5 juin 2017, 15:30

FAITH NO MORE

• "Angel Dust"

Blogger : Clément
par Clément
Album : Angel Dust

La première partie des années 90 n'a pas été tendre pour les métalleux de tout poil. Les retournements de vestes à patch ont ouvert la voie aux Jeans XXL, la plupart frappés par une large déchirure au niveau du genou, et les chemises-bûcheron à carreaux se sont faites camarades de tondeuses qui vibraient au son de nuques propres et sans bavures. Et encore, je vous épargne les débats qui enflammaient aussi les cours de collège et de lycée à l'époque : Poivre Blanc ou Waïkiki ? Creeks ou Chevignon ? Starter ou Teddy ? Pump ou Air Jordan ? Megadrive ou Super NES ? METALLICA ou GUNS N' ROSES ?

Choisis ton camp camarade !

Mais le début des années 90 en matière de musique burnée, c'est aussi une bande de cinq lascars originaires de San Francisco, FAITH NO MORE, qui amène avec lui plus qu'un son... un véritable tsunami sonore. « The Real Thing » voit le jour en 1989, salué unanimement par la critique. Pour cause, l'album est excellent, comportant un paquet de morceaux imparables, "From Out Of Nowhere" et "Epic" en ligne de mire, véritables classiques de set-lists toujours actuelles... amenant par la même au grand public les premiers préceptes de ce qui sera alors qualifié de "fusion". Rap, metal, funk, noise, un grand bordel dont les plus grands ambassadeurs, LIVING COLOUR, RAGE AGAINST THE MACHINE, MORDRED, 24-7 SPYZ ou encore PRIMUS se feront une joie de représenter avec fierté les couleurs pendant une bonne décennie. Et plus si affinités...

Avec « Angel Dust » sorti un 8 juin 1992, FAITH NO MORE reprend et distribue en même temps les cartes du style. Et c'est certainement, comme pour nombre d'entre-vous, avec cet artwork, intrigant et halluciné, qu'il attire déjà l'attention. Côté pile, un cygne, majestueux, trônant fièrement sur un fond bleu aquatique. Côté face, l'arrière-boutique d'une boucherie où s'exposent une tête de veau mélancolique aux côtés de poulets généreusement déplumés, de belles côtelettes bien dodues en sus. Le Yin et le Yang, une subtile contradiction que marie à merveille le groupe sur ce quatrième album, pétri de haine et d'amour.

Pourtant, l'album est loin d'avoir fait l'unanimité à sa sortie. Trop barré, trop imprévisible, trop avant-gardiste, il laisse la presse et les fans incrédules. Leur faut-il un  temps d'adaptation ? C'est probable car le groupe n'a rien fait pour caresser l'auditeur dans le sens du poil ! Bien au contraire, la prise de risques est ici maximale avec des titres comme "Malpractice", "Jizzlober" ou "Caffeine" qui montrent un groupe bien décidé à en découdre. Heavy, metal, and so what ? Le plus fort quand l'on a trouvé une recette qui fonctionne, n'est-ce pas d'aller tester d'autres saveurs histoire de voir si le plat des petits copains est plus relevé ?

Et sur ce point, il y en a bien un qui a tout compris. Mike Patton, vocaliste émérite du groupe, qui pousse tous les compteurs dans le rouge. Non, le bougre ne braille plus, enfin moins, mais il module à la perfection ses cordes vocales entre envolées rap, grognements presque death metal et parties que l'on pourrait qualifier de pop. Du neo-metal avant l'heure ? Pas faux... même si ici le calibrage fait défaut tant le groupe se plait à expérimenter. Prenez l'hymne "Be Aggressive" où une intro à base de claviers inquiétants se mêlent à des chants d'enfants qui feraient se pâmer les Choristes. Le tout sonne pourtant juste et sans fausse note avec une section rythmique enjouée, presque funk, qui donnera quelques frissons aux plus aguerris d'entre-vous. Non, RED HOT CHILI PEPPERS n'a rien inventé. Mais il le fait bien lui aussi...

La musique est terrible, oscillant entre chaleur et frimas, chaque titre se révélant unique. Mais ce qui fait le charme de cette poudre d'ange est aussi son habillage sonore : énorme, puissant, clair, tribal, signé Andy Wallace. Et celui-ci sert à merveille les guitares de Jim Martin, célèbre barbu qui se fait ici un plaisir indescriptible, oeuvrant à merveille entre mélodies sombres et riffs plus velus, le tout toujours servi avec un groove immédiatement identifiable. Les claviers de Roddy Bottum ne sont pas en reste, exubérants et subtilement calés dans chaque morceau (Raaaaah ce "Land Of Sunshine" lâché d'entrée de jeu), quant aux descentes de toms de Mike Bordin, celles-ci demeurent imparables, nettes, précises, tribales, un vrai bonheur. Et la basse de Billy Gould me direz-vous ? Celle-ci est onctueuse et sans faux col, inondant de toute sa classe chacun des treize titres (puis quatorze dans l'édition comportant "Easy"), présents sur cette galette. 

Oui, « Angel Dust » est un chef d'oeuvre. Et, vingt-cinq ans plus tard, il demeure intemporel. Toujours aussi jouissif.

Blogger : Clément
Au sujet de l'auteur
Clément
Clément a connu sa révélation métallique lors d'un voyage de classe en Allemagne, quelque part en 1992, avec un magazine HARD FORCE dans une main et son walkman hurlant "Fear of the Dark" dans l'autre. Depuis, pas une journée ne se passe sans qu'une guitare plus ou moins saturée ne vienne réjouir ses esgourdes ! Etant par ailleurs peu doué pour la maîtrise d'un instrument, c'est vers l'écriture qu'il s'est tourné un peu plus tard en créant avec deux compères un premier fanzine, "Depths of Decadence" et ensuite en collaborant pendant une dizaine d'années à Decibels Storm, puis VS-Webzine. Depuis 2016, c'est sur HARD FORCE qu'il "sévit" où il brise les oreilles de la rédaction avec la rubrique "Labels et les Bêtes"... entre autres !
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