4 août 2013, 0:00

GHOST B.C. : "Infestissumam"

Album : Infestissumam


GHOST est certainement une énigme.
Voilà un groupe qui ne laisse pas indifférent, On aime, on adore ou on déteste, certains en ont aussi rien à faire mais en tout cas, on en parle. Il suffit de lire une partie des commentaires d'internautes qui fleurissent comme des Tacca chantrieri, une variété d'orchidées, sur les réseaux sociaux dès qu'il est question du groupe.
GHOST, un groupe qui a de l'esprit, s'est formé en 2008 en Suède, une de ces froides contrées réputées pour ses paysages, la blondeur d'une partie de sa population et la propension d'une autre à se peindre la gueule avant d'aller brûler des églises (plus précisément en Norvège), pour se réchauffer ou de beugler des mélopées du fond de la gorge sur des rythmes endiablés.

Après un premier EP en 2010 puis un premier album éponyme, et fort d'une reconnaissance plus que grandissante, le groupe est revenu au début de l'année avec « Infestissumam », qu'on pourrait traduire par « le plus hostile », pour les ceusses qui n'ont pas pris latin à l'école.
GHOST sur scène, ce sont cinq types en soutane noire, sans visage et sans nom, ce qui est plus pratique pour ne pas être reconnu dans la rue et tient moins chaud que des casques de moto, aux instruments, guitares, basses, batterie et clavier. Ces Nameless Ghouls entourent une sorte d'évêque en négatif avec une grosse mitre et la tête d'un macchabée. Un anticureton qui se transforme et change de nom à chaque album (Papa Emiritus I puis II), et qui tient dans la main en ce moment une crosse ornée d'un des logos du groupe, un "G" dans une croix renversée.
A première vue et à la lecture des paroles, on pourrait penser que c'est encore un groupe de Black Metal. Ce serait réducteur. C'est à dire que GHOST a une démarche artistique assez poussée, musicale à la base, mais appuyée par un univers aussi fort que chiadé. GHOST, c'est de la musique à plusieurs dimensions.

C'est d'ailleurs ce qu'a expliqué l'un des musiciens, dans une interview. Ce qui allait devenir un satané concept est né d'un riff de guitare aussi lourd que les pierres qui ont servi à bâtir la basilique Saint-Pierre de Rome. Et c'est de là que tout le reste est apparu.
Si les paroles et l'imagerie développée par GHOST correspondent en de nombreux points au Black Metal, la musique du groupe en est souvent éloignée, même si beaucoup de riffs font plutôt dans le sombre. Ici pas de blast, plein de doubles croches à la batterie, il y avait même un shuffle plutôt disco dans « Satan Prayer » sur le premier disque.
Pour GHOST, tout commence avec la musique. Alors oui, il y a des influences, de ces groupes comme MERCYFUL FATE ou le BLUE ÖYSTER CULT qui étaient déjà arrivé à faire coller impeccablement paroles et musique. Alice Cooper n'est pas très loin non plus. Mais la musique de GHOST est encore plus riche. Et on s'en rend compte à chaque nouvelle écoute.
Le nouvel album, le premier depuis la signature du groupe chez une nouvelle filiale d'Universal, qui n'avait pas eu le nez aussi creux depuis longtemps, a été enregistré à Nashville, capitale de la musique, notamment religieuse.

