21 mai 2023, 23:59

NE OBLIVISCARIS + PERSEFONE + THE OMNIFIC

@ Paris (Petit Bain)

Avec une date archi sold-out depuis plusieurs semaines, il était vain pour les fans désespérés de chercher des places pour le concert de NE OBLIVISCARIS ce dimanche 21 mai à Petit Bain, à Paris. Hormis pour les rares chanceux qui se sont jetés sur les quelques-unes relâchées en dernière minutes, et qui sont parties à la vitesse de l’éclair. Il faut dire que cela fait cinq longues années que le groupe australien n’a pas posé ses flight cases dans la capitale. Ou plutôt devrions-nous dire "groupe international". Car avec la présence d’un bassiste italien (Martino Garattoni), de désormais deux français (Benjamin Baret - guitare) et Kévin Paradis derrière les fûts (en remplacement de Dan Presland, parti en 2022), ainsi que d’un américain, James Dorton (BLACK CROWN INITIATE) qui assure l’intérim au chant saturé, à la place de Marc "Xenoyr" Campbell, ayant dû déclarer forfait pour raisons personnelles, les deux Aussies que sont Tim Charles (chant clair et violon) et Matt Klavins (guitares) se retrouvent ainsi baignés dans un beau mélange de cultures. Et cela ne fait qu’enrichir le propos de ce groupe de metal extrême progressif, qui, depuis ses débuts, associe avec bonheur tant de styles différents.

Après de bons gros ralentissements sur la route, dus à la fin du long week-end de l’ascension, il fait bon se balader sur les quais de Seine, en cette belle journée printanière, pour rejoindre Petit Bain, la fameuse péniche qui fait office de salle de concert. L’ouverture des portes se fait avec un peu de retard sur le timing prévu, mais cela ne gêne en rien le début des concerts, les spectateurs ayant largement le temps de rentrer, faire un tour au merchandising et s’installer pour la première partie. THE OMNIFIC est un trio australien composé de deux bassistes et d’un batteur. Etrange configuration sur le papier. On se demande comment ça peut sonner, sans guitariste ni chanteur. Or, il se trouve que les jeunes gens se révèlent bien plus convaincants en live que sur album (« Escapades » - 2021), leur musique prenant vie et étant bien plus fun que sur la version studio.

On admire la dextérité des bassistes Matt Fack et Toby Peterson-Stewart, qui jouent uniquement aux doigts, sans médiator. Au programme, slap et groove à volonté, accompagnés pour ce faire, par la frappe de leur batteur, Jerome Lematua, ainsi que des samples de synthé qui donnent la touche mélodique indispensable. On peut d’ailleurs regretter l’usage de ces bandes pré-enregistrées, en lieu et place d’un véritable musicien. Mais quoiqu’il en soit, le trio dégage un tel capital sympathie que la sauce prend immédiatement auprès d’un public friand de technique, qui n’hésite pas à donner de la voix et à se remuer les fesses pour montrer son approbation. Avec seulement trente minutes de concert, le pari est gagné haut la main par les trois musiciens, qui récoltent un volée d’applaudissements chaleureux.

Très attendus également, venus du « plus grand pays au monde » comme les présentera plus tard et avec humour Tim Charles, les Andorrans de PERSEFONE reçoivent un accueil extrêmement enthousiaste. Et mouvementé. En effet, la fosse s’anime au quart de tour dès les premières notes, enchainant circle-pits et pogos à tout-va, pendant les quarante-cinq minutes du set.

Il commence déjà à faire chaud au sein de la péniche. Le death progressif et brutal du groupe (à découvrir notamment sur leur dernier album en date, le très bon « Metanoia » - 2022) fait mouche auprès des fans venus en nombre.

Seul point noir à une prestation de qualité, les voix des deux chanteurs Daniel R. Flys (voix saturée) et Miguel Espinosa (voix claire et claviers) semblent souvent noyées sous le déluge de notes qui compose la musique du groupe, ultra technique et un peu hermétique. Et pourtant les bouffées de fraicheur apportées par les interventions de Miguel Espinosa auraient méritées une mise en avant plus claire. Mais qu’à cela ne tienne, le quintet remporte en franc succès, grâce à une énergie sans faille et une interaction sincère avec le public.

Après un autre rapide changement de plateau, place aux maîtres de la soirée, NE OBLIVISCARIS, qui ont le très bon goût d’utiliser "Chokehold" issu du dernier album de SLEEP TOKEN en guise d’intro. Qu’ils en soient remerciés !

