5 novembre 2017, 23:44

W.A.S.P.

@ Limoges (CC John Lennon)

Blogger : Crapulax
par Crapulax

Bigre ! Ça faisait un bail que je ne m’étais pas déplacé en Haute Vienne, pas depuis la tournée The Way Of All Flesh de GOJIRA, c’est dire ! Un coup d’œil rapide sur Google histoire de se remémorer le trajet (sortie d’autoroute au Burger King, fastoche !). Pas de problème : je prends la bretelle d’accès du... MacDonald’s et je me perds évidemment aussitôt, allant et revenant sans arrêt sur mes pas, déconcentré par les lumières de la ville, en proie au doute et à l’énervement… Résultat : au lieu d’arriver au Centre Culturel John Lennon super tôt, je me retrouve penaud dans les derniers de la longue, très longue file d’attente. Il faut voir le bon côté des choses : au moins, je n’aurai pas de problème pour me trouver un endroit dans la salle, je me poserai là où il restera de la place !

Dans mon dos, un couple discute nonchalamment d’un cas social qui entassait ses poubelles dans le couloir de son appartement et qui nettoyait uniquement quand quelqu’un y venait pour baiser. Du coup, une colonie de cafards avait investi les lieux jusqu’à l’intérieur de la machine à laver, dans du linge humide qui n’était jamais sorti de là. Classe... A ne pas dire dans les soirées chez l’Ambassadeur évidemment, mais dans un concert metal, bizarrement ça passe !

Enfin la file s’approche la porte d’entrée à double battant où attend un vigile d’1m90 pour 110kg environ, le type samoan joueur de rugby à ne même pas comprendre une blague Carambar... Ce n’est pas le moment d’écarter sa veste lors de la fouille en criant « Allah akbar » pour rigoler : je n’ai pas envie de me retrouver à l’hôpital à manger avec une paille pendant les 6 prochains mois. Quelques mots laconiques sur une feuille A4 scotchée sur la porte nous indique qu’il n’y aura pas de première partie ce soir, sensée être les BEAST IN BLACK dont l’album « Berserker » vient à peine de sortir dans les bacs. Pas grave, leur passage en playback à l’Elysée-Montmartre (voir le reportage de Jérôme Sérignac) n’avait apparemment pas plu à tout le monde. Sans regret, donc !

Juste avant de pénétrer à l’intérieur du Centre Culturel, c’est le même rituel : il y a toujours le mec qui prend le ticket et qui peine à déchirer la partie à conserver, celui qui tamponne les poignets pour pouvoir sortir fumer une clope et rentrer à nouveau (vous savez, la marque qui supporte mal la sueur et qui s’efface au bout de 5mn…), et bien sûr celui qui distribue un flyer pour un concert dans un bled improbable et dont les noms de groupes ne disent jamais rien à personne.

J’avise le balcon de gauche et contemple ainsi une foule honorable de fans constituée de plusieurs générations : il y a les anciens qui n’arborent ni badge, ni patch, ni t-shirt ostentatoire. Ceux-là ont connu W.A.S.P. à leurs débuts, vénèrent « Live… In The Raw » et obéissent tous à la loi mathématique « The Crimson Idol » +25 ans = + 25 kg. Puis il y a ceux qui comme moi ont découvert le groupe de Blackie pendant sa période faste, celle du mythique « Inside The Electric Circus » ou « The Headless Children », celle du PMRC l’organisme de censure américain qui a tant boosté les ventes d’albums en son temps. Ces fans-là sont reconnaissables à la veste bardée au maximum de patchs multicolores et portent fièrement des sweats d’époque usés jusqu’à la corde… Je souris en voyant un type porter celui de KIX, ignorant que cette vieille formation de glam (1978 quand même!) existait encore aujourd’hui. Et puis je ricane encore plus devant un autre qui se trimballe avec le t-shirt de HARD FORCE avant de comprendre que c’est juste mon reflet dans le miroir... Bref ! Dernière génération, la minorité hyper-connectée de jeunes qui traversent la foule sans regarder devant eux la tête fixée sur leur portable, sirotent leur Coca et probablement regarderont le concert via leur téléphone également. Pensée fugace : je me demande si les Pompes Funèbres ont prévu une prise USB dans les cercueils pour recharger les portables de ces gens-là à leur mort…



