L’année dernière, je m’étais laissée tenter par le Mystic Festival suite aux recommandations de Leonor Ananké (mon excellente binôme photographe).
Me voilà donc une année plus tard de retour à Gdańsk pour m’en mettre plein les oreilles, mais aussi le ventre (quitte à avoir surnommé le Mystic Festival le ''Pierogis Fest'', autant être honnête sur les objectifs du week-end). Cette année encore, l’affiche est des plus sympathiques, très diversifiée, dont beaucoup de groupes à découvrir pour ma part. Petite particularité : quitte à être en Pologne, il y a une belle représentation de groupes du crus ! Malheureusement, nous sommes arrivés la veille du festival et non pas quelques jours avant donc, pas de tourisme ! A peine arrivées, on pose les valises, on récupère nos pass dans un bar réservé pour l’occasion (afin d’éviter trop de file d’attente le premier jour), un premier restaurant de Pierogis et c’est bon pour attaquer le lendemain.
C’est donc le mercredi 5 juin qu’on débute le festival avec la journée warm-up. Dans le cadre de cette journée de chauffe, on a un festival en configuration réduite, mais moins que l’année précédente : de nouveau les trois petites scènes sont ouvertes (la ''Shrine'', la ''Sabbath'', et la ''Desert'' stage), mais cette fois-ci, une des deux grosses scènes extérieures, la ''Park Stage'', est déjà opérationnelle ! Le but est de se mettre lentement dans le bain, avec déjà une très belle affiche, mais en profitant d’un site plus petit avec moins de monde.
Pour ceux qui ne le connaîtraient pas, le lieu est vraiment agréable et atypique : dans les anciens entrepôts des chantiers navals (connus pour être le lieu de naissance du syndicat Solidarność) et plus particulièrement sur la Elektrykow Street qui abrite le club B90. Le tout dans une ambiance à la limite de l’urbex qui change des open airs habituels. Deux scènes intérieures, un food court, des bars un peu partout, et des toilettes en dur (qui sont nettoyées au fur et à mesure de la journée, donc toujours propres et avec du papier toilettes... alléluia !!) et quelques coins toilettes de chantier à l'extérieur. L’arrière des entrepôts est aménagé en zone de repos avec de nombreux transats et des bars à cocktails. On y reviendra mais les zones de repos disséminées un peu partout sur le festival ainsi que la possibilité de se reposer autrement qu’assis sur le sol, est un des points forts du festival. Il y a même un écran qui diffuse en direct le concert en cours sur la Park Stage ou la Mainstage.
Passé ce petit tour d’horizon pour se faire une idée des changements, même si une partie du site ne sera accessible que le lendemain, c’est parti pour notre premier concert : les Parisiens TEN56. sur la Desert Stage. Sur le papier j’en conviens, aller jusqu’en Pologne pour commencer avec un groupe français, ça peut paraître légèrement chauvin, mais les lois du running-order sont ainsi faites et avec une quasi absence de groupes français cette année, ça tenait presque du devoir moral. Les Français donc, sont en forme malgré les heures passées sur la route pour être présents, et comptent bien profiter de la fraîcheur des festivaliers pour leur passer dessus comme un rouleau compresseur avec leur deathcore. C’est propre, efficace, l’occasion d’avoir notre premier mosh-pit, y compris un réservé à la gente féminine, seul inconvénient, si la Desert Stage est une petite scène bien agréable, elle était malheureusement trop petite pour le public venu voir le groupe. D’ailleurs, ce problème de taille de la Desert Stage sera omniprésent tout le week-end et sera victime de la qualité de la programmation, au point d’encombrer les allées, et que le public remonte sur les côtés voire quasiment derrière la scène.
Changement d’ambiance ensuite avec les Néerlandais TEXTURES. Ces derniers jouent sur la Park Stage, une des deux scènes extérieures qui accueillent les têtes d’affiche de la journée. Après une tournée d’adieu en 2017 et une reformation récemment annoncée, il eut été dommage de ne pas aller les voir. Une réflexion qu’a probablement du se faire l’ouvrier sur le chantier de construction à côté qui profitait de la vue sur la scène en headbanguant joyeusement ! Côté scène la pause de 7 ans ne se ressent absolument pas et leur metal progressif n’a pas pris une ride. Le groupe est toujours à fond dedans et cela fait bien plaisir de pouvoir de nouveau entendre TEXTURES en live. Malheureusement la pluie se joint à la fête et très vite, sans parapluie, cela devient compliqué de rester ) l'extérieur...
