20 septembre 2024, 18:27

MATRASS

Interview


Les quatre membres de MATRASS, privés de leur batteur blessé, ont répondu à nos questions dans leur loge avant de se produire au SLB Fest, superbe festival rock, familial et gratuit qui se tient à Saint-Laurent-Blangy (62). En grignotant qui des chips, qui des bâtonnets de carotte, les Bordelais ont joué le jeu en toute décontraction. Découverte de ce groupe qui vient de sortir « Cathedrals », un excellent premier album de post-rock/post-metal où brillent colère et rage, émotions et nostalgie.
 

D’où vient le nom de MATRASS ?
Victor : c’est un projectile d’arbalète, très lourd, capable de casser les armures et les os. Ce nom a été long à trouver. Il est venu après quelques mois de répétitions. Nous avons pensé que ça nous correspondait et nous avons juste rajouter un second s. Même avec les changements dans le groupe nous n’avons jamais pensé à le modifier...
Corentin : on s’est un peu interrogé...
Victor : pas vraiment, si ?
Corentin : c’est vrai...

Quel a été l’événement marquant dans la vie du groupe ?
Victor : sans doute quand le groupe s’est formé sous sa forme actuelle. Avant, nous étions plutôt une bande de copains. Nous répétions, faisions quelques concerts mais, avec l’arrivée de Corentin (basse), Clémentine (chant/saxo), Simon (guitare) et Baptiste (batterie), nous sommes passés à quelque chose de plus sérieux. Nous voulions travailler avec des gens sérieux, désireux de s’investir. Ces changements nous ont aussi fait passer d’un style très groove, très fusion, que l’on peut entendre sur notre EP « Inner Wars » en 2022, à une orientation plus post-metal.
Simon : les compositions étaient alors surtout celles de Victor...

Engager une chanteuse était-il délibéré ?
Simon : nous avions la volonté de changer de chanteur, nous voulions une nouvelle voix. Nous avons auditionné une douzaine de candidats mais dès que j’ai entendu Clémentine, j’ai eu des frissons. Il se peut qu’avoir une femme au chant, c’est vrai, nous donne de nouvelles possibilités. Surtout, Clémentine est une personne sérieuse, ambitieuse, motivée... Elle est ouverte stylistiquement ce qui nous permet d’avoir un spectre vocal élargi, de passer du lourd à l’atmosphérique.


Accomplis-tu un travail particulier pour utiliser ainsi différents types de chant ?
Clémentine : j’adore les passages parlés du post-hardcore mais j’ai aussi des influences jazz. Je prends des cours pour les screams, pour élargir ma palette et prendre soin de ma voix. J’apprécie que les ''emotional screams'', comme ceux de Camille Contreras dans NOVELISTS, soient désormais assumés. Les chanteuses dans le metal ne sont plus obligées d’avoir des voix ultra graves.

« Cathedrals » est sorti en mai. Comment a-t-il été accueilli ?
Victor : il a été bien accueilli par le public et la presse. De notre côté, nous étions ravis de sortir un disque qui nous ressemble vraiment. Il est sorti très vite après l’arrivée de Baptiste.
Clémentine : nous avons eu aussi des chroniques à l’étranger et c’était intéressant d’avoir ce ressenti, ce feedback. Certaines remarques qui nous ont été faites nous ont donné des idées.

L’artwork est très réussi...
Simon : il y a bien sûr l’idée de cathédrale, avec ce bâtiment rocheux. J’avais des idées précises sur les couleurs – avec cet ocre glissant vers le marron – et la texture. Nous en avons discuté un soir avec Pierre Stéger, le graphiste... et le résultat, est conforme à ce que j’avais en tête.
Clémentine : l’artwork, qui s’ouvre en trois volets, est conforme aux thèmes que nous abordons, cette descente dans son intériorité, au fond de soi pour rouvrir des chapitres de notre vie que nous n’avons pas encore résolus. C’est comme se jeter à l’eau, sortir de sa zone de confort. C’est remettre à la surface ce qui restait enfoui. Sans que nous lui donnions beaucoup d’éléments, Pierre a exprimé ce que nous voulions.

