
Pour chacun d'entre nous, il y a eu LE concert qui nous a donné le virus du metal. Le Vintage Live Report n'est donc pas un compte-rendu comme les autres puisqu'il a été le déclencheur d'une passion. Arno, un des deux frontmen de BLACK BOMB A, regarde dans le rétro…
J’ai découvert le hard-rock quand j’avais 9-10 ans avec des groupes comme BLACK SABBATH, MC5, LED ZEP, DEEP PURPLE… Après, il y a eu ROSE TATTOO, DEF LEPPARD, AEROSMITH, et puis ensuite les débuts du thrash avec METALLICA, SLAYER, EXODUS, METAL CHURCH, ANNIHILATOR… Avec mon meilleur pote, Loïc, l’actuel guitariste de NO FLAG, mon ancien groupe, on écoutait Francis Zégut que je ne remercierai jamais assez. Il a permis à pas mal de gens de notre génération de découvrir plein de groupes à une époque où Internet n’existait pas. Et puis on regardait les pochettes, on décortiquait tout. Ça, ça a disparu et c’est vraiment dommage…
Comme on habitait dans le nord de la France, on faisait tous les concerts en Belgique ou en Hollande, on n’allait pas à Paris. A l’époque, je n’étais pas encore à Lille, j’habitais à Rieulay, un petit patelin paumé dans le bassin minier. Il y avait Mica, le bassiste de NO FLAG qui est aujourd’hui dans VATICAN, un groupe de post-hardcore, et Hervé (Coquerel), le batteur de LOUDBLAST, qui jouait dans SCROTUM. On est de la même clique. C’était une belle époque. On était dans un réseau où l’on connaissait pas mal d’organisateurs de concerts, on se déplaçait beaucoup aussi. On faisait facilement 200 bornes pour aller voir un groupe. Loïc avait une Dyane, on partait aux concerts à 50 km/h (rires), c’était vraiment l’aventure.
« J’avais déjà vu pas mal de concerts, mais ANTHRAX et SUICIDAL en 1989 à Gand au Vooruit, c’est vraiment celui qui m’a embarqué. »
On allait aussi beaucoup chez les disquaires, comme Rock Mitaine, un magasin hyper pointu où on a découvert BAD BRAINS, DEAD KENNEDYS, THE EXPLOITED, MINOR THREAT, GBH… Un nouveau son, une approche « On n’en a rien à foutre » qui nous parlait. A l’époque, pour découvrir des groupes, il y avait aussi la presse spécialisée, comme Enfer Magazine. Comme je n’avais pas une thune, mes parents étant d’un milieu ouvrier, il m’est arrivé de voler des magazines dans les librairies. Et après, tous les potes les lisaient.
J’avais déjà vu pas mal de concerts, mais ANTHRAX et SUICIDAL TENDENCIES en 1989 à Gand au Vooruit, c’est vraiment celui qui m’a embarqué. La salle – une espèce de grand Elysée-Montmartre avec un balcon énorme – était pleine à craquer, il y avait une ambiance de folie. En plus, j’ai rencontré Mike Muir et ça m’a pas mal chamboulé. Mais à l’époque, on n’avait pas de smartphone, alors je n’ai pas de photo avec lui. On avait passé un pur moment, j’étais arrivé à monter sur scène et à faire du stage-diving. J’étais autant fan d’ANTHRAX et de Scott Ian, le gratteux, que de SUICIDAL.
« Je n’ai jamais vraiment vu d’embrouilles dans les concerts de metal, on est presque frères et sœurs en fait. J’ai toujours aimé cette ambiance. »
SUICIDAL, j’avais écouté sur skeud et je surkifais le groupe. Il y a eu l’intro et Trujillo a débarqué sur scène. Il est absolument impressionnant et avec sa basse, c’est un vrai poulpe, il doit avoir vingt doigts par main ! Il a levé les bras, Mike Muir a déboulé juste derrière et quand il a dit un truc comme : « Alors, vous êtes prêts à foutre la merde ??! », le public est devenu fou. Il y avait un mec dans le pit, un mastard du genre 1,90 m et 120 kg, qui se tenait dos à la scène et quand les mecs arrivaient vers lui en courant, il les jetait sur scène. Un truc de fou ! On connaissait toutes les paroles, des morceaux comme “Join The Army”, c’était les chœurs de l’Armée Rouge, tout le monde chantait.
Dans la salle, il y avait un balcon qui allait presque jusqu’au bord de la scène, et là-haut, il y avait un mec debout sur le bord, sans doute tenu par ses potes. Tout à coup, on l’a vu taper sur leurs mains pour qu’ils le lâchent. Et il a sauté dans le public. Du coup, des dizaines de personnes ont commencé à faire la même chose. Même Mike Muir n’en revenait pas… Avant qu’ANTHRAX ne monte sur scène, on est sorti pour boire une bière et fumer un bédo. Il y avait un mec qui vendait des T-shirts à l’arrache, des fakes d’ANTHRAX et de SUICIDAL. Un Ricain du staff est allé le voir pour lui dire qu’il fallait qu’il dégage et ils ont commencé à s’embrouiller. Et tout le monde a voulu défendre le Ricain parce que l’autre, il était là pour se faire de la thune, il aurait tout aussi bien pu vendre des T-shirts Madonna, il n’en avait rien à foutre de notre musique. Le mec s’est vite aperçu qu’il ne fallait faire chier personne de notre monde… Je n’ai jamais vraiment vu d’embrouilles dans les concerts de metal, on est presque frères et sœurs en fait. J’ai toujours aimé cette ambiance.
