12 juin 2014, 19:04

NIGHTMARE : Franck Milleliri et Yves Campion

Vous les applaudirez sûrement dans une semaine au Hellfest Open Air Festival, nous sommes parvenus à intercepter Frank Milleliri et Yves Campion du légendaire groupe français NIGHTMARE à l'occasion de la sortie de leur 9ème album studio : "The Aftermath". Entretien dans un grand café parisien, à domicile !


Les premières critiques de "The Aftermath" sont vraiment bonnes, l’avis de la presse en général est-il important pour vous ?
Yves : Oui carrément. Nous sommes en totale immersion dans l’album, on n’a pas le recul nécessaire et justement des fois on se fait des fausses idées, très bonnes ou très mauvaises. Des morceaux qu’on pensait moyens chez nous sont les préférés de la presse. On a déjà fait une dizaine d’interviews à l’étranger, et nous avons une bonne vision de ce qui se passe en France, et l’impression que j’ai c’est qu’on a un meilleur retour en termes de chronique sur cet album que sur "The Burden of God", je ne sais pas ce que tu en penses ?
Franck : Oui, aussi par rapport aux retours, les chroniques élogieuses c’est clair que ça fait plaisir, après toutes les critiques sont bonnes à prendre, c’est intéressant de voir ce qui pêche. Je reviens sur l’album "The Burden of God", nous avons fait un constat 2 mois après sa sortie et cela a été confirmé tout de suite, au niveau de la production par exemple, c’est un testeur assez fiable. Ce sont des professionnels de la musique qui en parlent, sans oublier les forums. Après il y a des chroniques plus ou moins fondées, alors soit tu y attaches de l’importance en te disant "je lui mettrais bien mon poing dans la gueule", soit…

C’est pour cela que je parlais des médias en général…
Franck : Oui mais après tu ne peux pas non plus mettre 1/20 à un album, il y a quand même des limites. Mais là on voit les retours et on a le sentiment d’avoir franchi une étape.
Yves : On est vraiment surpris.

A l’écoute de "The Aftermath" on sent une rage accrue par rapport au précédent album, d’où est venue cette volonté ?
Franck : Cette volonté à toujours été là depuis "Genetic Disorder". Mes influences ne sont pas du tout heavy à la HELLOWEEN, je suis plutôt death, thrash et black. Bien sur j’écoute du heavy mais CORONER, EMPEROR et DISSECTION c’est plus mon truc. Après je suis conscient qu’on ne va pas jouer ça dans NIGHTMARE, cela n'aurait ni queue ni tête. Yves lui est dans la musique 24/24 toute l’année, il a quand même une bonne tolérance. Il est comme moi, il peut apprécier EMPEROR et SAXON. Moi ce qui me saoulait c’était l’image du groupe des années 80 qui chante en français, moins maintenant mais même moi j’avais cette image avant d’y rentrer, le groupe avec des refrains juste un poil plus rentre dedans que TELEPHONE !
Yves : C’était un peu plus rentre dedans quand même…
Franck : Oui J’exagère, on avait la volonté de mettre les riffs de guitare en avant, et là nous n'avons peut-être jamais autant réussi.

Toujours sur votre dernier album, il y a deux invités : David Boutarin et Jonathan Menard, quels ont été leur rôle respectif ?
Yves : David est un pote, on le connait depuis un petit moment, il nous a déjà aidé en tant que backliner, il a été remplaçant guitare lors d’une tournée sur quelques dates. Il est aussi très bon chanteur en voix death metal dans THE SEVEN GATES, enfin ex SEVEN GATES, il chante avec FMR. On a toujours été fans de mettre du growl de temps en temps donc par rapport à lui, c’était naturel. Et Jonathan, il nous a fait un super boulot sur l’album précédent, c’est un arrangeur de talent dans VELOCE HYSTORIA, c’est quelqu’un de vachement influencé prog, lui il ne va pas juste mettre une plage de clavier pour mettre une atmosphère. Il y a de tout là-dedans, du violon, du cuivre. Ce n’est pas juste de l’arrangement, c’est super sous mixé comme on l’a voulu, si tu coupes la musique et que tu laisses juste le clavier, c’est "Carmina Burana" !
Franck : Il a eu carte blanche pour le coup, on lui fait entièrement confiance. Bon, des fois il va très loin car lui c’est le prog, mais toujours avec talent.


