23 octobre 2021, 23:59

LEPROUS + KADINJA + POEM + CONSCIENCE

@ Toulouse (Ready For Prog Festival - Le Metronum)

Cela arrive rarement au cours d’une vie, et ce n’en a, par conséquent, que plus de valeur : les étoiles étaient parfaitement alignées en ce samedi 23 octobre 2021, deuxième et dernier jour du Ready For Prog Festival, qui se tenait au Metronum, à Toulouse. L’un des rares festivals à ne pas avoir déclaré forfait devant le satané virus et sa cohorte d’insupportables restrictions sanitaires. Sous un soleil éclatant et un ciel du bleu le plus pur, pour tracer la route jusqu’en Haute-Garonne, ces 3h30 de trajet qui nous séparaient du but final se sont avérées délicieuses, pleine d’humour, de joie et de confidences. Nous étions fin prêtes et archi-motivées pour assister enfin, après 18 mois de disette de musique live, au grand retour de LEPROUS sur le sol français depuis le début de la pandémie. Premier concert hors de Norvège pour les musiciens, qui retrouvent ce soir le plaisir de jouer devant un VRAI public, affamé et surexcité.

Le festival se tenait sur deux jours, mais, à cause de l’éloignement géographique il ne nous a pas été possible d’assister à la première soirée du vendredi. Mais en aucun cas nous n’aurions manqué le moindre groupe de cette deuxième journée, tant l’affiche était alléchante : CONSCIENCE, POEM, KADINJA (qui remplace avantageusement UNEVEN STRUCTURE, prévu initialement), et un final assuré par LEPROUS.

Les Parisiens CONSCIENCE ont la lourde tâche d’ouvrir la soirée, mais après la frustration de ne pas avoir pu présenter sur scène leur dernier album « In The Solace Of Harm’s Way », sorti au tout début de la pandémie, les musiciens ont les crocs. Ils débordent d’une énergie extrêmement communicative, et d’une joie de vivre palpable. Même si leurs compositions se diluent parfois dans quelques longueurs pas forcément nécessaires, on ne peut que saluer le groupe, et son frontman, Matt Johansson, pour sa prestation qui nous refile la frite, la pêche, la banane, la patate (rayer la mention inutile), et nous met en appétit pour la suite des événements.

L’arrivée sur scène des Grecs POEM va mettre tout le monde d’accord. En guise d’introduction, leur extraordinaire chanteur à la voix ultra puissante et mélodieuse, George Prokopiou, entame seul une longue et superbe partie vocale a cappella, et toute la salle se retrouve captivée, prise en otage par la magie dégagée. La musique de POEM, agréable sur disque, prend toute son ampleur sur scène : mélodique, progressive, avec des accents heavy, et groovy en diable et une basse ronflante, grondante. Le public est conquis. Mais quoi de plus normal au vu de la qualité de leur prestation ?  Un excellent groupe que l’on espère revoir sur une scène française au plus vite.

Avec les musiciens de KADINJA, c’est un tout autre style qui déboule telle une tornade incontrôlable, écrasant tout sur son passage. En résulte une ambiance survoltée qui va électriser le public, à l’aide de leur djent technique, hyper maitrisé et mélodique en diable. Et pourtant, la partie ne semblait pas gagnée d’avance pour le groupe, qui vient de se séparer de son chanteur, Philippe Charny Dewandre. C’est donc leur ami, Clem Richard du groupe ASHEN, qui leur refile un coup de main (de maître) pour assurer le concert. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le but est largement atteint, voire dépassé. Quelle prestation ébouriffante ! De quoi réveiller Mémé de sa sieste digestive, et déscotcher Pépé de sa téloche, pour les faire headbanger tous les deux dans le salon, en oubliant pour une fois Questions pour un Champion. Mais, des musiciens comme ça, révoltés, déchainés, hyper pro, et français de surcroit, on en voudrait tous les jours au petit-déjeuner ! On aura même droit à des slammeurs sur la reprise de 'This Is The New Sh*t", de Marylin Manson, issue de leur dernier album, « DNA » (2019), composé uniquement de reprises. Les quatre artistes ont été formidables, mais mention particulière toutefois à l’excellentissime et hypnotique Morgan Berthet (également batteur de MYRATH), qui martyrise son kit de batterie avec une aisance insolente, et un flegme que l’on pourrait qualifier de britannique, à tel point qu’en le regardant, on aurait presque l’impression que c’est facile. Presque ! (Petit conseil aux apprentis batteurs : ne vous fiez jamais aux apparences). Doté d’un son dantesque, assuré par le maître incontesté de la console, Chris Edrich (qui assure également le son de LEPROUS), KADINJA nous a mis une bonne grosse fessée, bien jouissive. Et sans être masochiste pour autant, on en redemande volontiers. Revenez dans le sud rapidement, les gars, vous y serez toujours bien accueillis.

