
En quatre albums, depuis 2007, le groupe Finnois GHOST BRIGADE a imposé un style particulier sous l’étiquette toujours un peu réductrice du doom mélodique. Chacun de ses morceaux est reconnaissable instantanément, dans sa structure, alternant clair et obscur, ou grâce à la formidable versatilité de la voix de Manne Ikonen, le frontman du groupe, du quasi-murmure aux imprécations gutturales, mais avec cette signature vocale immanquable. Son quatrième album, « IV – One With the Storm », sorti en 2014, était très attendu. Il serait difficile de prétendre que cette livraison a déçu, car c’est un excellent disque. Pourtant beaucoup de ceux qui suivent le groupe depuis l’origine semblent continuer de lui préférer « Isolation Songs » (2009) ou « Until Fear No Longer Defines Us » (2011). Cela n’a évidemment rien enlevé au plaisir qu’ils ont eu à se retrouver à Glazart pour assister au premier concert français de GHOST BRIGADE en deux bonnes années.
C’est en effet une assez belle ferveur qui accueille les Finlandais à leur entrée sur scène, sur le très approprié « Wretched Blues » et le mur de son qu’il impose pendant 7 minutes uniformes, selon les standards du groupe –et qui permettent à Ikonen de se chauffer immédiatement la voix. Toujours tiré de « IV », « Aurora » suit, avec son intro presque pop et sautillante (toujours selon les standards du groupe…), son couplet de syncopes et d’arpèges limpides et légers, avant le déchaînement des distorsions, l’explosion des breaks interminables et les lamentations de Manne Ikonen. « Minus Side » signe ensuite une petite incursion sur le territoire de « Guided by Fire » (2007), le premier album de GHOST BRIGADE – la seconde ne viendra qu’au rappel.

Dans la même logique, immédiatement après, le très hymnesque « Into the Black Light » apporte au set principal sa seule illustration de la période « Isolation Songs ». L’ensemble et très maîtrisé par les artistes – « comme l’album, en mieux », dira un ami musicien en sortant – et à ce stade, toutes les nuques sont bien chaudes pour absorber une grosse deuxième moitié de show consacrée aux albums les plus récents, en commençant par l’avalanche de « Stones and Pillars » (« IV ») et l’enchainement des gigantesques bûches « Breakwater » et « Clawmaster » – les deux sommets de « Until Fear… », qui conduisent la soirée à son premier pic d’intensité.
Le second sera atteint au moment du monstrueux « Elämä On Tulta », qui ferme à la fois l’album « IV » et le set – avec les très rares paroles en Finnois de GHOST BRIGADE : « La vie est un incendie, je ne peux plus courir, faites-moi sortir d’ici (…) ». Au rappel, les plus anciens morceaux « Deliberately » (« Guided by Fire ») et surtout « Suffocated » (« Isolation Songs ») finissent comme attendu d’enflammer la salle.
Pour les pinailleurs, les seuls petits regrets qu’il serait possible de formuler sur cette date concerneraient d’une part le réglage des voix de Manne Ikonen, dont les fréquences se perdent assez fréquemment dans celles des guitares distordues (en particulier près de la scène), et d’autre part, surtout, le léger manque de chaleur et de présence des musiciens, vis-à-vis de leur public : seul Wille Naukkarinen, le guitariste solo, entretient régulièrement ce contact avec la salle, si proche, mais comme tenue à distance par le reste du groupe, enfermé dans sa bulle. Peut-être trop timides, les Finnois ? Il leur faudra sans doute un tout petit grain de folie supplémentaire, en juin prochain, pour enflammer aussi le public d’une des mainstages du Hellfest, sans doute en début d’après-midi. On peut toujours rêver, hein.
