7 décembre 2017, 22:47

TYLER BRYANT & THE SHAKEDOWN

• Interview & documents vidéo inédits

C'est une entorse au réglement du sectarisme que nous nous permettons aujourd'hui encore.
De metal, il n'en est absolument pas question.
Nous nous sommes penchés sur le cas Tyler Bryant, entouré de THE SHAKEDOWN, parce qu'il est à la fois une anomalie et un espoir.
Une anomalie, parce qu'on se demande bien comment un jeune de 26 ans a pu tomber au tournant du siècle et du millénaire dans la marmite du blues et du classic hard rock alors que ceux de sa génération rêvaient au même moment de tout, sauf de musique ancestrale.
Et comme le blues est la racine même de cette musique électrique que nous adorons, Tyler et ses comparses jettent un pont entre les époques et le rafraîchissent avec la fougue et la jeunesse qui les caractérisent.
Un espoir ensuite, parce qu'à l'ère du tout digital, de l'omniprésence électronique et des artistes auto-tunés, ce groupe est porteur d'un flambeau : celui d'une musique par essence organique qui ne trichera jamais.
La relève est là. TYLER BRYANT & THE SHAKEDOWN incarnerait-il un salut pour le rock dans les années à venir ?
(Christian Lamet)​

Nous avons rencontré le groupe trois fois en un an. Alors qu'il venait de jouer avec AC/DC au Stade Vélodrome, nous l'avions croisé dans l'intimiste salle parisienne de la Boule Noire. Vous retrouverez notre reportage vidéo à la fin de cet article avec de nombreux extraits de son soundcheck et une interview revenant sur les étapes importantes de cette carrière déjà bien remplie.
Ces dernières semaines, nous avons retrouvé Tyler Bryant et Caleb Crosby un soir dans Paris. Ils nous ont offert ce premier beau cadeau en guise d'introduction d'une soirée passée ensuite à dîner avec eux au Dr. Feelgood Les Halles... Une reprise de "That's All Right (Mama)" sur le parvis du Centre Pompidou.
Et on peut dire que les sudistes savent réchauffer l'ambiance la plus hivernale...

 


Après cette introduction dont nous gardons inédit un autre document pour une fois prochaine, nous voici attablés au Dr. Feelgood.
S'ensuit une discussion à bâtons rompus et notamment à propos de cette rencontre magique entre Tyler et un homme qui a totalement bouleversé sa vie.
Interview par Jean-Charles Desgroux

Tyler Bryant : J’ai rencontré cet homme, Roosevelt Twitty, lorsque j’avais onze ans. Il m’a pris sous son aile et m’a enseigné le blues. Il m’a fait écouter des disques de Lightnin’ Hopkins et John Lee Hooker et m’a montré qui était BB King. Il est devenu mon meilleur ami, il venait même me chercher à l’école. Il voulait me montrer sa passion pour cette musique ; mais c’est aussi ce genre de moments qui te font croire en une forme de puissance supérieure. Tu vois, le racisme était encore bien présent dans cette petite ville, mais j’ai pu observer que son amour de partager sa musique était au-dessus de tout ça. J’ai son nom tatoué ici sur mon avant-bras : je peux le voir à chaque fois que je joue, et ça me rappelle que la musique est bien plus importante que vendre des disques et de rechercher un quelconque succès.

Le fait qu'un musicien de blues, noir, s'intéresse à un jeune blanc qui ne connaît rien alors en musique mais qui s'en passionne soudainement, c'est tout de même incroyable. Qu'attendait-il de toi ?
Tyler Bryant : Je ne crois pas que Roosevelt Twitty recherchait une quelconque récompense. La gentillesse qu’il pouvait montrer aux gens… il allait à son tour être récompensé par leurs réactions. La joie que je pouvais exprimer lorsque je maîtrisais un nouveau plan à la guitare, ou lorsque j’apprenais « Highway » de Freddie King : ça, c’était plus qu’une récompense pour lui. J’ai été si chanceux de pouvoir vivre une telle expérience… C’est cool de pouvoir jouer au Stade de France, mais les choses peuvent être bien plus profondes que ça. Sentir de telles racines peuvent faire du bien dans la vie des gens. Si tu restes authentique, si tu gardes cette intégrité et si tu te concentres sur ce qui est important, pendant ce temps tout le reste n’est que du business. Alors, il faut effectivement trouver le bon équilibre. C’est aussi pourquoi j’ai répondu à 21 interviews aujourd’hui…. sinon je serais resté chez moi à jouer de la guitare !

Le blues est pourtant associé par ses origines à l'oppression, à une situation de souffrance ou de tristesse... Quand on te voit, tu as l'air d'être foncièrement heureux.
Tyler Bryant : Il y a tant de malentendus à propos du blues : ce n’est pas que négatif ! Il peut aussi être très joyeux, et c’est à ça que je faisais allusion. J’ai toujours le coeur brisé, je ressens toujours la perte de Roosevelt depuis qu’il est parti et je ressens toujours ce deuil… mais je ne sais pas si l’âge ou la couleur de la peau ont vraiment quelque chose à voir. J’ai juste le sentiment que le blues, tu le ressens ou pas ! Et si ce n’est pas le cas, tu devrais te tâter le pouls !
Caleb Crosby : Roosevelt Twitty était vraiment un mec très spécial. J’ai eu l’occasion de le rencontrer plusieurs fois, aux tout premiers jours du groupe, mais il y avait vraiment quelque chose autour de lui. C'était un peu comme un... ange, tu vois ? Il était plutôt comme un mentor, quelqu’un qui a aidé Tyler à trouver et à ressentir une passion derrière tout ça. Il n’était qu’un gamin et il ne pouvait pas expérimenter tout ce truc ; mais il n’y a pas besoin de le vivre pour pouvoir le ressentir : la musique te fait le ressentir. Et je crois que Tyler possédait alors cette âme qui lui a permis de le ressentir.

