7 mai 2024, 23:59

CRYPTA + NAKKEKNAEKKER + PLAGUEMACE

@ Colmar (Le Grillen)

En mai fait ce qu’il te plaît. Une fois n’est pas coutume, je dédie ma soirée du 7 mai à un rassemblement ethnique pour une célébration de sa musique de prédilection. En clair comprenez que je vais avec quelques ami(e)s au Grillen de Colmar. L’organisation locale de l'association Aching, qui depuis des années nous régale d’affiches internationales, participe à la venue du Brésil et du Danemark jusqu’à nous pour un plateau de metal extrême.

20:00. La scène est envahie par les fous furieux PLAGUEMACE qui lâchent un puissant "Cannibalicious". C’est un lâcher de riffs furieux à travers une rythmique aussi fangeuse que les marais de Floride. C’est de la viande saignante au menu de ce soir. Ils ont 30 minutes de jeu allouées, ils vont pourtant nous bousculer pendant 45 minutes, et c’est tant mieux. Nous sommes captivés par le jeu de scène du frontman Andreas Truelsen. Ce géant blond, aux incroyables borborygmes extra gras se livre régulièrement à des danses singulières (Cyco Miko sort de ce corps !) tout en mimiques et tirages de langue. Ce croisement entre Jax Teller de Sons Of Anarchy et un viking hilare sorti de l’imagination de Goscinny et Uderzo restera longtemps dans nos mémoires. Musicalement on est au top. "Rhythmic Demise" fait sautiller une salle remplie, la chaleur monte. Outre le côté OBITUARY déjà mentionné, les riffs qui tranchent dans du gigot huileux, le roulement rythmique offre un groove qui plaît beaucoup à votre serviteur. Ça me fait penser à un truc pendant tout le set, ça me chatouille la mémoire sans que je ne trouve...

PLAGUEMACE ne nous délivre pas uniquement de death metal old-school. Il y a de la rapidité dans la basse et de la texture dans les riffs, "Misantropical Breed" me titille à nouveau avec son thrashcore, je réfléchis toujours, j’ai déjà vécu cette sensation. Sur l’un des titres nous baignons même dans un black metal des plus joyeux. Excellente initiative paradoxale.

PLAGUEMACE s’impose en maître du death/thrash à travers un intense "Carnivore", désolé les vegans mais, comme mentionné au début on est réellement au rayon boucherie. L’écoute de "Plagueface" me fait dire que SLAYER en danois doit se prononcer Raining blut. Lors d’une dédicace à L-G Petrov je pige enfin. PLAGUEMACE est son groove-thrash renvoie aux heures délicieuses d'ENTOMBED. Les Danois ont le savoir faire de leurs pairs. Growlements de tambours, après avoir interpellé l’un des spectateurs, torse nu et en transe-piration, et lui avoir déclaré : « Papa ! Après 27 ans je te retrouve enfin ! », (rires généraux), Andreas, hurleur facétieux acclamé, vient ensuite se déhancher dans la fosse, avant de terminer son concert sur le comptoir du bar du Grillen. La soirée a démarré très fort...

On poursuit rapidement avec NAKKEKNAEKKER, j’ignore comment ça se prononce mais ça fait super classe en stylisé sur le backdrop. Voilà que débarquent des enfants sur la scène. Entre 16 et 20 ans, le menton duveteux, l’air innocent. Deux secondes plus tard, quand déferlent riffs ultra techniques et batterie martelée façon saigneur des ténèbres, nous voilà tous calmés et attentifs. Nous nous prenons dans la face "Putrified Blody Fluid" et "Horizon Of Spikes", c’est du brutaaal. Non, ils ne font pas semblant les minots avec leurs bouilles de mini Mustaine. Pendant 40 minutes ça va monter en puissance, et le public est conquis.

A partir de "Horizon Of Spikes" le rythme de croisière du missile destructeur est atteint. Le public est encouragé à se fracasser sur les riffs et dans le pit. Notre légendaire Kerstin, alias la valkyrie des festivals de Germanie, malgré un genou en vrac s’en va chatouiller tous les molosses de la fosse... Seuls les garçons restent sages, ou moins téméraires. 7 titres sont envoyés en rafale, les circles-pit se succèdent, dans la joie et la bonne humeur musicalement sauvage. Après un "Absorption" à la lourdeur d’enclume propulsée dans nos oreilles et nos cœurs, NAKKEKNAEKKER assumant clairement son humeur Obituerie, assène le coup de grâce, avec "Face-Splitting Madness" qui libère une dernière salve de death metal bien méchant. Un groupe un peu jeune pour avoir des morbid visions, mais ce fut réellement impressionnant. Je comprends mieux pourquoi le Hellfest les accueille pour les présenter au grand public metal.