Petit détour par un des nombreux bars pour vérifier si l’inflation constatée en ville dans les restaurants se répercute aussi de ce côté-là et si la qualité est toujours au rendez-vous. Si cela reste toujours moins cher qu’en France, et bien moins cher qu’une bière au Zénith, les cocktails sont désormais plus aux alentours de 7€ ou 7,5€ (contre 6 € l’année dernière). En revanche la qualité n’a pas changé et tout comme en 2023, nous nous lançons dans une étude comparative soigneuse de la carte répartie sur 4 jours.
C’est donc dans les meilleures conditions que nous nous réfugions sous la Shrine Stage pour éviter la pluie, siroter tranquillement notre verre et surtout jeter une oreille attentive à TOTENMESSE, groupe de black polonais que l’application nous décrit comme étant sacrilège, énervé, à la croisée des chemins d’un « Grand Declaration Of War » de MAYHEM et « Rebel Extravaganza » de SATYRICON. Ca marche plutôt bien en live, même s’il faut bien le dire, visuellement ça pique un peu les yeux. La cartouchière par-dessus le pantalon de jogging adidas avec les new rocks, il fallait oser et je ne suis pas vraiment sûre que c’était l’idée du siècle... ajoutez à ça une magnifique moustache à la Freddie Mercury et vous avez un ensemble assez détonnant. Le chanteur se démarque aussi avec une attitude qui n’est pas sans rappeler celle de Niklas Kvarforth de SHINING alors que le reste du groupe est plutôt tout en sobriété. L’impression que l’on se fait de ces derniers sera assez fugace, car au bout de 20 minutes de set, leur concert est interrompue par une coupure de courant et ils ne seront pas en mesure de le reprendre. La pluie torrentielle à laquelle nous avons droit est en réalité un orage qui nous offre une coupure de courant dans tout le quartier pendant une bonne heure... Les Anglais INGESTED qui débutaient leur prestation sur la Desert Stage ont quant à eux été interrompus au bout de 5 minutes et leur set a finalement été reprogrammé en toute fin de journée !
Que reste t-il à un festival de metal qui n’a plus d’électricité ? Les bars qui ont la bonne idée d’avoir des batteries pour leur terminal de paiement électronique (pas de système de cashless au Mystic Festival, le paiement sans contact est toujours le roi) et FEAR FACTORY sur la Park Stage qui fort heureusement a un groupe électrogène de secours et pour qui la pluie s’est finalement arrêtée. La conscience journalistique intacte après avoir vérifié quel bar était encore en mesure de désaltérer les festivaliers, nous allons donc voir la fin du set des Américains. J’enchaîne ensuite avec BODY COUNT sur la même scène. J’avoue volontiers que je profite de pouvoir les voir au Mystic sachant que je n’irai peut-être pas les voir au Hellfest car passée une certaine heure je ne mets pas les pieds devant la Warzone ayant beaucoup de mal à supporter la surpopulation... C’est donc avec grand plaisir que je profite de l’opportunité de cet instant. D’ailleurs de manière plus générale, je profite de ce festival avec une jauge plus petite et un meilleur accès au devant des scènes pour faire le plein de têtes d’affiche !
Mais revenons à BODY COUNT. Forcément le groupe commence avec ''Body Count In The House'' et la fosse se déchaîne tout de suite. C’est efficace et c’est exactement tout ce qu’on peut attendre d’un de leurs concerts. La petite blague d’Ice-T en plus, sur le fait de se faire électrocuter lorsque la pluie revient (alors que bon... il devrait déjà être content d’avoir de l’électricité pour jouer, on a bien vu que ce n’était pas gagné ce jour là !) Par contre, le discours pour la chanson ''Manslaughter'' à base de « il n’existe pas de masculinité toxique, seulement des hommes qui refusent de se féminiser ou de chialer comme des gonzesses » en 2024, on aurait pu espérer que ça n’avait plus sa place ! Un sacré mauvais point pour eux, de notre avis.