Lorsque les lumières s’éteignent enfin, des images s’animent sur les 2 écrans disposés de part et d’autre de la batterie. On se croirait assis au cinéma devant un générique de film (plutôt bien chiadé du reste) et on devine qu’il va illustrer toute la soirée ce brillant concept-album qui, faut-il le rappeler, figure parmi les meilleurs du genre dans toute l’histoire du rock ! Puis les projecteurs rougeoyants s’allument et voilà le légendaire Blackie Lawless qui entre en scène. Vêtu de ses bottes à franges et ses genouillères blanches, son regard noir de possédé transperce toujours autant les ténèbres que les âmes. Lui-aussi a succombé à la fameuse loi mathématique des +25kg mais le bougre a conservé son incroyable présence scénique, son talent de frontman intact et sa voix unique même s’il est souvent secondé par le bassiste vétéran Mike Duda (présent dans W.A.S.P. depuis 1996), l’excellent guitariste Doug Blair (2005) et même par quelques samples de chœurs venus temporairement le soulager. Le ReIdolized Tour, qui a sillonné l’Europe entière, est un show excessivement bien rôdé. S’enchaînent à la perfection images et son sans temps mort. Seul Aquiles Priester, le jeune et talentueux batteur fraîchement arrivé dans W.A.S.P., semble concentré sur son étal comme un élève appliqué. Les autres sont en mode tranquilou-bilou, balançant les médiators ou haranguant les spectateurs en parcourant la scène.

Comme on pouvait s’y attendre, le bruit de la tronçonneuse de "Chainsaw Charlie" soulève une première fois l’enthousiasme de la foule. Les titres plus cool comme "The Gypsy Meets The Boy", "The Idol" ou le terrible "Hold On To My Heart" (second point fort du concert) font retomber la pression entre des titres plus bourrins tels "Doctor Rockter". Il faut dire que « The Crimson Idol » album bien calibré, favorise les changements de tension en live. 

Pour le rappel, Blackie Lawless ressort les vieux 33 tours et les clips de l’époque: "I Wanna Be Somebody" et le fabuleux "L.O.VE. Machine" du premier album résonnent dans une salle conquise par avance qui n’attendait que ça. Pour l’incontournable "Wild Child", Blackie Lawless s’approche du bord de la scène, entame l’intro à la guitare puis s’arrête soudainement en savourant les réactions frustrées des spectateurs d’un sourire goguenard. Il prend plaisir à être ici, c’est évident, plaisir à voir que malgré les années qui passent personne n’a oublié ses morceaux. Ce n’est pas un stade qui l’acclame comme à la grande époque, certes. Même pas une foule survoltée. Juste des français qui aiment W.A.S.P. et ça lui suffit. Espérons que ça lui donne envie de revenir en terre limougeaude dans une prochaine tournée "best-of" pourquoi pas ?

Sacrée soirée en tout cas et bien belle façon de fêter cet album concept mythique ! Quand à votre serviteur, il repartit dans la nuit la faim au ventre vers un fast food qu’il ne trouva jamais...


Photos © Didier Rivet


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Au sujet de l'auteur
Crapulax
Véritable touche-à-tout venant du metal underground : ancien animateur radio de l'émission TRANSAM ROAD (1989/1995), rédacteur de fanzines (CREME D'ANDOUILLE), ex-chanteur et guitariste rythmique au sein du groupe de Post-Hardcore SCREAMING SHORES (2006/2011). Également artiste graphique : affiches de concerts, jaquettes de démos, logos, caricatures de stars du Metal et divers comics (SEXUAL TENDENCIES, PAPY METAL, NEOBLASPHEMATEURS).
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