19 mai 2015, 20:42

Motocultor Festival : Yann le Baraillec et Yves Tattevin

Il y a quelques jours à peine, Matt Heafy, le frontman de TRIVIUM, twittait : « TRIVIUM est honoré d’être tête d’affiche de l’un des festivals les plus Metal que j’aie jamais vu ! @MotocultorFest ». Il venait de découvrir les groupes déjà annoncés et se réjouissait d’avance, dans le tweet suivant, de pouvoir assister aux sets de SEPULTURA, SEPTICFLESH, ALCEST, KRISIUN et CRYPTOPSY, tous programmés le même jour que lui…
 


En quelques années seulement, le festival morbihannais s’est effectivement taillé une bonne petite réputation dans le paysage français, européen, et même global des festivals spécialisés. Désigné « deuxième meilleur petit festival » français de 2014 par le vote de plusieurs milliers d’internautes dans le cadre des Festival Awards, le Motocultor Festival procédera à la dernière annonce de l’affiche 2015 en fin de semaine. Or le programme est déjà bien copieux. Trop copieux ? L’ouverture de la fameuse troisième scène, annoncée récemment pour cette édition 2015, fait débat. Toutes les années précédentes, on aurait pu répondre à Matt Heafy : « t’inquiète, tu vas pouvoir t’enquiller tranquillement tous les groupes, les uns après les autres ». Avec la troisième scène, on n’en est pas sûr du tout. Et ça, pour nombre d’habitués, c’est dommage. Yann Le Baraillec et Yves Tattevin (le président du festival et son assistant pour la communication) étaient à Paris il y a quelques semaines pour plusieurs interviews et une conférence de presse. En tant que partenaire du Motocultor, HARD FORCE a notamment pu leur demander de nous expliquer pourquoi, la troisième scène…
 


Comment l’aventure du Motocultor Festival a-t-elle débuté ?
Yann le Baraillec : En 2006, je jouais dans un groupe qui s’appelait MOTOCULTOR : on faisait des reprises de disco ou de génériques de dessins animés, mais version metal…
Yves Tattevin : T’as déjà tout l’esprit du festival, là…
Yann : On reprenait aussi « Creeping Death » de METALLICA, par exemple, ou encore « Refuse/Resist »… sans bien sûr imaginer que SEPULTURA viendrait un jour jouer chez nous ! Après quelques concerts, on avait décidé d’organiser un festival dont on aurait assuré la tête d’affiche : le Motocultor Festival était né. Les deux premières éditions ont eu lieu en salle, en 2007 et 2008. En 2009, compte tenu de nos emplois du temps, il était devenu difficile de continuer à faire vivre le groupe, mais ça m’a permis de me concentrer sur l’organisation du festival. En 2010, nouvelle formule : on a fait passer le festival en plein air, sur trois jours, avec deux scènes et 45 groupes programmés. C’est le mode d’organisation qui a prévalu jusqu’en 2014 – je suis sûr que tu as des questions sur la nouvelle formule que nous mettons en place cette année… Cela dit, dès 2007, même si nous étions conscients de devoir avancer petit à petit, nous avions à l’idée de nous installer sur un terrain qui nous paraissait tout à fait adapté à l’organisation d’un festival de plein air un peu conséquent…

Tu pensais déjà à Saint-Nolff ?
Yann : Absolument ! Il existait déjà un évènement sur le site de Saint-Nolff et parallèlement à l’organisation des premiers Motocultor Fest, j’étais aussi chargé de la gestion des bénévoles de ce festival local. Il n’y avait que quelques jours d’écart entre les deux manifestations, donc mes journées étaient longues, mais ça fait effectivement très longtemps que je pense à associer le Motocultor au site de Kerboulard, à Saint-Nolff – où ont déjà eu lieu les éditions 2013 et 2014.

Justement, lors de ta conférence de presse, à la fin de l’édition 2014, tu disais que tu espérais pouvoir installer durablement le festival à Saint-Nolff. Dans la mesure où les riverains et les commerçants semblaient enchantés du voisinage du Motocultor et de ses festivaliers, tu paraissais confiant. As-tu un peu plus de visibilité, de ce point de vue ?
Yann : La maire de Saint-Nolff venait d’être élue, en 2014. Elle découvrait donc le Motocultor Festival, que la majorité municipale précédente avait décidé d’accueillir. Après cette « édition-test », pour la nouvelle équipe, elle nous a donné son accord pour 2015 et nous devons la rencontrer très rapidement afin de finaliser un accord pluriannuel. Ce serait effectivement plus confortable, pour nous, de ne pas avoir à renégocier le terrain chaque année.
Yves : Ca nous ferait gagner beaucoup de temps.
Yann : Rien n’est encore acté pour l’après-2015, mais tous les discours que nous entendons, jusqu’à présent, vont dans le bon sens. Les élus semblent très motivés.
Yves : Nous espérons pouvoir signer une convention trisannuelle, pour 2016, 2017 et 2018. C’est ce qui se pratique couramment, pour de nombreux autres festivals.