On part avant la fin pour tenter de jeter une oreille à MORK, groupe norvégien de black metal mais une tentative malheureusement avortée : la Sabbath Stage, c’est un peu la Warzone de ce festival. Souvent victime de son succès, cette dernière est une petite salle tout en longueur assez étroite, encore plus que l’Etage à Rennes, et une fois remplie, difficile d’y rentrer et de circuler. Qu’à cela ne tienne, nous y voyons le signe d'une pause dîner ! Pour ceux qui n’ont pas encore eu le plaisir d’aller au Mystic Festival, c’est un peu comme le Hellfest, les stands de restauration y sont nombreux, très variés, quasiment toutes les cuisines y sont représentées et il y a plusieurs espaces pour se restaurer dans le festival. Les options vont du carné au vegan. Les food-trucks sont plus nombreux que l’année dernière et nous ne ferons quasiment jamais la queue en 4 jours, un vrai plus par rapport à la dernière édition. A noter que la fonction photo de Google Trad devient votre meilleur alliée pour ne pas mourir de faim, et vous permet de comprendre les blagues glissées dans la carte !
On passe devant VIO-LENCE mais sans s’y attarder (après tout on verra Robb Flynn le lendemain avec MACHINE HEAD) le but étant d’aller voir SUFFOCATION sur la Desert Stage. Là encore mauvais timing, on s’améliorera les jours suivants, nous avons par la suite appris à aller avant le début du concert sur la Desert Stage pour avoir de la place. Là clairement, SUFFOCATION était attendu, et pas seulement par Leonor qui portait sa plus belle casquette pour l’occasion, mais par bon nombre de festivaliers qui arboraient la couleur vert fluorescent du groupe. Résultat : une scène pleine à craquer, y compris à l’arrière. En effet, la Desert Stage est sur le côté d’une allée, il y a donc un bar adossé, mais aussi une plateforme qui permet de monter au dessus du bar et voir l’arrière de la scène. Nous avons donc entendu SUFFOCATION plus qu’on ne les a vus. Heureusement notre photographe a fait de très belles photos pour vous... C’est un joyeux bordel organisé sur scène comme dans le public, ça tabasse et ça retourne tout. Propre et efficace.
En étant loin du pit c’est donc avec tous nos membres qu’on arrive pour voir KREATOR, la tête d’affiche du jour sur la Park Stage. Pour résumer KREATOR : Deutsche Qualität. En revanche, on a pas très bien compris comment ils pouvaient à la fois être heureux de jouer à Gdańsk pour la première fois, tout en disant 5 minutes avant que cela leur faisait plaisir d’être de retour. Un peu de pyrotechnie, du très bon thrash et une prestation apparemment assez semblable à celle donnée à l’Olympia il n’y a pas si longtemps... Pour les habitués, pas de grosse surprise, mais ce n’est pas pour ça qu’on boude son plaisir. KREATOR c’est toujours aussi bon en live et ce n’est pas l’ambiance dans le public qui vient le démentir.
On part un peu avant la fin du set pour profiter de l’intégralité de celui de VILLAGERS OF IOANNINA CITY. Bien nous en a pris. Le concert des Grecs est clairement mon préféré de la journée. Le groupe propose un savant mélange de stoner et de folk à la sauce grecque avec de la cornemuse, du kaval et de la clarinette. C’est beau et ça passe comme un bonbon en fin de journée après tant de brutalité. En parlant de brutalité, VILLAGERS OF IOANNINA CITY me donne l’excuse parfaire pour louper SANGUISUGABOGG, un peu trop bourrin pour moi, sur la scène voisine. C’était la première fois que je voyais les Grecs sur scène et après ce set je vais suivre de plus près leur actualité pour ne pas louper leurs prochains passages... Ca change de ce qui peut se faire habituellement en matière de folk metal, qui va plutôt puiser dans le celtique ou le nordique, mais aussi dans le genre mixé. Le fait de le croiser avec du stoner et non pas du black comme c’est souvent le cas est une excellente idée.
Je serais bien restée sur cette dernière prestation pour finir la soirée, mais après leur set avorté de 5 minutes, je me sens comme un devoir moral d’aller voir le concert d’INGESTED, bien que ce ne soit pas vraiment mon genre musical préféré. Les Anglais ont réussi à garder la pêche qu’ils avaient dans l’après midi et leur deathcore achève ceux qui avaient encore assez d’énergie pour participer au mosh-pit. Oserait-on parler du fameux humour anglais lorsqu’ils simulent une nouvelle coupure de courant ? Si le chanteur, et une bonne partie du public, trouve la blague particulièrement drôle, on entend quand même un ou deux ''kurwa'' dans le public. Je ne reste cependant pas pour l'intégralité de la prestation, c’est puissant mais toujours pas vraiment ma tasse de thé ! Il nous reste plus qu’à rentrer pour reprendre des forces avant le lendemain qui s’annonce bien chargé...
Photos © Leonor Ananké - Portfolio