Au vu du nombre de t-shirts arborant le logo des Norvégiens, on se doute bien que LEPROUS est attendu comme le messie, le Père Noël ET la cerise sur le gâteau, en cette soirée sold-out. Le quintette arrive en terrain conquis, certes. Mais ce n’est pas pour autant que les musiciens considèrent leur succès comme acquis. Ils vont en effet se donner à 1000%, comme à leur habitude, démarrant leur set au son de "Running Low" et "Out Of Here", extraits du dernier et magistral album, « Aphelion » (chronique ici). Puis, le groupe enchaîne sans pause avec un "Rewind" gargantuesque (réclamé à cor et à cri par votre humble rédactrice, lors du passage du groupe à Savigny-Le-Temple, en février 2020), laissant le public pantois. Pour ceux qui en douterait, oui, LEPROUS joue encore du "metal", et ce, de manière époustouflante, qui plus est. Première allocution du chanteur, Einar Solberg, détendu et souriant, nous annonçant non sans une pointe d’humour, que c’est la troisième fois qu’il interprète "Running Low" en live, et qu’il se plante à chaque fois sur les paroles du premier couplet, remarquant au passage que nous non plus, ne sommes pas foutus de lui donner les bonnes paroles. Et il se fera un plaisir tout au long du show, de communiquer avec le public, avec ses traits d’esprit caractéristiques, drôles et piquants, prouvant qu’il a acquis une véritable aisance sur scène, moins "coincé" qu’auparavant. Et cela lui réussit à merveille, insufflant une dynamique positive au concert et un véritable échange humain avec les spectateurs.

Le groupe poursuit dans la même veine old-school avec "Foe", tiré de l’album « Coal » (2013), un titre heavy et puissant, suivi d’un "From The Flame" entrainant, repris en chœur par la foule. Joué pour la toute première fois devant un "vrai" public, "On Hold" sera le moment le plus émouvant du concert. Cette chanson bouleversante sur l’album se révèle encore plus forte sur scène. Impossible de retenir les larmes, tant les paroles touchent profondément, et tant la sincérité absolue du groupe et d’Einar sont palpables. La magie de LEPROUS a encore frappé. Telles des marionnettes, nous dansons sur le fil de l’émotion, passant du rire aux larmes au son d’une seule note. Le talent de ce groupe est exceptionnel, capable de délivrer toute une palette de couleurs différentes sur un seul set, avec toujours cette authenticité unique et cette gentillesse désarmante. "Mirage" est une autre bonne surprise, le groupe ayant décidé de mettre en avant sa facette la plus énergique. Précédé par la captivante introduction vocale adoptée depuis quelques temps par le vocaliste, "The Cloak" est un morceau toujours aussi prenant et efficace. On reste sur le registre de l’émotion à fleur de peau avec "Below", devenu aussi incontournable que "The Price", qui voit encore une fois le public réagir au quart de tour, en chantant à tue-tête.