 

"On n'est pas dans le côté eau de rose, ni dans celui sex, drugs and rock'n'roll." - Yves Campion


C’est Mario de EMERGENCY GATE qui s’est occupé de la production, un petit mot sur votre partenariat ?
Yves : C’est lui qui avait fait notre son au Metal Camp, c’est un super ingé son live. Comme on voulait retourner dans l’esprit qu’on avait lorsqu’on a enregistré "Insurrection", Mario c’était un super tuyau et surtout on appréciait énormément le type de prod de son groupe EMEGENCY GATE, c’est pas le même type de musique que nous mais il y a cette forme d’agression qui est vraiment présente. Du coup on en a profité pour lui demander et il nous a beaucoup aidés. Il était vraiment à fond derrière nous, c’est lui qui nous a aussi trouvé le plan de la tournée Wacken. Il a été très impliqué et d’un simple contact au Metal Camp il est devenu producteur du groupe et ça c’est cool.

Comment vous organisez vous pour composer les textes et quelles sont vos principales sources d’inspiration ?
Yves : C'est plutôt moi qui écrit les textes, on en fait certains avec Jo. On est toujours en phase quand on travail là-dessus car même si il ne les a pas écrits, il n’est pas question qu’il chante des textes qu’il ne ressent pas. On a toujours eu des sujets assez forts, qui collent avec l'image de la musique. Nos sujets sont très darks, même influencés black metal : les titres "The Preacher" ou "The Gospel of Judas" de l’album précédent étaient dans cette veine, "Necromancer" s'en rapproche sur cet album. On a toujours été sur des sujets comme l'endoctrinement par rapport aux religions, un morceau comme "Mission for God" veut dire ce qu’il veut dire. Le titre "Bringers of a No Man's Land" représente le pouvoir qui nous emmène nulle part, et à la fin il y a le coup de fusil, c'est-à-dire que l’avidité du pouvoir ne nous laisse qu'un seul résultat, c'est une balle dans la tête. C’est ce qu’on vit, si tu regardes les infos, les gens qui ont le pouvoir nous emmènent dans un no man's land. On n'est pas dans le côté eau de rose, ni dans celui sex, drugs and rock'n'roll.
Franck : C’est très pessimiste, on n’est pas dans le registre EDGUY ni HELLOWEEN. Moi je vois ça comme des nouvelles, pas comme celles de Stephen King mais il y a une dimension un peu mystique et fantastique. Le sniper qui rentre de la guerre après quelques mois, qui est complètement déconnecté et qui bute tout le monde en ville c’est quelque chose qui arrive vraiment, des filles qui se font enlever, des mineurs qui crèvent… la source d’inspiration n’est pas loin mais pas de message politique, c’est sûr et certain, des petits piques sont lancés mais ils sont cachés et peuvent être interprétés.
Yves : Ça peut aussi être un thème simple, imagé, mais raconté avec des mots très forts comme par exemple une rupture amoureuse. J’adorais un groupe comme CRIMSON GLORY qui faisait ça. Il y a un morceau sur notre album qui s’appelle "The Bridge Is Burning", la distance entre deux relations qui fait que le pont brûle tout le temps, ce n’est même pas personnel mais ça peut être interprété de plein de façons différentes.
 


 

"Pour nous ça ne marche pas en France, et l’évolution est très lente." - Franck Millerili


La pochette est très mystérieuse, très paisible, quelle est sa symbolique ?
Franck : Pour la petite histoire, la pochette est un montage que j’avais fait il y a un petit moment,  au moins 3 ou 4 ans, et a chaque fois que je la proposais on me disait que ça faisait trop black metal ou ANATHEMA. Là du coup c’est passé, ça collait avec le moment, avec la musique, avec les thèmes abordés. Pour trouver une explication à la pochette, on pourrait peut être dire qu’il y a toujours plusieurs façons de voir les choses : Il y a le monde réel avec l’arbre et dans le reflet il se passe autre chose, où est la réalité, où est l’imaginaire ? Cela peut aller très loin. On voulait sortir du personnage à la MAIDEN, sur chacune de nos pochettes on a un personnage en dessin, là c’est de la photo avec du montage.