Votre communication sur les réseaux sociaux s’appuie désormais sur une série de vidéos intitulées « Motocultor, l’Emission ». Qui en est le présentateur ? Il a un véritable talent comique, pour tous ceux qui se donnent la peine de regarder ses vidéos en entier…
Yves : Toi aussi t’as remarqué la ressemblance entre le directeur du festival et le présentateur de « l’Emission » ?

Ah non même pas, je ne suis pas physionomiste !
Yann : Il s’appelle Teddy. C’est un de mes cousins et on est très proche… On fait de la musique ensemble depuis qu’on a 10 ans. Alors qu’on était vraiment rock, au départ, c’est lui qui est tombé le premier dans la marmite du metal, à quatorze ans. Puis j’ai managé son premier groupe et c’est grâce à eux que je me suis forgé une culture metal importante. Dans un sens, c’est lui qui m’a mis le pied à l’étrier dans cet univers. Cela fait plusieurs années que je le harcèle pour qu’il conçoive une web-tv pour le festival : j’étais sûr que ça fonctionnerait. Cette année il s’est lancé et je crois que ça marche bien.
Yves : Après le premier épisode, on a compris qu’on pouvait engager davantage de moyens sur « l’Emission » : on a rapidement changé de caméra et soigné le décor. Je ne sais pas si tu as vu le plus récent épisode…

Si je ne me trompe pas, c’est celui où vous annoncez qu’en 2015, les festivaliers tireraient eux-mêmes leurs bières, au bar…
Yves : Voilà ! Et c’est vrai, évidemment (rires) !
 


Plus sérieusement, c’est l’épisode où vous annoncez l’ouverture d’une troisième scène, qui fait beaucoup parler ceux, parmi les habitués, qui ne sont pas enchantés par cette innovation, parce qu’ils étaient attachés à l’idée de ne jamais avoir de choix à faire entre les groupes. Le fonctionnement alterné des deux scènes, côte à côte, garantissait également une bonne exposition aux jeunes formations. Que répondez-vous à l’expression de cette petite déception et comment la troisième scène va-t-elle s’articuler avec les deux autres ?
Yves : Tout le monde n’a malheureusement pas l’ouverture d’esprit des fans que tu décris… En 2014, la programmation du samedi affichait une couleur punk-rock – alors que la base du Motocultor, c’est black, thrash, death… Beaucoup de fans nous ont donc reproché cette programmation en nous expliquant que pendant 6 heures, ils s’étaient ennuyés. La troisième scène permettra donc d’offrir du choix. Par ailleurs, je te rappelle que les jeunes groupes qui passent au Motocultor en tant que vainqueurs d’un tremplin ne sont jamais programmés en début de journée, mais plutôt en milieu d’après-midi : il n’y a donc aucune raison qu’ils pâtissent de l’ouverture de la troisième scène. En tout état de cause, la nouvelle scène affichera une couleur musicale particulière, différente de celle des scènes principales. L’idée, par exemple, sera de faire jouer du thrash d’un côté et du doom de l’autre. Après, il y a sûrement des gens qui aiment les deux styles, c’est vrai… mais j’espère que tu constateras nos efforts pour construire une programmation pertinente.
Yann : Il faut ajouter que la troisième scène nous permet de renforcer le modèle économique du festival. Ainsi, nous nous rapprochons de la concurrence européenne, qui propose fréquemment entre 80 et 100 groupes. Avec 45 groupes, nous étions un peu légers : 66 (soit 7 de plus par jour), c’est mieux. Il nous restera également à progresser dans le timing de nos annonces : après celle dernièrement annoncée, il nous restera 15 groupes à dévoiler pour présenter l’affiche complète [encore 6 à ce jour – ndlr]. Idéalement, pour les années prochaines, nous souhaitons être plus rapides de quatre bons mois et avoir annoncé les trois quarts des groupes en décembre, comme la plupart de nos concurrents européens, organisés entre juin et août.
Yves : En effet. Beaucoup de festivaliers potentiels n’ont pas le temps d’attendre notre programmation complète avant de devoir faire un choix. C’est compréhensible : il faut poser ses vacances et s’organiser.
 