« Moi aussi, j’avais envie de monter sur scène, de voir les gens faire les fous sur mes morceaux… »
Quand on est retournés dans la salle, il y a eu l’intro d’ANTHRAX et là, ça a été la folie totale. C’était la tournée “State Of Euphoria” mais ils jouaient tous les titres d’Among The Living qui est, pour moi, leur meilleur album. J’en ai encore des frissons rien que d’en parler ! Scott Ian est un tueur, Joey Belladonna, un putain de chanteur… C’était l’époque du mosh, on portait des shorts assez colorés, comme ceux des musiciens. Ça a vraiment été une grosse gifle. Et ça m’a donné envie de faire la même chose. Sans aucune prétention évidemment, à mon humble niveau. Moi aussi, j’avais envie de monter sur scène, de voir les gens faire les fous sur mes morceaux…
Avec la petite asso qu’on a montée, Loïc et moi, on a commencé par organiser quelques concerts à la salle des fêtes de notre ville et on a fait jouer des groupes comme AGRESSOR et LOUDBLAST. Comme ça a super bien marché et que la municipalité nous a donné le feu vert pour en faire un autre, on a contacté Metalysee, une boîte de tours belge qui faisait tourner des groupes ricains comme D.R.I. et EXCEL et qui cherchait à faire jouer ces groupes dans le nord de la France. Et en 91, ils nous ont proposé une date énorme : MUCKY PUP avec BIOHAZARD, un groupe inconnu dont le premier album n’était pas encore sorti en Europe. C’était blindé de monde, ça aurait pu passer dans une salle deux fois plus grande.
« Quand BLACK BOMB A m’a proposé de les rejoindre en décembre 2001, j’ai eu quinze jours pour apprendre tous les morceaux avant notre premier concert. »
C’est à cette époque que je me suis acheté une basse fretless Yamaha avec l’argent que j’avais gagné en travaillant comme manœuvre avec mon père qui était dans le bâtiment. On se retrouvait dans la chambre de Loïc et on essayait de jouer sur les vinyles, de choper les riffs. On a formé un groupe qu’on a baptisé VENEREAL DISEASE, maladie vénérienne (rires), mais on galérait pour trouver des musiciens. Alors comme C.O.D. – le groupe de Gus, qui est maintenant avec Loïc le patron du LB Lab, l’ancien studio de Buriez – avait splitté, on s’est mis ensemble. Et vu qu’ils cherchaient un chanteur, je me suis lancé. On a été rejoints par Laurent à la batterie, et Marco à la guitare, qui est depuis devenu un énorme graphiste. C’est comme ça qu’est né NO FLAG fin 91-début 92.
J’ai rejoint BLACK BOMB A en décembre 2001, grâce à NO FLAG. On a partagé une affiche en 96 à Vélizy, on a bien accroché humainement et on est restés en contact. On est devenus super potes et ils m’ont proposé de les rejoindre en décembre 2001, juste avant les fêtes. J’ai eu quinze jours pour apprendre tous les morceaux avant notre premier concert. Ensuite, on a fait des albums et je suis parti en 2007, je n’étais plus trop dans le mood. Je suis revenu en 2014.

Photos d'Arno : collection privée
1. 1989 : Arno et Loïc (NO FLAG, LB Lab) en tournée avec THE ACCUSED
2. 1989 : Arno avec Loïc et Régis (SCROTUM)
3. 1990 : Steve Asheim de DEICIDE et Arno
Le futur proche de BLACK BOMB A
• En tête d'affiche du Mennecy Metal Fest le 12 septembre (Parc de Villeroy, 91540 Mennecy).
• Une tournée française pour promouvoir "Comfortable Hate", sorti en début d’année, avec au milieu des dates en Allemagne (avec les Québecquois de GET THE SHOT, « un groupe que j’adore, à mi-chemin entre SLAYER et RAISED FIST » dixit Arno), en Tchéquie, en Slovaquie et en Suisse.
• La suite du Disorder Tour, amorcé au printemps, avec DAGOBA et AQME.
• Une tournée au Canada du 7 au 16 novembre avec ANONYMOUS et KATAKLYSM.
• Un concert pour célébrer les 21 ans d’existence du groupe à Mulhouse au Noumatrouff, le 28 novembre. Une grosse soirée en perspective avec LOUDBLAST, TAGADA JONES et LOFOFORA, une grosse jam à la fin… et une surprise.