 

Le son est parfait, comme à l’accoutumée, lorsque Chris Edrich dirige les opérations. Les musiciens sont complètement impliqués, heureux de provoquer une telle osmose après ces longs mois privés de tournée. Au début de "Alleviate", on voit Einar Solberg, Tor Oddmund Shurke (guitare rythmique), Simen Børven (basse) et Robin Ognedal (guitare) regroupés tous les quatre autour des deux claviers au centre de la scène, tentant de faire démarrer leur programmation, tâtonnant tels des novices les touches desdits claviers, tandis que Baard Kolstad, hilare derrière sa batterie, observe ses compères d’un œil amusé. Le démarrage de cette chanson donne lieu à un bel éclat de rire général, à tel point que lors du premier couplet, le frontman se retient de justesse de pouffer de rire en voyant la mine hésitante de Robin. Heureusement, le professionnalisme dont fait preuve le groupe évite tout faux pas, mais cet épisode ne fait que conforter le public dans cette intimité bon enfant partagée avec le groupe.
Tor Oddmund prend ensuite sa guitare acoustique pour entamer l’intro de "Castaway Angels", sur laquelle Einar Solberg, très ému, va encore faire des merveilles. Aucune fausse note ce soir, aucun ralentissement, aucune faiblesse. LEPROUS délivre un show d’une saisissante beauté, dans une ambiance irréelle. Groupe et spectateurs sont à l’unisson, sur la même longueur d’onde, dans la communion la plus intime. Deux des morceaux les plus puissants et prenants du groupe, "Nighttime Disguise" et en rappel, "The Sky Is Red" finissent d’achever la moindre résistance dans le public. LEPROUS termine son set sous les ovations largement méritées d’une audience conquise. Les Norvégiens ont atteint un palier que bien peu de groupes peuvent se targuer d’approcher un tant soit peu. Ils ont réussi la délicate alchimie de créer une musique complexe, fascinante, et pourtant fédératrice, dans laquelle les auditeurs se retrouvent, si différents soient-ils.

Les groupes prendront le temps de discuter chaleureusement avec les spectateurs, ravis et repus. LEPROUS nous fera même l’honneur d’une séance de dédicaces & photos improvisée, quelques minutes après le concert. Une occasion de plus de constater à quel point les musiciens sont accessibles, proches de leurs fans, et d’une patience à toute épreuve. Envoûtante, exceptionnelle, passionnante, magique : les superlatifs ne manquent pas pour décrire cette soirée. Cela ne fait aucun doute, les étoiles étaient bien alignées.

Blogger : Sly Escapist
Au sujet de l'auteur
Sly Escapist
Sly Escapist est comme les chats : elle a neuf vies. Malgré le fait d’avoir été élevée dans un milieu très éloigné du monde artistique, elle a réussi à se forger sa propre culture, entre pop, metal et théâtre. Effectivement, ses études littéraires l’ont poussée à s’investir pendant 13 ans dans l’apprentissage du métier de comédienne, alors qu’en parallèle, elle développait ses connaissances musicales avec des groupes tels que METALLICA, ALICE IN CHAINS, SCORPIONS, SOUNDGARDEN, PEARL JAM, FAITH NO MORE, SUICIDAL TENDENCIES, GUNS N’ROSES, CRADLE OF FILTH, et plus récemment, NIGHTWISH, TREMONTI, STONE SOUR, TRIVIUM, KILLSWITCH ENGAGE, ALTER BRIDGE, PARKWAY DRIVE, LEPROUS, SOEN, et tant d’autres. Forcée d’abandonner son métier de comédienne pour des activités plus «rentables», elle devient tour à tour vendeuse, pâtissière, responsable d’accueil, vendeuse-livreuse puis assistante commerciale. Début 2016, elle a l’opportunité de rejoindre l’équipe de HARD FORCE, lui permettant enfin de relier ses deux passions : l’amour des notes et celui des mots. Insatiable curieuse, elle ne cesse d’élargir ses connaissances musicales, s’intéressant à toutes sortes de styles différents, du metalcore au metal moderne, en passant par le metal symphonique, le rock, le disco-rock, le thrash et le prog. Le seul maître-mot qui compte pour elle étant l’émotion, elle considère que la musique n’a pas de barrière.
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK