Lundi 31 mars, au Backstage by the Mill, s’est tenu un concert unique à tous points de vue. Le groupe suédois GREENLEAF était annoncé avec les Texans HIGH DESERT QUEEN en première partie. De quoi ravir les amateur.ice.s de stoner rock et de rock des années 70. Pourtant, environ une heure avant le début du concert, l’organisateur Garmonbozia annonce sur la page Facebook de l’événement que le chanteur de GREENLEAF, Arvid Hällagård, est victime d’une extinction de voix et ne peut assurer le concert. Si une partie du public demande à être remboursée ou à ce que l’événement soit reporté, la salle est malgré tout remplie lorsque le concert commence.

© Ivane Payen
HIGH DESERT QUEEN ouvre la soirée et la magie opère très vite. Formé en 2020, le groupe a déjà réussi à se faire une place parmi les groupes de stoner états-unien en vue, avec son desert/stoner rock et un univers visuel très coloré. Les chansons de l’album « Palm Reader » (2024) étaient évidemment à l’honneur et c’est avec le morceau éponyme que le set commence. L’énergie du chanteur Ryan Garney est immédiatement perceptible, non seulement à sa voix qui jamais ne faiblit sur les notes tenues des chansons, mais également aux danses auxquelles il se livre sur scène pour mettre en valeur tour à tour les notes rapides jouées par le guitariste Rusty Miller, la basse maîtrisée par Morgan Miller et la batterie portée par Phil Hook, notamment lors du passage instrumental de "Time Waster".

© Ivane Payen

Le chanteur marque une courte pause, le temps de remercier le public de la salle du bel accueil qui leur est fait pour ce premier concert dans la capitale française. Le public les acclame et le groupe enchaîne avec "The Mountain Vs. The Quake", seul titre de la soirée issu de l’album « Secrets Of The Black Moon », pendant le refrain duquel le public peut crier ce refrain, assez instinctif pour emporter jusqu’aux personnes qui découvrent le groupe. Plus les titres passent, plus le public se rapproche de la scène pour danser et headbanger avec Ryan Garney qui, après "Ancient Aliens" et "Head Honcho", descend dans le public pendant les passages instrumentaux de "Solar Rain" pour serrer dans ses bras le plus de monde possible et les remercier de l’accueil chaleureux qui leur est fait.
Le set s’achève et vient la pause entre les deux groupes pendant laquelle le public se demande à quoi s’attendre de la part d’un groupe privé de son chanteur. Entrent alors le guitariste Tommi Holappa, le batteur Sebastian Olsson et le bassiste Hans Fröhlich. Le chanteur de HIGH DESERT QUEEN rappelle élégamment qu’Arvid ne pouvant pas chanter ce soir, ce sont les trois musiciens qui assureront le concert. Le show qui suit alors est non seulement unique, mais légendaire à tous points de vue. Après avoir joué pendant 24 minutes non-stop, montrant ainsi leur endurance et leur énergie, les musiciens marquent une pause avant de se tourner vers le public pour demander quels morceaux il souhaitait entendre. D’abord un peu surpris, certains membres du public ne tardent pas à suggérer leurs chansons préférées du groupe, volontés auxquelles le trio accepte de se plier.
La set-list est donc faite sur-mesure pour correspondre aux souhaits d’un public qu’il faut convaincre qu’il a bien fait de venir malgré l’absence du chanteur. C’était chose faite dès les premiers instants, mais l’énergie électrique des musiciens, qu’il s’agisse du mouvement incessant de Sebastian Olsson qui semble rapidement avoir besoin d’une serviette pour éponger sa sueur, du sourire immense qui ne quitte pas le visage de Hans Fröhlich ou des allées et venues de Tommi Holappa sur scène, achève de convaincre les plus réticents.

Se succèdent alors des titres du groupe majoritairement issus de leur dernier album en date, « The Head & The Habit » (2024), le public montrant ainsi au groupe qu’il a affaire à des fans fidèles. "Sweet Is The Sound", "Avalanche", "A Wolf In My Mind" se succèdent, soit des titres qui ne reposent pas principalement sur la performance vocale. Et s’il faut des parties de chant, pas de problème ! Le public se souvient de quelques lignes de texte et accompagne volontiers le groupe. Pas suffisamment pour que le karaoké se déroule parfaitement, mais assez pour que les musiciens soient touchés de la joie qui leur est témoignée et assez pour que les plus téméraires s’emparent du pied de micro pour le promener au-dessus de la foule et espérer capter un peu des voix qui chantent à tue-tête (c’est raté, mais la tentative est belle).
Le banger absolu "Breathe, Breathe Out" est évidemment demandé et joué, pour le plus grand bonheur du public qui lance alors les hostilités à base de pogo, wall-of-death, circle-pit et cercle ouvert au centre duquel certain.e.s se livrent à des acrobaties et autres grand écart. Vient ensuite "Different Horses" dont les premières notes déclenchent une fois encore des mouvements plus ou moins contrôlés dans la foule et "Let It Out!" avant que, deux morceaux plus tard, le groupe ne décide de s’arrêter un peu plus tôt que prévu mais après avoir livré un show exceptionnel.
Même s’il faudra revoir le groupe avec son chanteur pour s’en faire une idée complète, les musiciens ont montré ce soir qu’ils sont de véritables showmen : peu importe les obstacles, le spectacle doit continuer, même si cela signifie qu’il faut improviser un concert.