Avec deux albums dans sa besace, « Asylum » et « Bonds of Euphoria » parus en 2014 et 2019, le trio allemand AB-EST a déjà pu faire tâter l’auditeur de son metal protéiforme gonflé d’ambiances de fin du monde. Et pour une fois les références bruitistes égrenées par son label sont plutôt dans la plaque puisque sont cités en vrac FULL OF HELL, YAUTJA et CULT LEADER : du noir, du gris et du goudron. Si bien que ce n’est pas une surprise de toucher tout cela du doigt sur « Molten Husk », troisième méfait du groupe issu de la région de la Basse-Saxe... celle-là même spécialisée dans l’industrie automobile et chimique. Comme une carte de visite prémonitoire qui confirme qu’en matière de musique toxique, les trois larrons sont bien calés en la matière.
La bonne grosse demi-heure ici affichée au compteur ne s’embarasse d'ailleurs pas de détails et suinte la rage, sourde et cruelle, tout du long. Une rage que le chanteur Josha hurle, vomit dès les premières notes de "Through The Veins" balancées sans la moindre précaution. Aidé dans sa quête par une section rythmique remontée comme jamais qui modèle riffs dissonants sur embardées sludge de premier ordre, le vocaliste assure le job avec classe. L'ambiance de désolation qui s'empare du reste de l’album confirme la tendance : les ténèbres sont dans la place, pas de doute, ajoutant à cette mélasse une bonne dose de NEUROSIS du meilleur effet. Le cogneur Rezy y va lui aussi de son empreinte destructrice, accélérant le tempo pour mieux jouer avec les nerfs quand bon lui semble. Le tout nage dans des ambiances crépusculaires doublées d’une mélancolie guerrière qui se fait la malle quand cela lui chante.
Produit avec doigté par Jan Oberg (à la manœuvre sur les albums de DOWNFALL OF GAIA, IMPLORE ou PRAISE THE PLAGUE), ce disque s’affiche d’ores et déjà comme l’une des sorties essentielles cette année en matière de post-metal/sludge dissonant (rayez la mention inutile). La frappe y est méthodique. Chirurgicale. Meurtrière. Et laissera l'auditeur sonné.