17 septembre 2021, 13:36

GUNS N' ROSES

"Use Your Illusion I & II" (1991 - Rétro-chronique)

Album : Use Your Illusion I Album : Use Your Illusion II

Que n’a-t-il pas déjà été dit sur les classiques parmi les classiques que sont les deux volumes de « Use Your Illusion », sortis conjointement par GUNS N' ROSES le 17 septembre 1991 ? Que ne sait-on pas sur ces albums qui ont ancré la formation californienne dans la légende ? Pas ou peu de choses il faut bien le reconnaître et faut-il encore aller farfouiller comme il le faut afin de dénicher quelques maigres informations qui n’apporteraient probablement plus grand-chose en terme de pertinence. Il est donc plutôt question de rappeler et compiler dans cette rétro-chronique quelques faits et impressions sur le contenu roboratif de ces deux disques, comprenant au total 30 morceaux qui, initialement, avaient été envisagés sous la forme d’un coffret de trois ou quatre disques. Des chansons qui, dans une large majorité font office de tables de loi et vénérées aussi bien par leurs fans que par les professionnels, musiciens et critiques de la profession. On se félicitera enfin du choix sur lequel ils se sont arrêtés pour le nom que l’on connaît, alors que "Gn'R Sucks", "Girth" ou même "Buy Product" étaient sur la liste d’intitulés potentiels.

Quatre ans c’est long et c’est le laps de temps qui s’est écoulé depuis 1987 et la parution du premier album des GUNS N' ROSES, « Appetite For Destruction ». Bien sûr, le groupe n’a pas chômé et en a profité pour se droguer à outrance, alimenter la presse à scandales de frasques en tous genres et dilapider une large partie de son pognon. Mais pas que. Bien évidemment ce trait d’humour corrosif (qui n’en demeure pas moins très proche de la réalité) ne doit pas taire la machine live qu’était le groupe à ce moment. Ils ont joué partout, se sont produits lors de l’édition 1988 du festival Monsters Of Rock en Angleterre – où deux fans trouveront la mort durant leur prestation, ce qui entachera le souvenir de cette performance – et sont même partis sur la route en compagnie d’IRON MAIDEN, un chemin chaotique rehaussé de relations houleuses, déjà dues au comportement du chanteur Axl Rose, peu compatible avec le sérieux tout british qu’accorde La Vierge de Fer aux impératifs d’une telle entreprise, en l’occurrence une tournée de grande envergure et aux enjeux colossaux. N’oublions pas le 2e album studio « G N' R Lies » le disque le plus court du groupe édité cette même année 1988 et qui a fait patienter les fans. Mais revenons-en à l’année 91 et nos deux moutons. La gestation et l’accouchement des morceaux aura pris près de trois ans (avec une année les ayant vus passés par quatre studios différents), les membres du groupe ayant entamé le processus de composition en 1989 quand certaines chansons datent même de quelques années auparavant, à l’instar de "Don’t Cry" et "November Rain", pas encore prêtes selon ce que voulait en faire Axl Rose ou bien incompatibles avec l’ambiance de « Appetite For Destruction ».


​Côté personnel, les fans font connaissance avec un nouveau batteur, Matt Sorum, que l’on a vu joué auparavant avec THE CULT et remplaçant Steven Adler, qui aux dires du groupe est renvoyé en raison de trop importants problèmes d’addictions diverses. Aujourd’hui, on en rigole encore tant d’autres membres du groupe (le bassiste Duff McKagan ou le chapeauté guitariste Slash en tête) y étaient enfoncés jusqu’au cou, visages enfarinés et troués par leurs seringues comme des passoires. Malgré tout, tel un dernier baroud, "Popcorn" comme il était surnommé, est bien crédité comme batteur sur le morceau "Civil War". Nouveau venu également, le claviériste Dizzy Reed, qui s’avérera un véritable pilier sur lequel s’est souvent reposé Axl, n’ayant jamais quitté la formation depuis. Côté compositions, GUNS N' ROSES ne s’interdit rien et s’autorise même tout. Le guitariste Izzy Stradlin écrit quatre titres ("Dust N’ Bones", "You Ain’t The First", "Double Talkin’ Jive" et "14 Years") et se voit proposer de les chanter !? Banco ! Izzy le fait, alors pourquoi pas Duff sur "So Fine" ? A noter que Duff donne également de la voix sur "Civil War" et "Get In The Ring". Débuter les hostilités avec le titre le plus rentre-dedans qu’ils aient dans leur besace, à savoir "Right Next Door To Hell" ? Validé ! Convoquer l’esprit des ROLLING STONES et d’AEROSMITH pour accoucher de "Bad Obsession" ? Ben tiens, on va s’gêner ! Inviter la légende Alice Cooper pour donner de la voix sur "The Garden" ? Allez, zou ! Proposer deux versions de "Don’t Cry" ? Et pourquoi pas tiens ? Totaliser 6 titres qui oscillent entre 7 et 10mn ? Chiche ! Je vous l’ai dit, « Use Your Illusion » n’occulte aucune possibilité et impose ses choix avec fermeté auprès d’un label qui courbe l’échine aux moindres caprices de ses poulains, se foutant bien de ce qu’en penseront les fans. Le chanteur déclarera ensuite au magazine Rolling Stone« nous n’avons pas sorti ces deux albums pour être des rock-stars mais parce que nous voulions en être fiers ».

