Xavier, le chanteur et architecte conceptuel de MALEMORT, s’est allongé sur mon HeavyPsychoDivan… Le groupe français a sorti « Ball-Trap » son nouvel album disponible uniquement sur www.malemort, une pièce maîtresse musicale dans leur carrière et dans le rock français.
Quel est ton souvenir d’enfance ou d’adolescence le plus marquant ?
Indéniablement, le parc du lycée militaire de Saint Cyr, ses brumes et ses amours clandestines, dans un cadre où garçons et filles devaient se tenir à distance. L’interdit sublime les sentiments. Et puis la première fois où j’ai entendu résonner le lugubre "For Whom The Bell Tolls" de METALLICA dans l’immense dortoir : ces cloches sonnaient la révolte, et cette musique, tout-à-coup, signifiait tout pour moi, elle était moi.
Quelles sont tes passions à côté de la musique ?
Lorsque la musique me laisse un peu de temps… J’ai besoin de littérature, que ce soit Hugo, Balzac, Giono, Bernanos, Céline, Hemingway, Buzzati, Julien Gracq et puis les poètes, Rimbaud, Verlaine, Baudelaire… Oui, je dois bien avouer que ça paraît moins "metôl" que Lovecraft ou que le cinéma d’horreur (qui me fout vraiment les jetons !).
Quel est ton fantasme le plus fou (il n’est pas forcément sexuel) ?
Etant donné l’aspect assez peu privé de ton divan, je te remercie de me permettre d’éviter d’avoir à partager mes idées de galipettes costumées avec une vilaine servante désobéissante ! De naturel sociable, je fantasme pourtant souvent la solitude du garde forestier ou du bûcheron. Je serais seul face à la nature, dans un relais de chasse, quitte, de temps en temps, à… punir une vilaine servante désobéissante !
As-tu un rituel avant de dormir ?
Hygiène bucco-dentaire avant tout ! Et puis dans la glace, vérifier qu’on ressemble toujours au gamin qu’on a été et constater parfois que le temps nous joue de bien vilains tours...
« J’ai un penchant pamphlétaire qu’il faut que je réfrène. » - Xavier (MALEMORT)
Pratiques-tu le ball-trap ?
Uniquement verbal ! J’ai un penchant pamphlétaire qu’il faut que je réfrène.
Quelle est la chanson qui te représente le plus ?
Je crois que je me situerais entre le spleen absolu de Barbara et l’énergie vitale brute de "Welcome To The Jungle" de GUNS N’ROSES.
NOIR DESIR ou TRUST ?
Sans hésiter, et au risque de décevoir les metalleux, NOIR DESIR, mille fois. D’abord pour la poésie de la langue, mais aussi pour le lyrisme rock, la diversité des ambiances et la voix magique de Cantat. "Le Fleuve", "Si rien ne Bouge" ou "Aux Armes" (sur un texte de Léo Ferré)…
Les BERU ou les WAMPAS ?
Là aussi, malgré le capital sympathie énorme de Didier Wampas, je choisis les Bérus, pas pour la finesse du propos politique, (cependant, quelle capacité à trouver des slogans ultra efficaces), mais pour la violence authentique et la capacité à faire des hymnes rock avec deux accords et une boîte à rythme.
Renaud ou Serge Gainsbourg ?
Plus difficile, mais je dirais Gainsbourg, celui des 60/70s. C’est un dandy, il a cette culture classique qu’il imprègne de décadence. Et puis "Melody Nelson", quand même ! J’en voudrai toujours à THERION d’avoir repris "Initials BB" ! Cette chanson est un mythe pour moi. Cependant, le Renaud des années fin 70 et 80 a écrit des textes fabuleux et de très belles chansons. "Mistral Gagnant" est un chef-d’œuvre ab-so-lu !
Aznavour ou ABBATH ?
Aznavour, bien sûr ! C’est la classe ! Il appartient à ce clan des rockstars. On pense au vieux monsieur, mais il faut voir le mec en costard, manteau de fourrure, lunettes de soleil, orgueil fou, des 70’…
Thiefaine ou Benabar ?
