Neuvième album du clan de Long Island, « Hymns From The Apocrypha » marque la fin de l’aventure pour le capitaine de bord Frank Mullen, chanteur historique du groupe présent depuis ses tout débuts en 1988, qui a annoncé sa retraite après plus de trente années de bons et loyaux services. Et c’est Ricky Myers, batteur chez les doux poètes de DISGORGE (osez jeter une oreille à « She Lay Gutted » pour savoir ce que le terme "brutal" signifie vraiment) qui assure désormais la relève avec brio. Seul Terrance Hobbs, préposé à la guitare avec Charlie Errigo, reste fidèle au poste depuis le début de l’aventure que constitue la démo « Reincremated » parue en 1990. Garant d’un savoir-faire que le groupe conserve jalousement depuis toujours, le guitariste abat une nouvelle fois un travail titanesque sur ce nouvel album.
Il ne faut d’ailleurs pas plus de quelques minutes pour se rendre compte que SUFFOCATION est bien décidé à remettre les pendules à l’heure après plus de six ans d’absence. "Hymns From The Apocrypha" ouvre en effet les hostilités avec classe en balançant ces cassures rythmiques typiques qu’affectionne le groupe, le tout servi par une prestation imparable de Ricky Myers. Ses growls puissants et profonds accompagne à merveille la performance, une nouvelle fois impressionnante, d’Eric Morotti. Le batteur délivre ici une partition bluffante, à l’aise sur tous les tempos, en conférant à l’ensemble une maîtrise et un sens du pilonnage qui honore ses glorieux prédécesseurs Mike Smith et Dave Culross.
Derek Boyer n’est pas en reste, sa basse rugissant de plaisir tout au long de ces quarante et une minutes supersoniques. Le groupe opte ici pour un retour à ses racines avec ce qu’il faut de modernité comme en témoigne la production musculeuse ici signée Christian Donaldson (CRYPTOPSY). Et ne se prive pas de balancer quelques scuds dont lui seul a le secret, "Perpetual Deception", "Immortal Execration" et "Embrace The Suffering" sont à ce titre les grands moments de l’album avec ce côté frondeur et vicelard qui rappellera de bons souvenirs à ceux qui portent « Pierced From Within » aux nues. Pas question cependant de se reposer sur son passé, SUFFOCATION livre ici une prestation homogène, consistante de bout en bout en y incorporant ce qu’il faut de changement pour capturer l’attention du début à la fin. L’artwork ici troussé par Giannis Nakos en est une bonne illustration en optant pour une relecture moderne de ce que ce bon vieux Dan Seagrave proposait sur les premiers albums du groupe.
Et comme à son habitude depuis l’album « Pierced From Within », SUFFOCATION propose ici une version actualisée de l’un des titres de « Breeding The Spawn ». C’est en effet au tour de "Ignorant Deprivation" de subir un lifting, avec un certain brio... même si la nostalgie me gagne à l’évocation de cet album dans sa forme originelle. Doté d’une production faiblarde par la faute de son label de l’époque, Roadrunner Records, qui n’a pas souhaité donner les moyens au groupe d’enregistrer au Morrisound Studios au côté de Scott Burns, « Breeding The Spawn » reste un monstre de technicité qui fait encore référence trente ans après sa parution. Et force est de reconnaître que les lignes de chant de Frank Mullen, invité pour l’occasion à ressusciter ce titre, paraissent bien fades en comparaison de l’original. Un léger détail au vu du travail colossal abattu par le groupe et la performance de Ricky Myers au crachoir sur cet « Hymns From The Apocrypha » qui s’inscrit dans ce que le groupe a fait de mieux depuis sa reformation en 2004. Chapeau bas messieurs !