Le 12 août 1991, METALLICA sort son cinquième album éponyme. Rapidement rebaptisé « Black Album » par les musiciens, il va faire des pionniers du thrash un des plus grands groupes de metal en activité. Voici douze infos que vous connaissiez peut-être déjà… ou pas.
1. Contrairement à ce qu’imaginent la plupart des fans de la première heure, ce n’est pas Bob Rock, producteur de groupes “mainstream” comme BON JOVI, MÖTLEY CRÜE ou THE CULT et maître d’œuvre du son de ce cinquième album, qui a poussé METALLICA vers de nouveaux horizons musicaux, trop “édulcorés” à leur goût. Forts d’un premier album certifié platine (plus d’un million de copies vendues) pour « … And Justice For All », les musiciens ont une idée bien arrêtée de la direction musicale qu’ils veulent suivre quand ils entrent en studio. « Nous avons réalisé que dans l’ensemble, les gens trouvaient nos morceaux beaucoup trop longs, déclarera Kirk Hammett au magazine américain Rolling Stone en 1991 pour expliquer la disparition des titres à tiroirs qui étaient leur marque de fabrique. Pendant les concerts, on voyait que les fans décrochaient et il était évident qu’ils ne s’éclataient pas autant que nous. ».
Même le groupe commence à en avoir sa claque des morceaux à rallonge. « Un soir, après avoir joué “… And Justice For All”, l'un d'entre nous a dit : “C’est la dernière fois que l’on joue ce putain de titre”… » Heureusement, comme il n’y a que les imbéciles qui ne changent jamais d’avis, “Justice…” continuera à faire des apparitions régulières dans la setlist.
2. Pour la première fois depuis leurs débuts, c’est en “live” que les musiciens enregistrent les parties rythmiques en studio, c’est-à-dire tous ensemble. « Jusque-là, Lars et moi, on posait les parties rythmiques sans Kirk ni Jason (Newsted), ou alors Lars jouait tout seul au clic, confiera James Hetfield à Guitar World en 1991. Cette fois, je voulais que l’on ait cette osmose de groupe en studio. » C’est aussi la première fois que METALLICA a répété la plupart des nouvelles compositions pendant presque deux mois avant de commencer l’enregistrement.
3. “Enter Sandman” (littéralement “le marchand de sable est passé”), qui ouvre l’album, est devenu un classique de METALLICA autant que du metal. Pourtant, même si ce sera finalement le premier single, c’est “Holier Than Thou” qui avait d’abord été pressenti comme première piste et premier extrait du « Black Album ». Ce vieux renard de Lars aura une fois de plus le nez creux en sentant le potentiel énorme d’“Enter Sandman” qui sortira finalement en éclaireur, le 29 juillet 1991 en Europe, le 30 aux USA. A noter qu’au départ, les lyrics parlaient non pas de la peur du noir d’un enfant à l’heure d’aller se coucher mais de la mort subite du nourrisson. Le sujet étant particulièrement morbide, James a été invité par le management et Bob Rock à revoir sa copie. Dont acte.
“Enter Sandman” grimpera jusqu'à la 16e place du top Hot 100 US et sera suivi de quatre autres singles qui ne parviendront pas à percer dans le top 20 : “The Unforgiven” (35e), “Nothing Else Matters” (34e), “Wherever I May Roam” (82e) et “Sad But True” (98e).
4. Jusque-là habitué aux enregistrements aux airs de “Blitzkrieg”, METALLICA passera dix mois en studio avec Bob Rock à la console. Témoignage de la gestation de l’album, qui coûtera un million de dollars, le très instructif Un an et demi dans la vie de METALLICA, un documentaire en deux parties réalisé par Adam Dubin, sortira en 1992 sous forme d'une double cassette VHS. Bizarrement, le DVD existant n'est disponible que pour les territoires américain et canadien. Une injustice flagrante que tous les fans du vieux continent aimeraient bien voir réparée…
5. Pendant le travail de préproduction, Rock s'aperçoit que James et Kirk sont accordés en mi sur dix des douze titres. Après avoir convaincu le groupe de s’accorder en ré, “Sad But True” gagne en lourdeur et en efficacité, tandis que “The God That Failed”, pour lequel ils sont accordés en mi bémol, est nettement plus sombre. A l’époque, c’est la première fois que les musiciens utilisent trois accordages différents de guitare sur un album.