Une démarche artistique risquée alors que les GUNS ont commencé leur carrière moins de dix ans plus tôt mais un pari réussi avec 7 millions d’exemplaires vendus de chaque volume et ce, rien qu’aux Etats-Unis. Les cinéphiles auront par ailleurs relevé à l’époque au début de "Civil War" un monologue tiré du film Luke La Main Froide (Cool Hand Luke), sorti en 1967 avec, dans le rôle-titre, Paul Newman. Côté ciné toujours, on retrouve sur « Use Your Illusion I & II » deux reprises avec en premier lieu "Live And Let Die", chanson composée par Paul McCartney et sa femme Linda, spécialement commandée pour servir comme musique de générique de l’un des films de la saga James Bond époque Sir Roger Moore, Vivre et Laisser Mourir (Live And Let Die), sorti en 1973. L’autre est un morceau de Bob Dylan, "Knockin’ On Heaven’s Door" qui est devenu l’un des hymnes et incontournables du groupe en live. On ne leur en voudra pas tant elle est réussie, renfermant un double solo magnifique de Slash.

Le son c’est bien mais avec des images c’est encore mieux. Et GUNS N’ ROSES de tourner un clip pour "You Could Be Mine" en compagnie d’Arnold Schwarzenegger car le morceau en question est inclus dans la bande originale de Terminator 2: Le Jugement Dernier. Une vidéo devenue culte pour avoir montré le groupe être pris pour cible en plein concert par l’impitoyable machine qu’est le T-800. Mais saviez-vous que le sujet de la chanson évoque la fin de la relation du guitariste Izzy Stradlin d’avec sa petite amie de l’époque, Angela Nicoletti ? Eh bien, vous êtes désormais au fait. Loin de s’en contenter, le public découvre ensuite "November Rain", un court métrage ayant certes couté les yeux de la tête mais qui reste un clip magnifique et grandiloquent, digne témoin de la mégalomanie s’étant emparée d’Axl à cette époque. Fortement inspirée par Elton John, cette chanson en outre est très personnelle au chanteur, mettant en scène son mariage avec Stephanie Seymour (jouant son propre rôle), puis ses funérailles. Gasp ! Témoins de ce gigantisme, les six autres clips tournés ("Don't Cry (Original Version)", "Yesterdays", "The Garden", "Dead Horse", "Garden Of Eden" et "Estranged") ont été regroupés en 1997 sur la VHS « Welcome To The Videos » qui contient tout ce que le groupe avait alors sorti, de « Appetite For Destruction » à « The Spaghetti Incident ».


Côté technique, le mixage a été confié à Bill Price (connu en premier lieu pour sa contribution aux travaux des SEX PISTOLS, THE CLASH...) après que le groupe ait renvoyé Bob Clearmountain alors que celui-ci avait terminé le travail sur 21 titres. Le hic : la découverte par le groupe d’une note de l’ingénieur indiquant où il avait prévu de remplacer par des samples les parties enregistrées par Matt Sorum. L’illustration des deux volumes, qui ne diffère que de par sa couleur (dominantes jaune et rouge pour le volume 1 et bleue pour le volume 2) est une interprétation de l’œuvre de Raffaello Sanzio da Urbino, plus connu sous le simple nom de Raphaël, et qui s’intitule L’école d’Athènes, une toile datant de la Renaissance peinte entre 1509 et 1511. 30 titres nous disions donc mais il en existe un certain nombre qui ont été écartés comme "Ain't Goin' Down", "Night Crawler", "Bring It Back Home", "Crash Diet", "Sentimental Movie" ou encore "Just Another Sunday", qui ont bien été enregistrés et que l’on peut trouver sur internet en tant que bootleg sous le nom de « Unwanted Illusions ». A vos claviers et moteurs de recherche…

