8 mars 2021, 18:34

LE JOUR OÙ...

Ritchie Blackmore a détruit tout son matos sur scène


Il ne fait pas bon contrarier Ritchie Blackmore, comme l'apprendront à leurs dépens les organisateurs du California Jam en 1974, quand DEEP PURPLE Mark III assurera la tête d'affiche de leur festival …

En 1974, DEEP PURPLE figure parmi les plus gros vendeurs d'albums de rock outre-Atlantique. Les Britanniques ont sorti en février « Burn » qui a vu les débuts de David Coverdale et Glenn Hughes, tous deux âgés de 23 ans, respectivement chanteur inconnu et ex-chanteur/bassiste de TRAPEZE, qui ont remplacé Ian Gillan et Roger Glover. Le premier a apporté du blues au hard rock du Pourpre Profond, le second de la soul et du funk et le résultat fait de ce huitième disque un monument du rock et de leur discographie. Précisons au passage, chose suffisamment rare pour être soulignée, que « Burn » se classera 4e du "hit-parade" en France où il sera certifié disque d'or avec plus de 100 000 exemplaires vendus.

Le 6 avril, DEEP PURPLE Mark III se produit en tête d'affiche du California Jam, gigantesque festival qui a lieu sur l'Ontario Speedway, à Ontario en Californie, devant 200 000 spectateurs payants… et à peu près autant qui ont trouvé le moyen de se faufiler sans débourser le moindre dollar. Ce qui en fait malgré tout le festival le plus rentable de l'histoire, dit-on. Il est aussi partiellement retransmis en direct sur la chaîne de télé américaine ABC qui sponsorise l'événement. Sont également à l'affiche, dans le désordre, BLACK SABBATH, BLACK OAK ARKANSAS, les EAGLES, EARTH, WIND & FIRE, EMERSON, LAKE & PALMER, SEALS & CROFTS et RARE EARTH.
 


Pourtant, l'ombrageux Blackmore est le seul membre du groupe qui ne voulait pas participer au California Jam. « J'en avais marre des festivals qui sont toujours soit en retard, soit en avance, dont l'ordre de passage est une aberration et qui sont un vrai bordel backstage et un véritable cauchemar » expliquera-t-il en 2019 à l'occasion d'une interview où il revient sur ce concert mémorable. Six mois plus tôt, quand on leur a proposé d'y jouer en tête d'affiche, il a donc fait figurer dans le contrat des conditions sine qua non qui ont été aussitôt acceptées par le promoteur, les deux principales étant de ne pas monter sur scène avant le coucher du soleil, pour être les premiers à bénéficier du lightshow. 
« C'est subliminal, mais dès que le public voit des lumières, après tous les groupes qui ont joué en plein soleil, ça prend aussitôt une autre dimension » commente-t-il. Et celle de ne pas passer en dernier, la place revenant du coup à EMERSON, LAKE & PALMER, les spectateurs étant soit vidés par une journée de concerts, soit définitivement bourrés, endormis ou déjà repartis afin d'éviter de rester trop longtemps englués dans les bouchons. 

Arrivé sur le site par hélicoptère vers 18h00, comme le reste du groupe, le guitariste n'est pas dans la caravane qui lui sert de loge depuis une demi-heure que l'on tape à la porte pour lui annoncer que DEEP PURPLE va bientôt monter sur scène. Il refuse, rappelant au passage les clauses du contrat, et finit par se barricader dans sa caravane fermée à double tour. Pendant qu'organisateur et manager tentent de le convaincre et tambourinent à la porte, non sans commencer à perdre leur sang-froid, le reste du groupe accepte et lui demande de venir jouer. Devant son refus catégorique, l'organisateur perd patience et annonce qu'il annule purement et simplement leur prestation. Et les enjoint au passage à aller se faire foutre.

Blackmore s'en cogne comme de son premier jeu de cordes, mais pas le manager de DEEP PURPLE qui est le plus rapide et arrive le premier sur scène pour demander aux 400 000 et quelques spectateurs s'ils veulent voir le groupe. Acclamations de la foule en délire, l'émeute est évitée, l'incident "diplomatique" aussi, et l'organisateur part fulminer dans son coin. Furieux qu'on lui mette le couteau sous la gorge, le guitariste traîne encore un moment et finit par accepter de jouer nettement plus tôt que prévu, bien qu'il n'ait pas sa tenue de scène, restée à l'hôtel. 


Ce n'est qu'à la moitié du concert que le soleil se couchera enfin et que le groupe pourra bénéficier du lightshow sur fond de backdrop avec un arc-en-ciel (tiens, tiens…). Mais Blackmore, ulcéré par l'incident pré-concert, entend montrer qu'il n'est pas homme à se laisser dicter quoi que ce soit par qui que ce soit. « C'est une question de principe » dira-t-il. Quatre ans plus tard, Eddie Van Halen entrera dans la légende de la six-cordes avec "Eruption", mais ce soir-là, l'homme en noir, lui, se la joue (symphony of) destruction. Alors que le concert touche à sa fin, le premier à en faire les frais sera un cameraman qui s'est tenu un peu trop près de lui à son goût pendant tout le set et lui a demandé à maintes reprises de se déplacer afin d'avoir de meilleurs angles de vue. 

Il fracasse sa guitare sur la caméra qui l'a importuné toute la soirée avant de planter son manche dans l'objectif, cassant le lentille au passage, pulvérise une autre Stratocaster avant de l'envoyer dans le public, balance son enceinte dans la fosse, détruit méthodiquement ses instruments… Et met le feu à ses amplis qui, à sa demande, avaient été aspergés d'essence par un roadie. Tout ça pendant que le reste du groupe continue à jammer comme si de rien n'était. Ce qu'il ne savait pas, c'est que l'orga avait prévu des explosions pour clore leur concert. Pyrotechnie et essence faisant mauvais ménage quand on ne s'appelle pas RAMMSTEIN, Blackmore, le batteur Ian Paice et des roadies seront légèrement brûlés… Mais quel show ! 

DEEP PURPLE devra payer 10 000 dollars pour les dégâts occasionnés. Bien peu de chose en regard de la publicité que leur fera ce grand moment du rock'n'roll offert par le guitariste. Surtout que Coverdale a joué tout le show avec un chèque d'un million de dollars dans la poche de son jeans, « le putain de pantalon le plus cher du monde ! » plaisantera-t-il. « Ce n'était pas notre cachet, précisera-t-il toutefois par la suite. C'était un chèque de royalties de la maison de disques »


​La prestation de DEEP PURPLE au California Jam sera l'un des tout premiers concerts de rock à sortir en vidéo. Avant d'être réédité en 2005 en DVD avec des bonus.

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Blogger : Laurence Faure
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Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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