Cet été vous allez jouer pour la 4ème fois au Wacken, à la fin de cette année la majorité de vos dates seront outre-Rhin, votre label actuel est AFM Records, bref c’est une vraie histoire d’amour avec l’Allemagne ?
Franck : C’est un constat oui. En France on ne joue pas le style qui est le plus apprécié. Le heavy n’est pas ce qu’il y a plus de sexy ici, moi-même j’en écoute très peu même si j’adore ça. Aussi, beaucoup ont encore l’image du groupe vieillot qui chante en Français, tu peux voir ceux pendant les festivals qui se moquent des groupes de heavy et nous même nous y avons le droit. En France c’est peut être un peu plus brutal, le death, le black, la musique extrême marche bien et s’exporte bien. L’Allemagne c’est plus notre créneau, en France on joue au Hellfest à 11h00, au Wacken on joue à 22h00 ! Il y a un schisme. Mais bon ce n’est pas un choix, je préférais avoir plus de succès en France. La question avait été posée à Ben Barbaud "pourquoi les groupes français ne sont pas mieux placés ?" et sa réponse, qui est sincère et sensée, c’est que les gens s’en foutent. Les Français ont besoin d’exotisme, dès qu’on dit qu’un groupe vient des Etats-Unis tout de suite ça fait plus gros, mais ça tend à changer avec des groupes comme GOJIRA, DAGOBA, OTARGOS, ça c’est l’évolution depuis 10 ans et on commence à être pris au sérieux et même à l’étranger, j’ai bon espoir. Pour nous ça ne marche pas en France et l’évolution est très lente. On a des fans très fans et d’autres qui nous détestent, de toute façon à partir du moment où tu n’aimes pas le chant heavy ce n’est plus la peine de débattre, on n’y prête pas attention, on propose une musique et ça plait ou ça ne plait pas, nous n’avons aucun pouvoir. Donc quand on nous propose de jouer en Allemagne et quand tu vois l’accueil qu’on a, ce serait suicidaire de refuser. Aussi plus ça va, moins la nouvelle génération connait NIGHTMARE, on a joué à Paris au Trabendo avec SABATON et à mon avis il y avait à peine 300 personnes. Le heavy peut être que ça reviendra mais au moins dans l’extrême, il y a des groupes qui se bougent le cul et qui font avancer les choses.

Vous allez bientôt fêter vos 35 ans de carrière, un évènement spécial est-il prévu ?
Franck : On avait déjà sorti le DVD "One Night Of Insurrection", mais moi je suis moyennement satisfait de la qualité, de l’image et de l’ambiance un peu trop froide que nous avions un peu corrigée en studio. On n’avait jamais fait de DVD auparavant et on l’a fait. Maintenant on est vraiment dans l’idée de retracer la carrière, l’histoire de NIGHTMARE. Ca va prendre du temps. Il y a des heures et des heures de dérushage sur plein de supports, VHS et même des hiéroglyphes. On a vraiment envie de faire ça et de faire ça bien, en recontactant du monde et montrer toutes les personnes qui ont participées à l’aventure, genre SABATON, AFTER FOREVER, SAXON et pourquoi pas DEF LEPPARD. Mais là concrètement pour les 35 ans c’est grillé, on a tellement de choses à préparer qu’on va se concentrer sur les dates à venir et la sortie de l’album.

Blogger : Jérôme Graëffly
Au sujet de l'auteur
Jérôme Graëffly
Nourri dès son plus jeune âge de presse musicale, dont l’incontournable HARD FORCE, le fabuleux destin de Jérôme a voulu qu’un jour son chemin croise celui de l'équipe du célèbre magazine. Après une expérience dans un précédent webzine, et toujours plus avide de nouveautés, lorsqu’on lui propose d’intégrer l’équipe en 2011, sa réponse ne se fait pas attendre. Depuis, le monde impitoyable des bloggers n’a plus aucun secret pour lui, ni les 50 nuances de metal.
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