6. Jusque-là, James était certes considéré comme un excellent guitariste rythmique et l'un des meilleurs frontmen en activité mais pas comme un grand chanteur. Arrivé en studio, il demande à Rock (en photo ci-dessus avec le groupe en mode lunettes noires pour nuits blanches) comment faire pour chanter comme Chris Isaak sur “Wicked Game” pour “The Unforgiven” et “Nothing Else Matters”. « Je n’ai jamais vraiment chanté, plutôt gueulé » dira-t-il au producteur qui le guidera jusqu’au résultat que l’on connaît. « Dans le passé, James avait toujours doublé ses voix, se souvient Bob Rock. Il se contentait d’enregistrer la même ligne de chant sur une deuxième piste, il ne faisait jamais d’harmonies. Je lui ai dit qu’au lieu d’écouter ses voix dans les écouteurs, je voulais qu’il les écoute sur les enceintes. La différence était flagrante. Cela a donné une toute nouvelle dimension à son chant. ».
7. “Nothing Else Matters”, sans conteste le titre le plus connu du groupe tout public confondu, est une power ballad que James a écrite pour sa petite amie de l’époque. Un peu l’équivalent de “Beth”, signée et chantée par Peter Criss chez KISS, qui dit que loin des yeux ne signifie pas toujours loin du cœur. Si Lars Ulrich a tout de suite aimé la chanson (c’est d’ailleurs lui qui a convaincu le groupe de l'inclure sur l'album, alors que James ne voulait pas en entendre parler au début), Kirk Hammett était plus… dubitatif. « Je me suis dit : “Sérieux, il a écrit une putain de chanson d’amour pour sa girlfriend ???” » Oui, mais sans prononcer une seule fois le mot “amour”... L’honneur est (quasiment) sauf ! On notera au passage qu’exception faite du frontman, les trois autres musiciens étaient en plein divorce à l’époque…
8. “Nothing Else Matters” est l’un des rares titres enregistrés par METALLICA sur lequel Kirk ne joue pas, a révélé Rolling Stone, même s’il apparaît dans la vidéo. Hetfield a enregistré l’intro acoustique et le solo. Du coup, Hammett a dû l’apprendre pour le jouer en live.
9. « Metallica », qui demeure l’un des albums les plus vendus de tous les temps avec, à ce jour, environ 30 millions de copies écoulées dans le monde, dont plus de 16,6 millions outre-Atlantique, est resté classé 282 semaines dans le Top 200 du Billboard aux USA – soit environ 5 ans et 4 mois. Entré directement en tête des charts nationaux, il trustera la première place pendant quatre semaines et se vendra à 597 000 exemplaires (dont 5 800 cassettes !) rien qu’aux States la première semaine de sa sortie.
En 2016, il s’est vendu en moyenne à 5 000 exemplaires (numériques et physiques) par semaine dans le pays natal du groupe. Ce qui signifie qu’en gros, un Américain sur 20 a son exemplaire du « Black Album ». Un chiffre qui donne le vertige… Et, depuis 1991, « Metallica » est tout simplement l’album qui s’est le plus vendu, tous genres confondus ! A titre indicatif, juste pour se faire mal, il n’est pas monté plus haut que la 53e place dans le top des ventes de notre beau pays. Mais “Nothing Else Matters” s'est quand même hissé jusqu'à la 10e place des ventes de singles en France.
10. Le serpent à sonnette de la pochette est le même que celui qui figure sur le Gadsden Flag, l’étendard de ralliement des libéraux et libertariens pendant la guerre d’Indépendance des Etats-Unis qui opposa les Treize colonies d'Amérique du Nord au Royaume de Grande-Bretagne, de 1775 à 1783. Le slogan était “Don’t tread on me” (ne me piétinez pas) qui est d’ailleurs le titre du sixième des douze morceaux qui composent l’album.
11. Le 3 août 1991, soit neuf jours avant la sortie officielle de l'album, METALLICA organise en avant-première mondiale une écoute gratuite au Madison Square Garden de New York à laquelle assistent plus de 10 000 fans. « A plusieurs reprises, je suis allé observer le public à la dérobée pour voir sa réaction, confiera James à Rolling Stone. Je voulais voir si les gens se suicidaient, s’entretuaient ou s’endormaient. Ils étaient très attentifs en fait. ».
12. Vingt et un ans plus tard, METALLICA se lancera dans le “2012 European Black Album Tour” (également baptisé “The METALLICA Vacation Tour 2012”), cette fois avec Robert Trujillo à la basse. Tout au long des seize dates de la tournée, les Hommes en Noir joueront l'intégralité de l'album à l'envers, de “The Struggle Within” à “Enter Sandman”, ainsi que huit autres titres et medleys, comme se souviennent ceux qui les ont vus au Stade de France le 12 mai.