Arrivent sur scène les six musiciens, tous dans une forme olympique, malgré une tournée laissant peu de jours de repos, et ils commencent leur set avec l’excellent "Intra Venus", tiré de leur troisième et avant-dernier album, le lumineux « Urn » (2017). Si la température était déjà élevée après le passage de la tornade PERSEFONE, elle monte encore de plusieurs crans avec NeO, qui va assurer un show exceptionnel pendant presque deux heures.

Première et énorme satisfaction, le son est absolument parfait ! On distingue nettement les deux guitares de Benjamin et Matt, la basse grondante de Martino, la voix claire et le violon de Tim, la voix caverneuse ultra puissante de James, ainsi que la batterie explosive du génial Kévin, qui assure une prestation métronomique, groovy et ébouriffante tout le long du set. Tim Charles tient son rôle de frontman avec une bonne humeur communicative et un sourire ravageur, tandis que ses acolytes déploient des trésors de dextérité et de musicalité. Telle est la force de la musique de NeO, savoir marier avec une grâce infinie et un naturel désarmant des ambiances et styles diamétralement opposés au sein d’une même chanson.

Enorme succès pour le second morceau de la soirée, l’irrésistible "Equus", extrait du dernier album du groupe, « Exul », chanson sublime qui emporte les spectateurs dans un tourbillon de ferveur et de communion d’une intensité extraordinaire. Moment magique avec un solo superbe de Benjamin Baret puis le chœur final repris par la foule comme un seul homme. Les poils se dressent et des frissons de plaisir remontent le long de l’épine dorsale. S’en suivent les deux parties de "Misericorde" : "As The Flesh Falls" et "Anatomy Of Quiescence", soit près de dix-sept minutes de musique épique, passant par toutes les étapes émotionnelles, et d’une beauté à couper le souffle, entre les magnifiques parties de violon de Tim Charles, et là encore, un solo de guitare exceptionnel de Benjamin. Chaque musicien est mis en valeur, tour à tour, et chacun brille de mille feux. Excellent travail de la part de James Dorton, qui assure son remplacement de manière magistrale (même si nous souhaitons ardemment que Xen puisse être en mesure de rejoindre son groupe dès que possible). Il ne faut pas oublier que le gaillard n’a eu qu’une petite dizaine de jours pour apprendre toutes les paroles au pied levé, et assurer les concerts de cette tournée européenne. Sa voix rugueuse et puissante s’accorde à merveille à celle, douce, mélodieuse et sensible de Tim, et les deux hommes, tout aussi charismatiques et magnétiques l’un que l’autre, se complètent parfaitement, sans jamais se faire de l’ombre.

Tim Charles présente ensuite le prochain titre, "Libera (Part 1) - Saturnine Spheres" (« Urn » - 2017), et nous régale en le faisant en français, ce qu’il réitèrera maintes fois plus tard dans la soirée. D’ailleurs, il faut reconnaitre qu’il se débrouille franchement bien dans la langue de Molière, qui est loin d’être la plus facile pour les étrangers ! "Libera" donne l’occasion au public parisien de s’époumoner une nouvelle fois sur les « Oh Oh Ooooooh » finaux. Encore un passage mémorable. Pour la suivante, « le premier bon morceau que nous ayons composé voici dix-huit ans », dixit le frontman, même s’il n’est pas contre le fait que nous prenions photos et vidéos (« à condition de ne pas oublier de nous tagger dans les publications », ajoute-t-il avec une pointe d’humour), il nous enjoint à laisser nos téléphones portables dans la poche pour savourer l’instant présent. Le vivre pleinement pour que les images et les sons s’impriment à jamais dans nos cœurs. Les spectateurs suivent volontiers le conseil et font de ce "Forget Not" (composé en 2005 et issu du monument qu’est « Portal Of I », le premier album du groupe en 2012) un moment de magie pure et de sensibilité accrue. Les larmes montent aux yeux, l’émotion se diffuse dans les airs. C’est beau, tout simplement !

Tim Charles laisse ensuite la parole à Benjamin Baret, et le guitariste gaucher en profite pour mettre en valeur la remarquable contribution de Kévin Paradis (batteur tellement magistral que l’on se prend à souhaiter le voir intégrer officiellement et durablement la formation à l’issue de cette tournée). Ovation généralisée de la part du public, évidemment. Benji, heureux d’être de retour sur une scène française, se montre chaleureux et enjoué, et rend un bel hommage à sa maman, ayant fait le déplacement depuis Bordeaux pour assister au concert. Chère Madame, vous pouvez être fière de votre talentueux garçon !

