19 mars 2013, 7:02

Wes Borland • Portrait(s)

 

De passage à Paris avec BLACK LIGHT BURNS, le 9 février 2013, Wes Borland reçoit l’équipe de METAL XS et HARD FORCE dans sa loge, au Divan du Monde, quelques heures avant de monter sur scène (retrouvez l'essentiel de son interview dans METAL XS  S01E10 en cliquant ici). Il est très légèrement tendu, mais émanent de lui une très grande courtoisie et même une profonde gentillesse. Il n’aura pas le temps de profiter de Paris cette fois, mais il connaît déjà un peu la ville, où il a passé des vacances avec sa femme (désolé, les filles…). Voilà pour le « small talk », histoire de briser un peu la glace.

 
La première question de l’entretien porte sur les origines de BLACK LIGHT BURNS et Wes Borland, au détour de ses explications,  se trouve contraint de rappeler timidement qu’il est aussi le guitariste d’un groupe un tout petit peu plus connu, LIMP BIZKIT… Sourires – ça n’avait échappé à personne et LIMP BIZKIT, qu’on apprécie ce groupe ou pas, a certainement marqué l’histoire du Metal, au moins dans la seconde moitié des années 90. BLB est donc pour lui une sorte d’exutoire, qui lui permet d’explorer ses songes, ses visions, ses fantasmes et ses contradictions.

 
Au cours de l’entretien, en effet, tour à tour, Wes Borland se paraphrase, se reprend ou se contredit : en permanence traversé par le doute, il ne cherche jamais à dissimuler sa vulnérabilité. Au contraire, il revendique de se mettre en danger avec BLB, de se libérer de la grosse machine confortable qu’est devenue LIMP BIZKIT. Pourquoi ?
 
 
La discussion met surtout en évidence le besoin fondamental de Borland d’aller au contact le plus direct de son public. Au sein de LIMP BIZKIT, en revanche, il se protège, derrière les accoutrements et les lentilles de contact qui ont contribué à sa célébrité. Caméléon, il s’excuse presque, évoquant les tournées US de BLB, de préciser que dans le tour-bus, il prend son quart derrière le volant, comme les autres passagers. En refusant explicitement la dignité de guitar hero que certains lui prêtent très volontiers, c’est aussi la condition de rock-star qu’il rejette, lui préférant nettement celle « d’artiste qui s’intéresse à des tas de trucs différents qui finalement n’en font qu’un ».

 

 
 
Ainsi explique-t-il que la dernière galette de BLB (« Lotus Island ») est avant tout conçue comme une B.O.F. alternative à La Montagne Sacrée (« The Holy Mountain » - 1973), un film – largement ésotérique et surréaliste – d’Alejandro Jodorowsky. Dans le même esprit, il considère la réalisatrice vidéo qui suit BLB comme un membre du groupe à part entière – un groupe pour lequel il revendique la place de frontman… par contraste, toujours, avec LIMP BIZKIT, où il renvoie étrangement sur Fred Durst jusqu’à la responsabilité du regard (« eye contact ») vers le public. En tout état de cause, les deux groupes contribuent à son équilibre et il refuse absolument de hiérarchiser son implication auprès de l'un ou auprès de l'autre.
 
 
Généreux, cultivé, complexe, plein d'humour et attachant, c’est ainsi qu’apparaît Wes Borland, qui ne manque pas non plus d’inviter ses interlocuteurs à découvrir la performance de Jayce Lewis, du groupe JAYCE LEWIS  (à moins que ce ne soit l’inverse), qui ouvre pour lui sur cette tournée : un jeune Gallois très prometteur, à ses yeux, dont il explique qu’il a composé et enregistré ses morceaux chez lui, tout seul, comme un grand, sur son Mac. Reste à découvrir tout ça sur scène, donc.

 

 
Un moment plus tard, Jayce Lewis et les musiciens qui l’accompagnent prennent effectivement possession du Divan du Monde pour un set plein de conviction. La page Facebook du groupe décrit son style d’un mot : « LOUD » – ce qui se vérifie très rapidement en live. Pour rentrer un peu dans le détail, JAYCE LEWIS propose un électro-rock puissant et très énergique, volontiers saturé et dont la personnalité repose notamment sur les rythmes tribaux dont Jayce, lâchant parfois sa guitare pour aller se caler derrière un set de toms disposé sur le côté de la scène, agrémente régulièrement ses morceaux.
 