Il commence avec une ode au malin en latin façon chant grégorien avant que ne déboulent les 4+1 cavaliers de l'Apocalypse, histoire de se mettre dans le bain. Pour la petite histoire, les choeurs ont été enregistrés à Hollywood, aucun chanteur bossant dans la ville du King ne voulant interpréter ces paroles maléfiques.
Dès le premier brûlot, « Per Aspera Ad Inferi », le ton est donné. Les guitares sont lourdes et saturées, le rythme puissant et lourd se teinte de groove, le refrain, le titre est chanté encore et encore sur fond de tambour de marche et d'orgue aux sonorités autant d'église que seventies. Ce qui frappe encore une fois, c'est que le chant de Papa Emeritus II est relativement doux.
Un orgue, presque de barbarie, ouvre « Secular Haze ». Un morceau à la fois lourd et enlevé, forgé aux flammes de l'enfer, avec un refrain tellement aérien que ça en est paradoxal, tant il l'est. C'est aussi le premier single tiré de l'abum.
On commence à perdre son latin avec « Jigolo Har Meggido ». Le rythme y est presque sautillant, la mélodie vocale du refrain lorgne vers la Pop, même avec des guitares saturées. Le mal est fait, on est possédé.
« Ghuleh Zombie Queen » ralentit encore plus le rythme, c'est quasiment une ballade, avant qu'il ne reparte de plus belle.
Après cette épopée putride de plus de 7 minutes, retour aux choeurs pour la présentation de quelques anges déchus. C'est l'énorme « Year Zero », et son fameux clip dans lequel les Nameless Ghouls nous montrent leur nichons et Papa Emeritus II son sexe. Aux choeurs succède une voix qui pourrait être celle d'un fantôme, au moins l'idée qu'on peut s'en faire. La mélodie est de plus en plus entêtante, surtout après le passage instrumental et le retour de l'orgue. C'est sombre, et c'est bon.
Après une intro à grands coups de gratte, « Body And Blood » offre une facette très mélodique de la musique de GHOST ; Alice Cooper aurait pu chanter ce morceau taillé pour la radio, avec son refrain Pop et chargé aux hand-claps, sans oublier un passage bien Heavy qui annonce un solo avec des guitares. Incroyable!
Dans « Idolatrine », le refrain est encore plus Pop et les guitares encore plus Heavy, Ce bon vieil Alice rode encore dans le coin.
« Depth Of Satan's Eyes » a un goût de MERCYFUL FATE. C'est Heavy, mid-tempo, sans doute le morceau le moins surprenant, à part ce son de clavier étrange qui surgit comme un diable de sa boîte. Moins surprenant, mais très efficace.
L'envoi de cette messe noire débute par une voix presque murmurée sur fond d'orgue, avant que Papa Emeritus II ne pousse un cri murmuré (oui, c'est bizarre), qui lance le morceau. Les mélodies vocales pénètrent le cerveau et ne sont pas près d'en sortir, magnifiées par des choeurs qui accentuent la tonalité seventies de « Monstrance Clock ». On nous invite à chanter pour accueillir le fils de Lucifer. Surtout à la fin, avec à nouveau de magnifiques choeurs. Encore quelque chose qu'on va fredonner longtemps.

Alors ? Avec « Infestissumam », GHOST frappe très fort. La musique, sur laquelle on ne pourrait certainement pas parler de bière et de femmes à poil, est tout bonnement épatante. Les paroles dégoulinante d'occultisme viennent la sublimer dans sa noirceur, notamment lorsque certaines mélodies vocales ressemblent à celles de chants religieux ou quand les mots sont en latin.
Et que le groupe ait des fans qui adorent le côté sombre du concept, avec les jolis costumes et tout, et tout, celui qui fait peur aux grenouilles de bénitier et aux chanteurs de Nashville est une très bonne chose, tant la musique de GHOST s'aventure vers l'étrange et peut ouvrir à tant d'autres styles musicaux tout aussi respectables que le Metal.
GHOST serait-il le prochain énorme groupe ? A vérifier dans quelques années, si l'Armageddon nous laisse tranquille.

Blogger : Philippe Dynamo
Au sujet de l'auteur
Philippe Dynamo
C'est rapidement que Phil rencontre la musique... Un album de POLICE pour son dixième anniversaire, un paquet de 45 tours, beaucoup de daube, le début des radios libres. Premier disque acheté : THE CLASH. L'énergie ! C'est le début des années 80, un grand frère qui écoute Gary Moore, JUDAS PRIEST, DEEP PURPLE et LED ZEPPELIN et ses potes AC/DC et TRUST... Ses propres amis naviguent sur les Stray Cats, VAN HALNE et IRON MAIDEN... Sa prof' de musique au collège s'arrache les cheveux quand il lui amène BLACKFOOT, SCORPIONS, JOURNEY ou NAZARETH pour écouter en cours... 1983, « Wango Tango » tous les vendredis, premier concert avec DEF LEPPARD, grosse baffe ! Une veste de treillis avec DIO dans le dos, un tee-shirt d'IRON MAIDEN, une veste en jean avec le logo de MOTÖRHEAD en garniture. Tous les mois, la presse : Rock & Folk, Best, puis Enfer Magazine, Metal Attack et Hard Force... Depuis, un tas de concerts, des festivals, d'abord de hard rock, puis de plein d'autres genres. Les cheveux tombent, le bide pousse, mais la flamme brille encore et toujours. Devenu journaliste pour dire autre chose que "j'adore ce que vous faites" aux artistes qu'il aime rencontrer. Partager avec eux des moments privilégiés, et d'essayer d'en rendre compte.
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