8 avril 2017, 23:49

BETIZFEST 2017

@ Cambrai (Palais des Grottes)

Cette année le BETIZFEST fêtait ses 15 ans. Au programme, une affiche alléchante, répartie sur deux jours. Le vendredi les organisateurs proposaient une soirée orientée punk/hardcore avant d'offrir, le lendemain, une procession de groupes metal. Les festivités se tenaient au Palais des Grottes de Cambrai, une salle certes désuète mais très bien mise en valeur... et bien pratique avec ses nombreuses places de parking disponibles à proximité. Les spectateurs bénéficiaient d'espace, pouvaient déambuler tranquillement devant les stands alléchants de merchandising, sortir pour se restaurer ou souffler entre deux prestations. Tout était donc réuni pour vivre deux jours radieux de décibels sauf, énorme problème, un son qui oscillait entre le passable et le catastrophique. Certains groupes – surtout LOUDBLAST et ARCH ENEMY mais aussi SICK OF IT ALL – ont ainsi vu leur musique transformée en une triste bouillie. Dommage...

Les fans de punk sont conviés à une plongée dans leur jeunesse, à un voyage dans le temps avec le concert des RATS. Figure du punk/rock français formée dans les années 80, compagnons de route des SHERIFFS ou de PARABELLUM, le groupe a splitté en 1996. Il est de retour en 2017 pour une tournée de reformation, le Grand Rat-tour. Les héros ont vieilli, les visages sont bien loin des figures juvéniles gravées dans nos mémoires. A l'image du guitariste, squelette marqué par les années, les musiciens semblent fatigués mais livrent un set énergique, entamé par un « ça faisait longtemps » joyeux de Patrice. Au milieu du show, changement de batteur ! Si les chansons ont quelque peu vieilli, les anciens apprécient ces histoires sarcastiques de banlieue, de débrouille et de glande. La reprise de "Il est Cinq Heures" (Dutronc) fait mouche comme l'efficace "De Barbès à Belleville". L'enchaînement final – "Je m'emmerde", "Enfant à Problèmes" et le classique "Tequila" – suscite l'enthousiasme.

Après les eighties, place à la décennie suivante avec NO ONE IS INNOCENT qui existe depuis maintenant plus de 20 ans ! La bande de Kemar offre pendant 50 minutes une véritable claque, après un vicieux "Djihad Propaganda" initial. Elle enchaîne les uppercuts, sautille doucement, fait monter la tension avant d’asséner des directs foudroyants ("Nomenklatura"). La foule est en transe sur l'incontournable "La peau", tube imparable tiré du premier album du groupe (1994), dans l'esprit RAGE AGAINST THE MACHINE. Les spectateurs sont invités à monter sur les planches pour un festival bon enfant de sauts en tout genre ! « Propaganda », le dernier disque du groupe (2015), est mis en avant avec cinq titres dont le cri de rage "Charlie", qui conclut le show. Kemar prend des accents à la Bertrand Cantat et, entre discours politiques et plongée dans le foule, se montre un tribun possédé. Il s'appuie sur une formation au taquet, qui distille une musique carrée, ultra efficace – l'intro à la basse de "Silencio", les riffs saignants du guitariste au bonnet.
Pas facile  pour TAGADA JONES de passer après un tel ouragan ! Après une intro angoissante, sous des lights agressifs et devant un parterre de plus en plus dense, les Rennais assènent leur hardcore révolté teinté de touches metal – à l'image d'un "Instincts Sauvages", proche cousin du "Refuse/Resist" de SEPULTURA. Arpenteurs de toutes les scènes de l'hexagone, dévoreurs jamais rassasiés de bitume, ils insistent sur "La Peste et le Choléra", tout frais dans les bacs et dont la pochette orne le backdrop. Si la prestation est solide, si la communication avec les fans déchaînés est bonne, il manque un je ne sais quoi, un petit quelque chose pour emporter totalement l'adhésion.



Après cette trilogie française, place à la légende new-yorkaise du hardcore, SICK OF IT ALL. Peut-être en raison de l'heure tardive (00h35), de nombreux spectateurs quittent les lieux, sans respect pour les vétérans du Queens. Malgré un set solide, qui passe en revue leur longue carrière, de leurs premiers titres aux plus récents "Get Bronx" et "DNC", et une intensité jamais démentie, à l'image des gesticulations incessantes de Peter Koller, guitariste bondissant, ils ne parviennent pas à faire brûler la salle. Il faut bien admettre que les conditions sonores - une basse comme absente et des vocaux brouillons – compliquent la tâche des musiciens. Attentifs, parfois admiratifs, les spectateurs intériorisent sans vraiment exploser. Le chanteur se montre pourtant charismatique, remercie en français et le groupe, fidèle à sa réputation, livre une prestation féroce – "Scratch the Surface", "Built To Last".

Le samedi commence avec deux groupes locaux. Les hostilités sont ouvertes par SADRAEN qui propose un death metal lourd, aux longs morceaux lorgnant vers le doom, regardant vers les vieilles productions Peaceville. Appliqués les quatre musiciens sont concentrés sur leur instrument et livrent une demi-heure qui laisse présager un futur intéressant. Leur premier album est prévu pour 2017 !
Place ensuite aux locaux du festival, les Cambrésiens HEADBLASTER. Présents dans le public l'année dernière, ils sont maintenant sur scène. S'appuyant sur le premier EP, « Hangover », ils se révèlent convaincants. Leur stoner, rehaussé d'influences DOWN ou PANTERA, crée une ambiance sudiste enfiévrée, malsaine et énergique. Ils confirment ainsi leur excellente réputation naissante.
Deux chanteurs pour des paroles rapées, double grosse caisse et growls pour l'influence death, des guitares déstructurées metalcore ou djent : voilà la mixture indigeste proposée par SMASH HIT COMBO. Entre les morceaux, l'un des hurleurs multiplie les discours de geek, entre Retour vers le Futur, Star Wars, Nintendo et Sega. Les plus jeunes apprécient et répondent aux injonctions des musiciens pour bâtir des walls of death. Les autres quittent la salle... et ne se pressent pas de revenir pour BETRAYING THE MARTYRS. Les Français, qui se revendiquent chrétiens, sont portés par leur charismatique chanteur anglais aux vocaux agressifs. Si la salle est réceptive et bondit à l'unisson, les musiciens ne brillent guère par leur originalité : leur deathcore aux breaks prévisibles s'avère vite être lassant... surtout quand le chant clair du claviériste brise la fougue de la prestation.
 

LOUDBLAST, malgré un son si catastrophique que des spectateurs viennent apostropher les techniciens à la table de mixage, sert un plat brûlant, hélas un peu trop vite avalé – 45 minutes contre une heure annoncée. A l'image du t-shirt OTARGOS porté par Drakhian, le set nous plonge dans les 90's. Les Lillois, impressionnants de force et de puissance avec un Buriez toujours aussi bestial, attaquent avec les quatre premiers titres de « Sublime Dementia » – mention spéciale à l'incontournable "Subject To Spirit". Ils enchaînent avec le dernier morceau de cet album, "My Last Journey", avant de visiter leurs autres productions de cette décennie enchantée pour les fans de death. Le chanteur s'offre de petites rasades de Jeqck Daniel's, apostrophe la foule et rappelle que LOUDBLAST est déjà venu au BetiZ en 2012. Le concert s'achève par la paire brutale "Malignant Growth" / "Cross The Threhhold". Rageant que les conditions aient été si désagréables... et que le quatuor n'ait pas joué l'intégralité de « Sublime Dementia » !

Pas de quartier durant les 50 minutes de THE HAUNTED ! D'entrée, l'enchaînement "No compromise", "99", morceaux inauguraux de l'album « rEVOLVEr », et "Trespass", indique clairement la couleur : les Nordiques sont impitoyables et déversent leur cocktail death/thrash avec férocité. Entre quelques traits d'humour, Marco Aro joue de son imposante silhouette pour incarner une musique ultra brutale, à l'image du bref et punkoïde "My Enemy", crachat sanglant d'une minute ! De rares pauses mélodiques, type Göteborg, et une dose de groove ("Hollow Grond") permettent de respirer avant une nouvelle déflagration ("Undead"). Le groupe honore chacun de ses albums dans un set énervé et brillant d'une rage rare.

Pour conclure le BetizFest 2017, ARCH ENEMY offre un show qui aurait pu être mémorable sans les problèmes de son... qui ont fait fuir certains festivaliers avant la fin du spectacle. Dans le sillage d'une Alissa White-Gluz aussi charismatique que talentueuse, la bande à Michael Amott délivre ses compositions qui mêlent technicité haut de gamme – quelle brochette de musiciens talentueux ! - et agressivité death bien sentie aux relents parfois heavy. La chanteuse s'adresse en français à la foule pour annoncer la fin de l'enregistrement du nouvel album, pour assurer la promo du live « As The Stages Burn! ». Elle arpente la scène, fait voler ses cheveux bleus en headbanging endiablé, brandit un drapeau tout en assurant ses parties, entre growls impressionnants et vocaux mélodiques. Ses comparses assurent sans trembler pour livrer un concert haut de gamme. Une révélation pour moi qui ne m'étais jamais vraiment penché sur ce groupe !


Photos : Mathilde Laurence (Portfolio) & Christian Ballard (Sick Of It All)


Blogger : Christophe Grès
Au sujet de l'auteur
Christophe Grès
Christophe a plongé dans l’univers du hard rock et du metal à la fin de l’adolescence, au tout début des années 90, avec Guns N’ Roses, Iron Maiden – des heures passées à écouter "Live after Death", les yeux plongés dans la mythique illustration du disque ! – et Motörhead. Très vite, cette musique devient une passion de plus en plus envahissante… Une multitude de nouveaux groupes a envahi sa vie, d’Obituary à Dark Throne en passant par Loudblast, Immortal, Paradise Lost... Les Grands Anciens – Black Sabbath, Led Zep, Deep Purple… – sont devenus ses références, comme de sages grands-pères, quand de jeunes furieux sont devenus les rejetons turbulents de la famille. Adorant écrire, il a créé et mené le fanzine A Rebours durant quelques années. Collectionneur dans l’âme, il accumule les set-lists, les vinyles, les CDs, les flyers… au grand désarroi de sa compagne, rétive à l’art métallique.
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