A travail colossal, retours colossaux, surtout avec le statut qu’avait GUNS N' ROSES dans le paysage "metal" d’alors. Et ce sont à ce jour près de 23 millions d’exemplaires qui se sont écoulés dans le monde (environ 12 300 000 pour le volume 1 et 10 560 000 pour le deuxième). Huit singles seront tirés des deux albums, trois pour le premier et cinq pour le second pendant que le groupe était sur les routes du monde entier. Et en parlant de nouveaux musiciens plus haut, exit le guitariste Izzy Stradlin, pote d’enfance d’Axl, et enter Gilby Clarke catapulté dans le plus grand cirque rock du moment et qui fera partie du groupe jusqu’en 1994. C’est donc ce dernier que l’on peut voir dans la double vidéo « Use Your Illusion World Tour - 1992 In Tokyo », un concert capté au Tokyo Dome le 22 février 1992 et proposant 25 titres, dont certains ont été intégrés à l’album live « Live Era '87-'93 », sorti en novembre 1999.

Parmi les nombreux concerts que le groupe a donnés, on se souvient tristement de la date à Montréal le 8 août 1992 lors de la partie de tournée où l’on retrouvait METALLICA en co-tête d’affiche. Après l’accident qu’a subit James Hetfield, les GUNS sont bien entendu montés sur scène avec un retard considérable et alors que la tension au sein du public était plus que palpable, littéralement explosive. Dans les faits, le groupe a attendu son heure prévue d’arrivée en scène et Axl n’a rien trouvé de mieux à faire que de quitter les planches après moins d’une heure de spectacle, provoquant une gigantesque émeute à l’intérieur et aux abords du stade. Les dégâts se chiffreront par centaines de milliers de dollars, une voiture de police renversée, il y aura une dizaine de civils blessés et une douzaine d’arrestations après que la situation ait été maitrisée par plus de 300 policiers et membres de la brigade anti-émeute aient été dépêchés sur les lieux pour mettre fin à ce début de scène de chaos. A cette époque, entre 1991 et 1992 et sans chercher à dédouaner l’attitude du fantasque chanteur, il était en proie à quelques tourments. Comme celui de s’être abimé les cordes vocales quelques jours avant le concert de Montréal ou bien de s’être fait arrêter un peu plus tôt pour les incidents survenus à l’issue du concert de St. Louis le 2 juillet 1991. Ou bien était-ce une exaspération compréhensive à la suite d’une blague de mauvais goût du chanteur de FAITH NO MORE, Mike Patton ? En effet, ce dernier n’avait rien de trouvé de plus amusant un jour que de déféquer dans un gobelet de jus d’orange se trouvant dans le distributeur de boissons personnel d’Axl Rose et de le remettre en place comme si de rien n’était. Cuckoo for caca ?

Remerciements à Laurence Faure.

Pour aller plus loin :
​« Appetite For Destruction » - 1987
« Lies » - 1988
« The Spaghetti Incident » - 1993
« Live Era ’87-‘93 » - 1999
« Chinese Democracy » - 2008




Blogger : Jérôme Sérignac
Au sujet de l'auteur
Jérôme Sérignac
D’IRON MAIDEN (Up The Irons!) à CARCASS, de KING’S X à SLAYER, de LIVING COLOUR à MAYHEM, c’est simple, il n’est pas une chapelle du metal qu'il ne visite, sans compter sur son amour immodéré pour la musique au sens le plus large possible, englobant à 360° la (quasi) totalité des styles existants. Ainsi, il n’est pas rare qu’il pose aussi sur sa platine un disque de THE DOORS, d' ISRAEL VIBRATION, de NTM, de James BROWN, un vieux Jean-Michel JARRE, Elvis PRESLEY, THE EASYBEATS, les SEX PISTOLS, Hubert-Félix THIÉFAINE ou SUPERTRAMP, de WAGNER avec tous les groupes metal susnommés et ce, de la façon la plus aléatoire possible. Il rejoint l’équipe en février 2016, ce qui lui a permis depuis de coucher par écrit ses impressions, son ressenti, bref d’exprimer tout le bien (ou le mal parfois) qu’il éprouve au fil des écoutes d'albums et des concerts qu’il chronique pour HARD FORCE.
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