
Y’a pas à dire, le death metal : ça conserve ! Du haut de ses vingt-six ans d’âge, ABORTED traverse en effet vents et marées avec une ferveur, une abnégation qui force le respect et son capitaine émérite, Sven de Caluwé, en est le principal artisan. Le revoilà sur le devant de la scène avec un line-up inchangé trois ans pile-poil après la sortie d’un « Terrorvision » en roue libre, qui n’avait pas fait l’unanimité auprès de son public habituel. Les Belges avaient donc à cœur de proposer un nouvel album qui rallierait les hordes à sa noble cause brutal death. C’est chose faite aujourd'hui avec ce onzième album, « Maniacult », qui vient chatouiller les tympans des amateurs de sauvagerie éclairée.
Premier constat sans appel à l’écoute de ce nouveau méfait : Sven est toujours irréprochable sur ses growls, profonds et hargneux, qui font de lui l’un des représentants les plus convaincants à ce poste tous groupes confondus. Quant au guitariste Ian Jekelis, celui-ci délivre ici une partition de haute volée gorgée de riffs zig-zag dantesques pendant que Stefano Franceschini, bassiste, se révèle une fois de plus indispensable à son poste. Inutile de préciser aussi que Ken Bedene cogne sur ses fûts avec un doigté digne des meilleurs. Et un rapide coup d’œil sur l'artwork, à nouveau signé Par Olofsson, achève de rassurer le fan tant celui-ci est juste dans le ton, apocalyptique à l’image de la musique du groupe de Beveren. Le cahier des charges du top brutal death est bien respecté à la lettre et met à l’honneur un ABORTED qui prouve qu’il en a encore sous la (double) pédale. La preuve ne se fait pas attendre avec ce "Verderf" d’ouverture, massif, qui fait place nette pour une doublette "Maniacult" / "Impetus Odi" destinée à enflammer les pits à coup sûr ! "Portal To Vacuity " pousse le bouchon encore plus loin à grand renfort de grind et d’un soupçon de mélodie black metal. "Dementophobia" plie le match, en proposant une relecture heavy sur les bords qui lui sied à merveille.
Mais c’est à mon sens sur "A Vulgar Quagmire" et sa paire de riffs trempés dans l'acide chlorydrique que le groupe touche du doigt le graal du brutal death. Avant de laisser planer une ambiance plus sombre sur la fin de l’album avec les terrifiants "The Grotesque" et "I Predeletti: The Folly Of The Gods". La mission est donc accomplie sur « Maniacult » avec brio : « Carnage Done » comme dirait l'autre.
Vous l'aurez compris, cette nouvelle livraison d’ABORTED est réjouissante, elle efface d’un revers de perfecto un « Terrorvision » en demi-teinte et redonne ses lettres de noblesse au brutal death qu’il pratique avec conviction depuis bien longtemps. Son producteur attitré depuis « Retrogore », Kristian Kohlmannslehner, ne s’y est pas trompé et trousse une nouvelle fois une production atomique pour le quatuor. « Maniacult » est un véritable manifeste de brutalité, tant sur le fond que la forme, qui peut se résumer en un seul mot : implacable.