Le nouveau TESTAMENT est là ! Réjouissons-nous, mes frères et mes sœurs ! Loin de moi l’idée de vouloir donner un caractère œcuménique à cette rubrique, mais une nouvelle livraison des enfants terribles de la Bay Area suffit toujours à emplir mon cœur de grâce. Que voulez-vous, on ne se refait pas ! Quatre ans après « Dark Roots Of Earth », voici donc « Brotherhood Of The Snake », accouché dans la douleur selon les propres dires de Chuck Billy. Passons sur le fumeux concept de l’album, apte à titiller l’imagination de tout bon geek qui se respecte, mais, malheureusement, susceptible aussi de faire passer toute personne censée intéressée par le sujet (les sociétés secrètes) pour un attardé mental, et concentrons-nous sur l’essentiel : la musique.
Une musique passionnante parce que maîtrisée de bout en bout. Certains argueront du fait que Chuck Billy et les siens ne prennent plus assez de risques depuis leur grand retour avec « The Formation Of Damnation » (2008). C’est ignorer, ou du moins feindre d’ignorer, que TESTAMENT, c’est 33 ans au service du thrash le plus échevelé, avec en son sein des musiciens qui feraient pâlir d’envie n’importe quel combo cherchant à se faire une place au soleil dans l’impitoyable monde du metal. TESTAMENT, c’est aussi une pléthore de classiques qui n’ont rien à envier aux « Master Of Puppets », « Bonded By Blood » et autres « Peace Sells… But Who’s Buying ? ».
Dans ces conditions, comment surprendre son auditoire sans trop le décontenancer non plus ? Gageons que le groupe a superbement ignoré cette question pour s’en poser une autre, bien plus ouverte au pragmatisme : comment sortir un album qui plaira au plus grand nombre ? Parce que oui, ce « Brotherhood Of The Snake » plaira à coup sûr à tous les fans, mais aussi à tout amateur de metal cherchant à se délecter d’un disque honnête, carré et intense. Et au diable les quelques grincheux qui regretteront toujours les expérimentations "death" de la fin des années 90 ! Très marqué par l’empreinte d’Eric Peterson, ce nouveau CD de TESTAMENT se veut plus brutal, plus rapide que son prédécesseur, « Dark Roots Of Earth » (2012).
Sans se départir de ses habituels atours mélodiques, la musique de TESTAMENT se fait ici particulièrement véloce mais, et c’est là le tour de force de « Brotherhood Of The Snake », rappelle en de nombreux moments les classiques du groupe que sont « The New Order » (1988) et « Practice What You Preach » (1989). Simplement avec plus de hargne, plus de virtuosité aussi. A quoi cela est-il dû ? Certainement aux musiciens eux-mêmes. Sans manquer de respect à Louie Clemente, il n’y a aucune commune mesure entre le jeu du batteur originel de TESTAMENT et celui de ce monstre qu’est Gene Hoglan ! C’est évident dès les premières secondes du titre éponyme : ce type est une machine ! Alex Skolnick a également énormément progressé en tant que soliste (ses années jazz, sans doute) et certains des soli qu’il signe ici sont de pures merveilles (l’escapade néo-classique de “Neptune’s Spear”, notamment). Qualité d’exécution donc, mais pas seulement.
L’autre point fort de « Brotherhood Of The Snake » est sans nul doute aussi le son, monstrueux, avec un mix faisant particulièrement bien ressortir la basse de Steve DiGiorgio (pas un branque non plus, celui-là !) et apportant un surplus d’impact à des compositions déjà aplatissantes ! De toute évidence, Andy Sneap est dans la place ! Ça joue bien, ça joue vite, ça joue fort, et les nombreux changements de rythme insufflent un réel dynamisme à l’ensemble. J’en veux pour preuve le titre “The Pale King” qui voit une rythmique très thrash “old school” accompagnée par le phrasé rageur de Chuck Billy déboucher sur un pont plus mesuré, sur lequel le colosse Pomo déclame ses paroles en parlant (on jurerait entendre Phil Anselmo !) avant qu’Eric Peterson et Alex Skolnick ne viennent conclure le morceau par des joutes guitaristiques de haute volée ! Ebouriffant !
Un dynamisme également apporté par la variété de titres oscillant entre le mid-tempo (le presque rock "Born In A Rut") et le rapide, voire le très rapide, certaines chansons figurant même parmi les plus véloces jamais écrites par le groupe. C’est le cas de "Stronghold" et de "Centuries Of Suffering", cette dernière allant même jusqu’à fricoter avec le black metal ! Certainement des réminiscences du DRAGONLORD d’Eric Peterson… Les moments forts sont légion (« Normal ! », ne manqueront pas de me rétorquer les fans !) et des pièces maîtresses comme le titre éponyme, "The Pale King", "Stronghold", "Seven Seals" ou "Canna Business" ne tarderont sans doute pas à se frayer une place de choix dans les futures set-lists du groupe.
Bref, encore un album de TESTAMENT qui nous fera regretter que le Big 4 ne comptabilise pas… 5 groupes ! Messieurs de METALLICA, la balle est désormais dans votre camp !