« Endless Forms Most Beautiful » était un album très attendu, notamment pour son changement de vocaliste en 2012. En effet, Floor Jansen, qui a été appelée à la rescousse pour remplacer Anette Olzon au pied levé lors de la tournée « Imaginaerum », présente ici sa première participation sur les nouvelles compositions de Tuomas Holopainen. Et le moins que l’on puisse dire, c'est que la dame s’en sort magistralement bien. On pourra regretter toutefois que sa voix ne soit pas plus mise en avant au vu de l’étendue de ses capacités vocales. Elle est définitivement LA chanteuse de NIGHTWISH. Passant du registre le plus doux et sensible sur "Our Decades In The Sun", à l’énergie sur "Alpenglow", au lyrique sur la première partie de "The Greatest Show On Earth", jusqu’aux grognements sur "Yours Is An Empty Hope", elle est épatante. Et cette puissance prend toute son ampleur en tournée, comme cela a été démontré récemment.
L’autre changement majeur sur cet album est également la mise en avant des duos claviers-guitares, comme à la grande époque de « Oceanborn » et « Wishmaster », avec une orchestration toujours présente, mais moins omnipotente. Mais que les fans se rassurent, le lyrisme et le grandiose sont toujours là, comme en témoignent le titre d’ouverture "Shudder Before The Beautiful" et le majestueux "The Greatest Show On Earth" qui ne dure pas moins de 24 minutes ! Ce morceau est la pièce majeure de l’album et se veut l’ambition de décrire la naissance de la Terre jusqu’à sa fin programmée… Il est divisé en quatre parties, dont les trois premières sont jouées sur scène pendant la tournée. Et là, ce titre qui aurait pu sembler bien long et un poil ennuyeux (surtout le dernier chapitre) se révèle magique. Toute l’étendue de la culture, la fertilité de l’imagination et la richesse de la poésie de Tuomas sont mises en scène de la plus belle des manières.
Car on ne peut comprendre la musique de NIGHTWISH si on ne s’intéresse pas aux textes. Cet album aborde un thème nouveau : la vie d’un point de vue scientifique. Tuomas s’éloigne un peu de ses thèmes fétiches de l’enfance et de l’innocence perdue pour aborder un point de vue plus humaniste au sens global du terme. La beauté de la nature, sa poésie et sa puissance, ce que nous avons créé, l’art, la musique, les différentes cultures et civilisations, mais aussi les dégâts que l’être humain inflige à cette terre…
Cela se ressent dans plusieurs titres, notamment dans "Weak Fantasy" qui aborde le fanatisme religieux, "Yours Is An Empty Hope" qui serait inspiré de la première partie de la « Divine Comédie » de Dante, "My Walden" et ses accents celtiques, qui décrit un monde naturel rêvé et préservé, et le titre éponyme "Endless Forms Most Beautiful" tiré d’une citation de Darwin qui parle de la vie qui s’est développée et continuera de le faire, bien après le déclin de l’ère humaine. Il y a de la lumière dans cet album, mais aussi un regard réaliste et un peu sombre sur la nature humaine.
Seule une production un brin faiblarde à mon goût gâche la plaisir de la découverte de cet album. Il est cependant riche, varié, épique, mélodieux et bien évidemment symphonique.
En définitive, c’est un album qui ne se contente pas d’une seule écoute, tellement il fourmille de détails. Trop diront certains. Pour ma part cela me convient bien. On pourra aussi noter que certains titres ("Shudder Before The Beautiful", "Yours Is An Empty Hope" et "Alpenglow") rappellent furieusement d’anciens morceaux de NIGHTWISH. C’est un fait. Mais avec la voix de Floor, cela prend une autre dimension. Et puis, laissons le temps au temps. Cet album est en train de mûrir sur scène, où la cohésion du groupe est dorénavant totale. Ils sont heureux et ont plaisir à partager leur présence avec nous.
Gageons que le prochain album sera encore plus fort, grâce à cette entente qui s’est développée au sein du groupe.
Il est loin le temps des tensions internes et des guerres à coup de lettres ouvertes. Enfin !