A l’occasion d’un colloque sur le metal organisé en décembre dernier à Angers, Yann, tu disais que le Motocultor Festival disposait déjà d’un public inconditionnel qui n’attendait pas la programmation complète avant de prendre son billet.
Yann : Tout à fait : on avait vendu plus de 800 pass promo en décembre ! C’est très encourageant : c’est un doublement par comparaison à l’année précédente.
Yves : Et de mémoire, on avait vendu 91 pass pour 2015, sur le site, pendant l’édition 2014…
Yann : Globalement, à ce stade, les ventes sont toujours multipliées par deux, sur la base de 2014. Les annonces de DEATH DTA et SEPULTURA dès le mois de décembre ont certainement bien aidé.
Yves : C’est comme CARCASS et PENTAGRAM, annoncés depuis : ça fait très longtemps qu’on essaye de les convaincre de venir au Motocultor. Evidemment, plus le festival est installé, plus c’est facile d’attirer leur attention. Le bouche à oreille fonctionne bien entre les groupes et dans leur entourage.
Yann : Pour revenir à la troisième scène, nous avons également constaté que notre meilleure marge de progression résidait sur les billets à la journée, et non sur les pass trois jours. La troisième scène va nous aider, à cet égard, car elle nous permettra de diversifier notre programmation et d’accueillir des groupes que ne pouvions pas nécessairement programmer auparavant. Ainsi, le vendredi, cette scène proposera au moins 6 groupes de hardcore, alors que nous n’en avions aucun en 2014. Même si nous avions fait jouer MADBALL en 2010 et HATEBREED en 2011, nous n’avions jamais eu l’occasion de faire une vraie journée hardcore. La troisième scène nous le permet : l’idée c’est de motiver un public particulier pour améliorer nos ventes de billets à la journée. Notre objectif idéal serait de vendre 6 000 pass trois jours et de compléter avec 1 200 ou 1 500 billets quotidiens – plutôt que les 400 ou 600 habituels.
Yves : En atteignant l’objectif de 8 000 festivaliers par jour, nous parviendrions en effet à un modèle économique sain et stable, sur lequel nous pourrions rester calés pendant plusieurs années. De toute manière, ceux qui craignent que le Motocultor Festival ne devienne une trop grosse machine devraient être rassurés par la topographie du site : nous sommes contraints par l’espace. On ne va pas commencer à déboiser pour agrandir le festival ! Nous savons très bien que le public du Motocultor est attaché à sa taille humaine, autant qu’à son esprit particulier.

En tout cas, chaque année, on constate que l’organisation du festival progresse.
Yves : Nous sommes très attentifs aux retours du public et nous essayons de les prendre en compte, même si ce n’est pas facile et que nous ne pouvons pas contenter tout le monde.
Yann : Nos rapports avec les autorités locales s’améliorent, également. En 2012, la commission de sécurité de la préfecture avait débarqué le vendredi à 10 heures, pour une ouverture du festival à midi… C’était trop juste et l’ouverture des portes avait été retardée de plus d’une heure : nous avions dû annuler les deux premiers groupes de la journée. Désormais, la préfecture envoie sa commission de sécurité la veille.

On n’a pas tellement parlé de l’affiche 2015, mais après-tout, elle parle d’elle-même… Alors, pour finir, quelle réaction avez-vous eue face à l’épisode SHINING de l’année dernière, quand Niklas Kvarforth avait agressé l’un des photographes, dans le pit-photo ?
Yann : On a tout de suite décidé de reprogrammer SHINING aussi rapidement que possible…

Ah ?
Yann : Absolument : et on prévoira une conférence de presse un peu spéciale où on enfermera Kvarforth dans un Algeco avec les photographes (rires) !


​L’affiche finale du Motocultor Festival 2015 sera dévoilée le vendredi 22 mai et les pass trois jours partent vite !
Surveillez la page Facebook de HARD FORCE, nous allons vous faire gagner des pass...


Blogger : Naiko J. Franklin
Au sujet de l'auteur
Naiko J. Franklin
Ses autres publications

2 commentaires

User
Karl Libus
le 21 mai 2015 à 18:28
Vraiment sympa cette interview...
User
Naiko J. Franklin
le 22 mai 2015 à 04:00
On se voit là-bas alors Karl ?
Merci de vous identifier pour commenter