriture assez chaotique en fait et il y a des chansons que j'ai écrites la nuit avant d'entrer en studio ! Mais en fin de compte, ça donne quelque chose de très épique dont je suis fier. Mais le fait d'avoir des chansons qui étaient prêtes depuis longtemps nous a permis aussi de les laisser mariner. Etre en studio pendant 6 semaines, tous les jours, te fait perdre un peu de ta motivation. Alors qu'y aller de temps en temps et être concentré sur ton travail pendant un long week-end, ou une semaine, te donner à fond, permet d'être plus productif.

Ce n'est pas trop difficile de ne choisir que 14 chansons parmi les 30 ou 40 écrites ?
Eh bien comme on a réussi à étaler l'enregistrement sur une longue période, cela nous a permis d'écouter et réécouter les démos afin de choisir les plus appropriées. On a donné à chaque morceau l'attention qu'il méritait et nos choix ont été très objectifs, donc faciles à réaliser dans un sens. Mais bon, certaines sont évidentes, d'autres sont plus difficiles à choisir car même si on ne les sent pas au début, le fait de les jouer différemment en studio les fait parfois briller. On ne sait jamais et c'est vraiment une expérience intéressante.

Il y a une chanson en particulier dont j'aimerais parler, c'est bien sûr celle dont le titres est en français : "Nous Sommes La Guerre". Peux-tu nous en dire plus sur le choix de la langue ?
Alors pour avoir une idée plus précise, il faudrait que tu t'adresses à David qui a écrit cette chanson et qui a aussi écrit des paroles en français. Il est bon en français et adore la langue, surtout pour retranscrire un état d'esprit plutôt sombre. Pour être honnête, je ne sais pas trop quelle était son idée derrière tout cela. Par contre, j'adore cette chanson, j'adore son atmosphère et ce qu'elle crée comme sentiment.

Oui, elle est très mélodique, très différente d'autres chansons beaucoup plus brutales...
Absolument, et c'est très cool d'avoir un tel morceau. Nous avons un guitariste français comme tu le sais et je pense que c'est bien qu'on ait des chansons en français pour représenter justement ce côté français du groupe.
 

"Il y a ce sentiment de mélancolie chez vous, les Français, que l'on retrouve sur nos albums et qui nous lie"


Est-ce que tu peux nous en dire plus sur les instrumentales "Morgongåva / Stormfågel" et "The Everlasting Flame​", qui apportent elles aussi une atmosphère différente ?
Oui, elles apportent quelque chose de spécial. Elles ont été composées très tard dans la nuit, ou très tôt le matin, selon comment on considère la journée où on a enregistré l'album. Je me suis réveillé et j'ai vu des bouteilles partout dans le studio, c'était le chaos complet. Je me suis dit : « Mais qu'est-ce qui s'est passé ici ! ». Et les gars ont simplement répondu qu'ils avaient passé la nuit à composer ! Je me suis dit : « ok, je vais écouter ça. » Et j'ai trouvé ça très cool ! Toutes les instrumentales de nos albums ont été composées tard le soir ou tôt le matin, elles sont très spontanées. Toutes n'ont pas le même impact mais je trouve que ces interludes vont très bien avec le reste de l'album.

Rasmus Ehrnborn est maintenant votre bassiste à plein temps. A-t-il eu son rôle à jouer dans la composition ou l'arrangement des nouveaux morceaux ?
Pas directement car David a écrit la plupart des chansons mais en studio Rasmus a vraiment apporté sa patte, et son jeu de basse est tellement génial qu'il est une grosse part de ce qui fait nos compositions. Il est magique et en plus aventurier, il est plein d'énergie, c'est génial.

La pochette de l'album est également géniale : elle est attractive, mystérieuse, intense et symbolique en plus. Peux-tu nous en expliquer l'origine ?
Au début David voulait que ce ne soit qu'un simple dessin. On voulait une forêt typiquement suédoise et les arbres que tu peux voir sur la pochette sont très typiques du sud de la Suède d'où Sven (Karlsson, aux claviers) et moi venons. Ils sont très mélancoliques, très mystérieux et c'est ce que nous voulions. Au début, le dessin n'était qu'en nuances de gris mais nous avons décidé d'y ajouter des couleurs. Ma petite amie qui a une agence artistique a mis en œuvre la couleur. On a presque l'impression qu'il s'agit d'une estampe. Je trouve que le résultat est magnifique et en effet très symbolique.

Tu dois avoir très envie de présenter toutes ces nouveautés à vos fans en live maintenant non ?
Oh oui ! On va commencer par des festivals en Finlande puis je suis sûre qu'on aura des tournées en Europe mais le tout est de savoir où et quand. On a l'impression maintenant que les vannes sont ouvertes et que tout le monde doit jouer partout. Mais on veut donner le meilleur à nos fans et pas seulement prendre toutes les opportunités possibles. Cela arrivera, on est confiant.

Quelle est votre relation avec le public français ?
On s'est toujours senti proches des français et j'ai vraiment envie de revenir vous voir, surtout dans des petites villes que nous n'avons pas encore visitées. Il y a ce sentiment de mélancolie chez vous que l'on retrouve sur nos albums et qui nous lie. J'adore l'atmosphère qui règne aux concerts en France. Je remercie bien sûr notre public français en espérant que vous allez aimer le prochain album, qu'il va vous donner de la force et que l'expérience de son écoute vous ravira. A très bientôt sur scène !

Blogger : Aude Paquot
Au sujet de l'auteur
Aude Paquot
Aude Paquot est une fervente adepte du metal depuis le début des années 90, lorsqu'elle était encore... très jeune. Tout a commencé avec BON JOVI, SKID ROW, PEARL JAM ou encore DEF LEPPARD, groupes largement plébiscités par ses amis de l'époque. La découverte s'est rapidement faite passion et ses goûts se sont diversifiés grâce à la presse écrite et déjà HARD FORCE, magazine auquel elle s'abonne afin de ne manquer aucune nouvelle fraîche. SLAYER, METALLICA, GUNS 'N' ROSES, SEPULTURA deviendront alors sa bande son quotidienne, à demeure dans le walkman et imprimés sur le sac d'école. Les concerts s'enchaînent puis les festivals, ses goûts évoluent et c'est sur le metal plus extrême, que se porte son dévolu vers les années 2000 pendant lesquelles elle décide de publier son propre fanzine devenu ensuite The Summoning Webzine. Intégrée à l'équipe d'HARD FORCE en 2017, elle continue donc de soutenir avec plaisir, force et fierté la scène metal en tout genre.
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