On enchaine avec un extrait du deuxième album du groupe, « Citadel » (2014), le brutal "Devour Me, Colossus (Part 1): Blackholes". La péniche se met presque à tanguer sous les assauts des spectateurs déchainés qui s’éclatent dans un mosh-pit sauvage. Et cette chanson nous donne l’occasion d’admirer une fois encore les doigts en or du fabuleux bassiste qu’est Martino Garattino lors d’un long solo absolument divin, que le public accompagne en clapant des mains, ainsi que sur celui du morceau suivant, le superbe "Graal" (« Exul » - 2023), que Tim Charles introduit en précisant que c’est le dernier de la soirée... Mais cependant, si nous faisons suffisamment de bruit, le groupe reviendra pour un dernier rappel. Il suffit de demander ! L’audience, totalement conquise, s’arrache les cordes vocales et se brise les phalanges à force de cris et applaudissements déchainés.

Ainsi, pour clore ce show dantesque, NeO revient interpréter l’incontournable "And The Plague Flowers The Kaleidoscope" (« Portal Of I » - 2012), qui démarre au son du violon dansant de Tim et de la guitare de Matt Klavins, guitariste rythmique à l’aisance incroyable qui assure une stabilité et une assise impeccable au groupe. Morceau épique et magnifique sur lequel groupe et spectateurs jettent leurs dernières forces dans un final somptueux. Et l’on peut constater une nouvelle fois, que la célèbre péniche porte bien son nom, tant la salle se transforme en étuve et l’on se retrouve en nage !
Il est peu de dire que NE OBLIVISCARIS a plus que largement mérité les applaudissements nourris, l’ovation et la ferveur qu’il récolte, tant le groupe nous a offert le meilleur de lui-même, avec une sincérité et une générosité à nulle autre pareilles. Un spectacle flamboyant (aussi lumineux que l’irrésistible sourire de Tim Charles) porté à bout de bras par six musiciens à la technique irréprochable, servi par un jeu de lumière de toute beauté ainsi qu’un son pur et précis. Le bonheur se lit sur tous les visages, artistes et fans. Les yeux brillent d’une lueur intense, avec la certitude d’avoir passé un moment que nous ne seront pas prêts d’oublier. Forget Not !

Lors du salut final, alors que Tim Charles se penche pour serrer des pognes, il se voit happé dans les bras de quelques fans survoltés pour un slam improvisé, avant d’être déposé sur la scène. A voir son expression de surprise, il est certain qu’il ne s’y attendait pas. Les musiciens prennent le temps de saluer longuement le public, et accorderont même quelques photos et autographes aux fans conquis. Belle conclusion à cette soirée phénoménale à laquelle on aimerait donner une suite rapidement.
Alors, Messieurs, ne tardez pas trop à revenir sur le sol français, dans une salle de plus grande capacité, qui plus est, car il ne fait aucun doute que votre public sera au rendez-vous pour vous acclamer.

Blogger : Sly Escapist
Au sujet de l'auteur
Sly Escapist
Sly Escapist est comme les chats : elle a neuf vies. Malgré le fait d’avoir été élevée dans un milieu très éloigné du monde artistique, elle a réussi à se forger sa propre culture, entre pop, metal et théâtre. Effectivement, ses études littéraires l’ont poussée à s’investir pendant 13 ans dans l’apprentissage du métier de comédienne, alors qu’en parallèle, elle développait ses connaissances musicales avec des groupes tels que METALLICA, ALICE IN CHAINS, SCORPIONS, SOUNDGARDEN, PEARL JAM, FAITH NO MORE, SUICIDAL TENDENCIES, GUNS N’ROSES, CRADLE OF FILTH, et plus récemment, NIGHTWISH, TREMONTI, STONE SOUR, TRIVIUM, KILLSWITCH ENGAGE, ALTER BRIDGE, PARKWAY DRIVE, LEPROUS, SOEN, et tant d’autres. Forcée d’abandonner son métier de comédienne pour des activités plus «rentables», elle devient tour à tour vendeuse, pâtissière, responsable d’accueil, vendeuse-livreuse puis assistante commerciale. Début 2016, elle a l’opportunité de rejoindre l’équipe de HARD FORCE, lui permettant enfin de relier ses deux passions : l’amour des notes et celui des mots. Insatiable curieuse, elle ne cesse d’élargir ses connaissances musicales, s’intéressant à toutes sortes de styles différents, du metalcore au metal moderne, en passant par le metal symphonique, le rock, le disco-rock, le thrash et le prog. Le seul maître-mot qui compte pour elle étant l’émotion, elle considère que la musique n’a pas de barrière.
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