Soyons sérieux ! Thiéfaine ose toucher les tisons brûlants de la vie dans ses textes. "Les dingues et les Paumés".
Si tu étais une drogue, ce serait quoi ? Pourquoi ?
Je choisis l’absinthe : la couleur, la beauté du geste, la cuillère en argent, la folie furieuse, l’hybris…
Quelque chose d’autre d’addictif pour toi ?
Un bon bœuf bourguignon, un onglet à l’échalote. Et puis le Picon-Leffe.
« La révolte, qui me nourrit depuis toujours, de même que l’enthousiasme... » - Xavier (MALEMORT)
Quelles sont les 3 émotions qui te caractérisent le plus ?
La révolte, qui me nourrit depuis toujours, de même que l’enthousiasme, et puis peut-être la nostalgie, comme un refuge.
As-tu un modèle de vie, une icône?
Gabin, la droiture rude. Le gars à l’ancienne. Il est une vedette à Hollywood en 41, il est peinard loin de la guerre, il sort avec Marlène Dietrich, icône mondiale de la femme libérée, mais à quarante berges, il laisse tout pour s’engager dans la France Libre, anonymement. Il sera chef de char. Il sait qu’il fout en l’air sa carrière américaine. Et surtout, il ne s’en vantera ensuite jamais. Il avait fait ce qu’il devait faire, point barre. Un bonhomme, quoi…
Qu’est ce qui t’a marqué en 2016 ? en bien, en mal...
L’ "Ordre Mondial" comme on disait depuis la deuxième moitié du 20ème siècle, porte de plus en plus mal son nom. Les cartes se redessinent. L’humanité se retrouve coincée entre l’ultralibéralisme mondial destructeur et le fondamentalisme. Du coup, faire de la musique m’apparaît à la fois dérisoire et essentiel.
Tu as les clés pour diriger l’état pendant 24 heures. Quelles seraient tes premières mesures ?
L’exercice du pouvoir notamment dans un système mondialisé est si complexe ! Je crois que le politique ne devrait pas oublier qu’il n’est pas un simple gestionnaire, mais qu’il doit être capable de faire des choix de société, c’est son rôle. Ça demande du courage et une vision de la société.
Sinon, autant confier les leviers aux multinationales, qui feront des choix dans lesquels l’humain n’est jamais une priorité. C’est la solution trop souvent retenue, par coupable facilité.
Il faut donc lutter à mort contre le lobbying exercé par ces forces, qui bloque des prises de décision indispensables à l’intérêt du citoyen.
Je pense également que la culture française est objet d’émerveillement aujourd’hui encore dans le monde, que nous devrions en être fiers, au lieu de renoncer à l’enseigner à nos gamins : parce que la culture, c’est une identité, une filiation à laquelle on peut se rattacher, une capacité à réfléchir, à devenir indépendant, à savoir envisager l’autre, sa différence…
Pour finir, quels sont les albums qui t’ont marqué en 2016 et tes projets en 2017 ?
Sans hiérarchiser réellement, voilà ce que j’ai aimé :
RIVAL SONS « Hollow Bones »
GOJIRA « Magma »
David Bowie « Blackstar »
DEATH ANGEL « The Evil Divide »
SUICIDAL TENDENCIES « World Gone Mad »
MYRATH « Legacy »
KORN « The Serenity Of Suffering »
OPETH « Sorceress »
TESTAMENT « Brotherhood Of The Snake »
THE ANSWER « Solas »
Pour 2017, j’aimerai réussir à transposer le succès du disque « Ball-Trap » sur scène en reprenant la route avec MALEMORT... Nous serons en concert pour une date à ne pas manquer avec ACYL et 6:33 le 20 avril au Divan du Monde, on vous attend nombreux(ses). Toutes les infos nécessaires sont sur notre site www.malemort.online, n'hésitez pas à le parcourir.