JAYCE LEWIS au Divan du Monde

Le résultat, globalement très plaisant, se situe sans doute quelque part entre RAMMSTEIN, ALPHAVILLE et DEPECHE MODE – la férocité d’un pack de rugbymen gallois en plus. A noter également, la performance à la fois musicale et très visuelle d’un batteur hallucinant : Jack Slade.
 
JAYCE LEWIS - Jayce Lewis et Jack Slade

Dès la fin du set de JAYCE LEWIS, les musiciens de BLB installent leur matos et peaufinent le réglage de leur son. D'abord intimidés, des membres du publics s'enhardissent et adressent à Wes Borland des messages de bienvenue et d'encouragement. Souriant mais concentré, Borland ne semble pas prêter attention à ces apostrophes auxquelles il ne répond rien... Sa réponse, c'est sa musique : elle ne tarde pas à arriver, avec « Stop a Bullet » (morceau tiré de Cruel Melody - 2007), qui ouvre le set.
 
BLACK LIGHT BURNS au Divan du Monde - Dennis Sanders & Wes Borland

Et l'on découvre un Wes Borland fréquemment libéré de sa guitare, possédé, roulant et tournant parfois comme un pantin désarticulé, ou dansant tel le dieu Pan (dommage qu'il ait rasé sa superbe barbe, depuis) au centre d'une Bacchanale endiablée. La complicité entre les membres du groupe est évidente, leur bonheur d'être sur scène également, l'énergie attendue est là, le public rentre en transe.

Le set de BLB n'est dénué ni d'humour,  ni, surtout, de la plus manifeste improvisation, parfois - comme lorsque Nick Annis, guitariste, lance le riff de « Master of Puppets » ( METALLICA), rapidement rejoint par Wes Borland et Dennis Sanders, pendant que derrière les fûts, Dylan Taylor roule des yeux effarés tout en essayant de faire bonne figure et de marquer la mesure sur sa crash... « He's too young for this shit ! » lance alors Sanders - et le groupe de repartir tranquillement sur « Hate of my Life »...
 
 
BLACK LIGHT BURNS  - Dylan Taylor
 
 
BLACK LIGHT BURNS  - Wes Borland & Nick Annis
 
BLACK LIGHT BURNS  - Dennis Sanders
 

Bien que BLB soit classé parmi les groupe de metal industriel (ce qui se comprend face au pédigrée de Borland), on sent que le groupe doit autant à l'influence d'un Nick Cave, par exemple, qu'à celle de NIN ou de Marilyn Manson : sur pièces, en live, on peut juger BLB plus rock que metal, plus punk qu'industriel - au moins dans l'attitude.
 
 
Dennis Sanders s'est fracturé le pied, depuis, lors d'un concert en Russie - souhaitons lui un prompt rétablissement !

 
Même si les compositions de Wes Borland présentent un intérêt variable (beaucoup sont excellentes, mais une ou deux sont un ton en dessous), ce concert de très haute tenue, dans l'ensemble, aura certainement marqué les esprits du public présent, ne serait-ce que pour l'exceptionnelle disponibilité de l'artiste, à l'issue du concert : comme il nous a confié qu'il aimait le faire, sans repasser par les loges, il a passé plus de 20 minutes dans la fosse, au milieu de son public, signant des autographes, se laissant prendre en photo et immortalisant lui-même certains de ses fans sur son smartphone.
 
 
 
 
Juste derrière Wes Borland, on reconnaît Dédo, l'humoriste métalleux, toujours aussi sympa et toujours dans les bons coups !
 
 

Rappelons enfin que Wes Borland reviendra en France avec LIMP BIZKIT, pour le Sonisphere, les 8 et 9 juin prochains.
 
Merci à Roger Wessier pour  l'accueil au Divan du Monde
 
Blogger : Naiko J. Franklin
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