Avant de partir pour Nashville (Tennessee), en quoi l’environnement du Texas a contribué à forger le Tyler Bryant que nous connaissons désormais ?
Tyler Bryant : Je crois que cela m’a endurci, m’a rendu tenace, je ne sais pas… J’aime le blues et tu le trouves à même l’eau là-bas ! Tout comme le rock ! J’ai grandi entouré de super musiciens, et je crois bien qu’il s’agit-là du plus beau cadeau qu’un gamin puisse recevoir !


Moins de deux semaines après cette interview, le groupe est sur scène à la Maroquinerie. Après le Divan du Monde, la Boule Noire, les premières parties de GUNS N' ROSES et AC/DC, de concert en concert, par le bouche à oreille, le public français est toujours plus au rendez-vous.
TYLER BRYANT & THE SHAKEDOWN nous fait l'amitié de pouvoir capturer un instant magique à la fin de son set qui vous permettra de réaliser avec quelle authenticité ces musiciens communient avec leur audience.

 


Quelle situation est la plus excitante : jouer devant votre public dans un club ou bien monter sur scène dans un stade face à un public qui ne vous connaît pas et ne vient pas pour vous ? 
Tyler Bryant
 : L’un te donne envie et l’autre te comble ! Mais les deux sont très agréables : c’est dur de choisir lequel tu préfères. Il faut bosser pour pouvoir gagner de nouveaux fans, mais c’est aussi cool de voir ce que tu en as déjà gagnés en travaillant dur. Je pense que c’est vraiment satisfaisant de pouvoir combiner les deux - et il faut continuer à avoir cette envie, cette faim.
Caleb Crosby : Oui, c’est un challenge : pouvoir se confronter à un public qui ne nous connait pas, et lorsqu’on reviendra plus tard, grâce à une dynamique positive, des gens pourront à leur tour venir nous voir jouer dans des clubs ! Par exemple, à Londres, nous avons joué dans un stade, enchainé sur un jour de repos, puis sur une date dans un club : et là, des gens sont venus nous voir en nous disant qu’ils venaient tout juste de nous découvrir avec GUNS N' ROSES ! C’est difficile d'avoir une préférence parce que sont des sensations différentes. Les gens viennent dans un stade et peuvent très bien n'avoir aucune attention pour toi. Nous, on livre notre show comme si c’était plein, même si ce n’est rempli qu’à 25%. On fait ce que l’on a à faire. Notre objectif, c’est bien d’atteindre non pas les quelques poignées de personnes présentes tout devant, mais bien la toute dernière personne au fond, tu vois ce que je veux dire ? Et au moins pendant une seconde, elle se retourne, voit notre logo et se dit : « oh, mais ils ne sont pas si mauvais ». On ne peut pas vraiment faire attention aux chiffres, ni au nombre de gens que l’on touche aujourd’hui. Je vais te dire : avec GUNS, ce qui nous a vraiment aidés, c’est qu’ils avaient des caméras sur nous et lorsqu’il y avait des gros plans, cela créait davantage d’intimité avec ceux qui étaient loin. Tandis qu’avec AC/DC, on n’avait pas ce dispositif. Alors, certes, on avait moins de temps sur scène avant GUNS, mais au moins, les gens pouvaient nous voir... et pas minuscules comme des fourmis.


Découvrez ou redécouvrez notre premier reportage vidéo avec le groupe en 2016...
 

Blogger : Jean-Charles Desgroux
Au sujet de l'auteur
Jean-Charles Desgroux
Jean-Charles Desgroux est né en 1975 et a découvert le hard rock début 1989 : son destin a alors pris une tangente radicale. Méprisant le monde adulte depuis, il conserve précieusement son enthousiasme et sa passion en restant un fan, et surtout en en faisant son vrai métier : en 2002, il intègre la rédaction de Rock Sound, devient pigiste, et ne s’arrêtera plus jamais. X-Rock, Rock One, Crossroads, Plugged, Myrock, Rolling Stone ou encore Rock&Folk recueillent tous les mois ses chroniques, interviews ou reportages. Mais la presse ne suffit pas : il publie la seule biographie française consacrée à Ozzy Osbourne en 2007, enchaîne ensuite celles sur Alice Cooper, Iggy Pop, et dresse de copieuses anthologies sur le Hair Metal et le Stoner aux éditions Le Mot et le Reste. Depuis 2014, il est un collaborateur régulier à HARD FORCE, son journal d’enfance (!), et élargit sa collaboration à sa petite soeur radiophonique, HEAVY1, où il reste journaliste, animateur, et programmateur sous le nom de Jesse.
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