Votre album est comme coupé en deux par "Adrift", un titre instrumental...
Clémentine : comme pour nos autres morceaux j’avais écrit un texte pour ce titre. Mais quant nous l’avons essayé avec le chant, un truc ne sonnait pas...
Corentin : c’était délicat de dire ça à Clémentine...
Clémentine : mais c’est vrai, il prend une autre dimension ainsi.
Victor : en live, nous enchaînons nos deux morceaux instrumentaux pour créer un moment plus intimiste.

Et comme ça, tu peux te reposer, Clémentine...
Clémentine : Ah non, sur le second, je joue du saxophone.

Vous avez tourné un clip pour la chanson "Cathedrals". Est-ce désormais une nécessité ?
Simon : même si c’est un peu se tirer une balle dans le pied que de dire ça, il faut des clips pour diffuser sur les réseaux... même si le nôtre dure huit minutes.
Clémentine : comme il monte en puissance, comme il s’accélère, le spectateur, nous l’espérons, reste dedans.
Simon : Cette vidéo est un prolongement de notre démarche artistique ; elle renforce notre identité.


Vous accordez un soin particulier aux lumières dans vos prestations...
Clémentine : Olivier Henchley, notre technicien lumière, nous suit depuis nos débuts. Il accomplit un gros travail sur les couleurs, ce qui est important dans le post-metal, où les variations d’ambiances sont nombreuses. L’expérience s’en trouve améliorée, surtout quand les lumières s’accordent avec les moments les plus introspectifs.

Avez-vous des souvenirs de concerts particulièrement marquants ?
Clémentine : déjà hier à Orléans, comme ce soir d’ailleurs, nous jouons sans notre batteur... ce qui nous montre à quel point on l’aime !
Victor : il y a aussi notre première fois à Paris, à la Péniche Antipode.
Clémentine : pour moi qui suis parisienne, c’était vraiment très spécial.
Victor : quand nous jouons chez nous à Bordeaux... ou quand nous sommes allés au Pays Basque, pour notre première date à l’étranger avec un public espagnol incroyable...
Simon : pas espagnol, basque !
Clémentine : et aussi le Festival 666 et sa scène de 100m2.

Et des rêves ?
Corentin : le Hellfest !
Clémentine : t’es sûr ? Oh, non, un truc moins "propre", comme le ArtTanGent à Bristol, non ?
Corentin : eh, à chacun ses rêves !
Victor : tout simplement tourner en France et en Europe, dans de bonnes conditions. Ou une tournée avec ARO.ORA et VESTIGE avec qui nous nous sommes bien entendu musicalement et humainement. C’est un plateau qui fonctionne.

Auriez-vous des groupes bordelais à conseiller ?
Victor : FHORCE, un groupe de hardcore metal que j’ai créé avec Corentin voilà un an ; c’est de l’auto-promo !
Simon : Il y a une belle scène à Bordeaux. Je peux citer THEOREM, ALTESIA ou KIBOSH.
Clémentine : avec Corentin, nous allons voir beaucoup de concerts. Il y a ainsi WHILE OCEANS BURN, un groupe qui se bouge.
Facebook.com/matrasstheband


Nos remerciements à l'équipe du SLB Fest d'avoir rendu cet entretien possible.

 

Blogger : Christophe Grès
Au sujet de l'auteur
Christophe Grès
Christophe a plongé dans l’univers du hard rock et du metal à la fin de l’adolescence, au tout début des années 90, avec Guns N’ Roses, Iron Maiden – des heures passées à écouter "Live after Death", les yeux plongés dans la mythique illustration du disque ! – et Motörhead. Très vite, cette musique devient une passion de plus en plus envahissante… Une multitude de nouveaux groupes a envahi sa vie, d’Obituary à Dark Throne en passant par Loudblast, Immortal, Paradise Lost... Les Grands Anciens – Black Sabbath, Led Zep, Deep Purple… – sont devenus ses références, comme de sages grands-pères, quand de jeunes furieux sont devenus les rejetons turbulents de la famille. Adorant écrire, il a créé et mené le fanzine A Rebours durant quelques années. Collectionneur dans l’âme, il accumule les set-lists, les vinyles, les CDs, les flyers… au grand désarroi de sa compagne, rétive à l’art métallique.
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