Voilà les reines des telenovelas musicales brésiliennes. Depuis qu’elles ont terminé leur crise de Nervosa, Fernanda Lira et Luana Dametto, spécialistes en destruction sonore rythmique, ont monté CRYPTA en 2019. Aujourd’hui elles viennent promouvoir leur deuxième album, sorti en août 2023, l’excellent « Shades Of Sorrow » (souvenez-vous, j’en a beaucoup parlé).

Ouverture des hostilités avec "The Other Side Of Anger", véritable épopée death. On apprécie les poses épiques de Fernanda, toutes en grimaces hargneuses et tirages de langue, avec les frisottis de sa chevelure au vent telle une Fifi brins d’acier latino. Aux guitares nous découvrons Tainá et Jessica, la première nous plaquant au sol à travers des rafales meurtrières, la seconde nous décollant les poils avec des soli subtilement appuyés, c’est le cas notamment sur "Lift The Blindfold". Les filles ne sont pas venues pour enfiler des perles, et c’est tant mieux. A la batterie Luana se révèle être une maîtresse en matraquage de folie, rapide et précise, le Brésil est toujours l’autre pays du death metal.

Défile à présent "Poisonous Apathy", titre ultime, le public est aux anges... ou aux diablesses vu la thématique de CRYPTA. "The Outsider", véritable morceau de bravoure technépique, constitue un moment fort où les guitaristes nous impressionnent, pendant que Fernanda s’impose en fille de cœur de Tom Araya. Elle intervient régulièrement dans un beau français, avec un sourire d’une candeur ravageuse, les colmariens apprécient et saluent. Un sacré charisme. De même Luana est-elle la descendante de Lombardo avec son regard illuminé et ses baguettes folles ? Oui, il n’y a qu’un battement de double caisse à franchir. Autre hit du dernier album, "Stronghold", arrive et nous enflamme. Retour au rayon viande saignante avec « Trial Of Traitors », les loulous de NAKKEKNAEKKER viennent taquiner l’alsacien dans le pit, Kerstin et Mélanie les retournent dans tous les sens. Eclats de rire, bonne humeur et kiné demain. Andreas de PLAGUEMACE arrive hilare et c’est pari pour une gigue de fou. Un nouveau grand moment dans cette soirée qui est déjà très vivante !

"Under The Black Wings" est un des deux extraits du premier album « Echoes Of The Soul ». C’est l’occasion pour CRYPTA d’épouser la philosophie hellsacienne des afficionados du genre présents ce soir. On danse et on s’éclate sauvagement.  "Under The Black Wings" est lourd, vif. "Dark Clouds" flirtant avec le black. "Agents Of Chaos" lui est tribal. Aujourd’hui les sépultures sont des cryptes. Les chevelures tournoient toujours, la relève est assurée.

Pas vraiment de rappel. On enchaîne vite sur un final apocalyptique, "Lord Of Ruins" est un morceau parfait, dégageant la puissance d’un ARCH ENEMY de la grande époque puis, c’est le magnifique "From The Ashes" qui s’y colle. Ultime. CRYPTA lâche tout sur le public, une déferlante de rage, de soli, de hurlements, le tout est accueilli comme il se doit avec des acclamations de plaisir. Serrage de mains, applaudissements. CRYPTA C’était growlement bien. Ce fut une soirée entre potes, une sacrée soirée comme dirait Jean-Pierre, avec des découvertes, des rires et des chants...
 

Blogger : Christophe Scottez
Au sujet de l'auteur
Christophe Scottez
Chris est ethnologue à ses heures perdues, vétéran des pogo joyeux en maillots de core. Un explorateur curieux, grand amateur de riffs et de chants sauvages. Il a grandi dans les glorieuses années 80, bercé par les morceaux canoniques d’ACCEPT, SCORPIONS, MOTLEY CRUE et autres GUNS N ROSES. Traumatisé par le divorce entre Max Cavalera et son groupe, ainsi que par un album des Mets un peu «chargé» en n’importe quoi, Chris a tourné 10 ans le dos au hard rock. Puis, un jour, il a par hasard découvert qu’une multitude de nouveaux groupes avait envahi la scène … ces nouveaux sauvages offraient des sons intéressants, chargés en énergie. Désireux de partager l’émo-tion de ce style de metal sans la prétention à s’ériger en gardien d’un quelconque dogme, il aime à parler de styles de metal dit classiques, mais aussi de metalcore et de néo-metal. Des styles souvent décriés pour leurs looks de minets, alors que l’importance d’un album est d’abord le plaisir sonore que l’on peut en tirer, la différence est la richesse du goût. Mais surtout, peut-on se moquer de rebelles coquets alors que les pères fondateurs du metal enfilaient des leggins rose bonbon et pouponnaient leurs choucroutes peroxydées ?
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