15 septembre 2012, 0:00

CHANNEL ZERO : "Feed 'Em With A Brick"

Album : Feed 'Em With A Brick


Proies dévorées, arachnoïdiennes serres emprisonnant la victime, consentante, comme le silence tonne, comme l'absence résonne, comme les boulevards délavés de Los Angeles brillent un peu plus quand son Thrash, vérité urbaine, s'époumone, quand cette crasse rance colle aux vêtements et que le vent radioactif transporte jusqu'à nous, pauvres hères,  la renaissance d'une entité que l'on croyait morte et enterrée à jamais, alors boiteux sans doute, atrophiés par les gangrènes du printemps,  on s'incline devant la Bête qui a vaincu la Fatalité.

13 ans après les derniers sacrements, et sur la pointe des pieds, sur un tapis de fleurs noires, renaît CHANNEL ZERO, aujourd'hui dans le propos plus ricains que belges, amputant son entité du compositeur Xavier Caron (qui, grand seigneur, adoubera même le "petit" nouveau), mais accueillant la greffe parfaite, ce Mikey Doling (ex-SOULFLY), impérial, qui propulse au firmament un combo aujourd'hui en état de lévitation.
"Feed' Em With A Brick", cinquième album, oublie le techno-thrash ou les moiteurs "Kyussiennes" de l'adolescence et phoenix, s'enflamme pour un thrash metal de haute qualité, colossale production boostée par Logan Mader à L.A., riche idée et tsunami en vue, personne n'en sortira vivant.

"Hot Summer", premier single qui ouvre les hostilités, mat et menaçant comme un AK 47, saura rassurer les âmes dubitatives. Tempo qui ferait fuir de peur tous les LAMB OFGOD de la planète, cette musique a le goût amer du napalm.
"Guns Of Navarone" appuie là où ça fait mal et la mélodie toujours présente convoques les esprits d'un BLACK LABEL SOCIETY malté ou d'un FOZZY transgénique. La voix de Van Damme (n'ayez crainte, il s'agit de Franky De Smet Van Damme !), profonde, module souvent et évite les écueils fatigants d'un timbre  atonal que l'on retrouve trop souvent dans ce genre de musiques électrifiées. 
Thrash jusqu'à la mort, jamais résigné, "Freedom", leitmotiv parfait, bastonne sévèrement. PANTERA rencontrant SOUNDGARDEN, le bar sera blindé. Ma liberté (et ma Foi),  c'est encore la seule chose que tu ne pourras contrôler...
Toujours catchy,  ami, ici sous le lourd ciel sanguin, tu tangueras de satisfaction tant ce "In The City" et "Angel's Blood", véloces comme un SLAYER sous méthylène dioxyde-amphétamine, sauront te faire headbanger sous ta douche. Raw Opéra. Ça martèle, ça pilonne, et toujours ces lumineux et acérés soli qui ravagent la boîte crânienne. 
Mikey & Van Damme (quel duo ma foi...!), absolument maîtres de leurs destins, avec "Side Lines" absolument divin (chair de poule assurée ma poule), comme les derniers sacrements qu'oserait un LYNYRD SKYNYRD puisant dans des fûts entiers de doom glauque l'ultime hommage, laissant choir le Stetson sur la dépouille d'un thrash enfin libéré de ses scories. Ce rebelle a eut un nom, jadis. Il se nommait Rock.

Quand dans le même laps de temps déboule un TESTAMENT au sommet de son art, et qui avec les deux derniers ARTILLERY (ainsi que les derniers somptueux WHIPLASH et DEATH ANGEL en n'oubliant pas la quasi totalité des productions de l"'école allemande", toujours dense et volontaire), sauve le thrash metal de la médiocrité dans laquelle un revival puéril ainsi qu'une paresse bourgeoise des gros mastodontes (en clair : MACHINE HEAD, ANTHRAX, SLAYER, MEGADETH, EXODUS, OVERKILL et tant d'autres... bien évidemment, METALLICA continuera toujours d'être dédouané car il ne peut absolument pas être accusé d'immobilisme artistique...), l'ont noyé dans un puit sans fin/fond, alors profitons donc de l'occasion pour saluer ici la réédition du "Demon Preacher"(1988) de DEATHWISH qui permet de ne pas se trancher (encore) les veines lorsque MUNICIPAL WASTE, HEXEN ou pire VIOLATOR (avec le fils-à-papa chéri...), brandissent sans humilité aucune les étendards d'un thrash accepté par la masse la plus docile et incompétente. 

CHANNEL ZERO pour en revenir à nos "moutons" électriques (mais bon dieu, à quoi peuvent-ils donc rêver...?), s'affranchissent de la médiocrité ambiante et ose, jouant le tout pour le tout sans se soucier des vipères bavardes alentour (GOJIRA connaît ces chemins escarpés...), et touche le jackpot. Le troublant "Ocean" avec en filigrane des intonations empruntées à un Jim Morrison ressuscité voire à un THE CULT aérien (ou plus proche de nous à un Bertrand Cantat illuminé), sait caresser l'épiderme. Et nous atomise. Hiroshima mon Amour, planqué dans ce tunnel, dioxyde de carbone comme seule échappatoire, dehors les croassements s'intensifient, une brique dans leurs gueules pour les faire taire, les cochons règnent sur la capitale, mais nous n'abdiqueront pas, nous ne plieront jamais...

CHANNEL ZERO accélère le processus de régénération et offre un nouvel oxygène à une musique qui s'éteignait, lentement, s'évaporant comme une danseuse orientale chancelante, scintillante sous la lune mais statue de sel au matin.

Pari réussi, retour gagnant : groupe et album INDISPENSABLES.

Blogger : Mel Delacroix
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