Vous vous souvenez du générique de la série TV La Petite Maison Dans La Prairie ? Cette petite fille toute mimi qui dévale la pente au milieu des fleurs ? SHADOW OF INTENT, c’est un peu la même chose sauf qu’à la place de la frêle gamine, vous mettez un joli T-Rex de 7 tonnes qui n’a pas mangé depuis huit jours et qui soudainement vous aperçoit en bas de la pente. Et là, alors que son hurlement assourdissant s’approche de vous en même temps que le sol se met à trembler de plus en plus fort, les questions se bousculent dans votre tête : « Est-ce que je me fais un dernier selfie ?», « Serait-il par hasard végétarien ? », « Où est la télécommande ? ». Et surtout : « Pourquoi ce chroniqueur évoque cette série débile ? ».
C’est vrai que la comparaison est un peu tirée par les nattes... En fait SHADOW OF INTENT ressemblerait plus à la descente infernale en 2CV du gendarme de Saint-Tropez avec la bonne sœur complètement barge au volant et CANNIBAL CORPSE à fond dans le lecteur radio-cassette. Vous savez que les freins ont lâché, que la ceinture de sécurité inutilisable reste coincée dans la portière (qui du coup ne s’ouvre plus) et que l’absence d’airbag suggère pour votre crâne chauve ruisselant de sueur sous le képi une rencontre avec le pare-brise dans les secondes à venir. Et là, vous vous dites : « je comprends enfin la différence entre avoir la foi et avoir les foies. », « l’immaculée conception de mon slip léopard tiendra-t-elle jusqu’à l’arrivée ? » Et surtout : « Où est cette maudite télécommande ? ».
Mais trêve de métaphores télévisuelles futiles ! Sous le nom de SHADOW OF INTENT se cache un projet studio réunissant Ben Duerr, un vocaliste énormissime (il faut le voir reprendre "Possession" de WHITECHAPEL...), et un guitariste virtuose en la personne de Chris Wiseman qui s’occupe également de la programmation de la section rythmique et des parties clavier. Cela a beau sortir d’un PC, le résultat de « Primordial » est tellement spectaculaire qu’il risque de plaire même aux allergiques du son numérique. Face à un tel déferlement de brutalité, de subtilités techniques et de compositions alambiquées qui dénotent d’un véritable travail d’orfèvre en amont, méticuleux et passionné, tout auditeur ne peut qu’être emporté par la puissance du tsunami sonore des Américains (cf l’intro magnifique de "The Prelude To Bereavement"). Passant du deathcore violemment saccadé aux nappes symphoniques plus froides du black metal ("The Cosmic Inquisitor") tout en conservant des parties typiquement death mélodique sur fond de rythmiques rapides comme l’éclair et de soli fulgurants ("The Shaping Sickness"), « Primordial » déglingue tout sur son passage. TOUT ! C’est comme si les tour-bus d’IN FLAMES, de CHILDREN OF BODDOM, de SEPTIC FLESH et de SPAWN OF POSSESSION s’étaient télescopés pleine bourre au beau milieu d’un carrefour ("The Battle Of Maginot Sphere".
Un mélange de genre en droite ligne avec leur premier EP « Inferi Sententia » sorti en 2014 dont « Primordial » reprend l’intégralité des titres inspirés de la saga vidéoludique Halo, même si la comparaison entre les deux univers reste assez… flood, si on peut dire !
Finalement, l’album de SHADOW OF INTENT ressemblerait plutôt au crash du film Gravity, quand vous pénétrez dans l’atmosphère terrestre et que le frottement de l’air sur la carlingue enflamme la capsule, que tout grince et remue autour de vous alors qu’à l’intérieur le compteur de vitesse s’affole. Vous avez l’afflux sanguin qui vous bourdonne dans les tempes et l’estomac au bord des lèvres alors que l’ordinateur de bord enclenche la sonnette d’alarme pour vous informer du blocage d’ouverture automatique du parachute. Et là, vous vous dites : « Super, j’ai retrouvé la télécommande ! ».
(mise en veille)
