17 avril 2018, 17:58

Nicolas Patra, alias "Fetus" (ULTRA VOMIT)

• Les albums qui ont changé sa vie


S’il y a bien un groupe français qui a vu sa cote de popularité augmenter en peu de temps, c’est ULTRA VOMIT. Alors que les Nantais continuent à sillonner la France, Nicolas “Fetus” Patra, chanteur/guitariste et membre fondateur, revient sur les albums qui l’ont durablement marqué…

THE BEATLES : « Blue Album » (1973)

« Je dis le « Blue Album » mais le « Red Album » (NDJ : deux greatest hits couvrant respectivement les périodes 1967-1970 et 1962-1966) des BEATLES a eu tout autant d’importance pour moi. Tous deux faisaient partie de la collection de vinyles de ma mère et c’est vraiment mon premier souvenir de musique, mon premier contact dans le sens où j’ai vraiment fait la démarche de sortir l’album de sa pochette, de le poser sur la platine et de l’écouter.

J’écoutais un peu tout ce qui traînait, il y avait pas mal de musique classique, des génériques de dessins animés… J’ai commencé à écouter les BEATLES en boucle. Je ne sais pas quel âge j’avais exactement, 8-10 ans je suppose, mais c’est ma première gifle musicale.

L’été dernier, en vacances, je suis allé au musée des BEATLES à Liverpool. C’est impressionnant le nombre incalculable de tubes qu’ils ont écrits alors que leur carrière n’a duré que huit ans. Je ne pourrais pas choisir un seul album standard du groupe en disant que c’est mon préféré, c’est pour ça qu’il vaut mieux écouter les best of (sourire). »


Michael Jackson : « Dangerous » (1991)

« Ce n’est plus le même support, là, c’était les cassettes et j’avais toutes celles de Michael Jackson.
J’ai cité « Dangerous » parce que j’étais petit et que j’étais à fond dans ce qu’il faisait, mais pour moi, le meilleur album, comme pour beaucoup, c’est « Thriller » (1982). « Dangerous », c’est le premier où j’ai vraiment été fan, j’imitais ses pas de danse…

Forcément, Michael Jackson a eu une importance dans ma musique, même si je ne saurais pas te dire à quel niveau il a eu un impact dans ce que je fais avec ULTRA VOMIT.
Mais il m’est déjà arrivé pendant des séances d’enregistrement de me dire – pour rigoler, hein, dans des moments où il faut être un peu perfectionniste  : « Qu’est-ce que Michael penserait de ça ? ».
Parfois, ça peut m’aider. »
 

LES INCONNUS : « Bouleversifiant ! » (1991)

« C’est la même époque. Je me suis concentré sur mes jeunes années parce que ça fait bien quinze ans que, même si j’ai écouté des albums excellents, rien n’a eu une telle importance à mes oreilles, rien ne m’a autant “bouleversifié” justement.
LES INCONNUS, c’était les gros patrons de l’humour français.

Il y a un lien direct avec ULTRA VOMIT dans le sens où ils ont réussi à passer en revue tous les styles. Je suis fan de tous leurs sketchs en général mais dans leurs chansons, ce que j’aime, c’est leur précision et qu’ils vont vraiment au bout du truc.
Les détails, même vocalement, et les paroles me font marrer. Quand leur film Les trois Frères est sorti, je suis allé le voir je ne sais pas combien de fois.
Et je continue à regarder leurs sketchs régulièrement. »
 

AC/DC : « Live At Donington » (1992)

« Celui-là, je l’ai écouté un gros paquet de fois. C’était les années collège (je ne suis pas très bon avec les dates) et je suis devenu fan d’AC/DC assez spontanément. Ils ont une espèce de recette miracle, tu as toujours l’impression que c’est un peu les mêmes riffs, la même voix mais c’est toujours hyper catchy. J’ai choisi le live parce que c’est vraiment celui que j’ai le plus écouté.

Quand j’étais petit, j'étais aussi bien fan de « Ballbreaker » (1995), mais « Live At Donington » a une setlist de folie. C’est un groupe qui m’a marqué, même si je n’ai pas vraiment écouté les premiers albums et que je n’ai jamais attendu impatiemment leurs nouvelles sorties, parce que je savais très bien que ça ne me ferait pas la même chose que quand j’étais gamin…

Le lien avec ULTRA, comme beaucoup de musiciens, c’est la guitare, la SG rouge d’Angus Young. Ma première guitare, c’était une Epiphone, une sous-marque de Gibson. Je l’avais choisie parce que c’était clairement le look que je préférais. Quand on s’est “professionnalisé”, je me suis dit que je prendrais bien le modèle au-dessus et je suis passé direct à la SG. Même gueule, même confort de jeu. Ce sont les deux seules guitares que j’aie eues. »
 

NIRVANA : « MTV Unplugged » (1994)

« J’ai découvert NIRVANA à la même époque qu’AC/DC, vers 1996, quand j’avais 14 ans. J’avais beaucoup plus accroché sur ces derniers que sur NIRVANA à la première écoute. J’y suis revenu plus tard en fait. J’ai cité « Unplugged » parce que j’ai vraiment découvert le groupe après la mort de Kurt Cobain. On m’avait déjà fait écouter « Nevermind » et les titres passaient pas mal en radio mais quand j’étais plus petit, ça ne m’intéressait pas trop. C’est plus tard, par le biais de cet album acoustique, que j’ai flashé. Je suis fasciné par le fait qu’en seulement quatre ans d’existence, Kurt Cobain est passé du stade de jouer dans des tout petits clubs aux Etats-Unis avec un album hyper obscur (NDJ : Bleach, sorti en 1989) à n° 1 partout dans le monde. C’est un destin de fou.

Ce que j’ai trouvé hyper intéressant, c’est que le mec n’est pas du tout un virtuose. Moi, j’ai tout appris à l’oreille, en écoutant les albums, et c’est la preuve que si tu veux vraiment faire quelque chose, même en bricolant, tu peux y arriver. Si tu as une bonne idée à la base et un truc intéressant à raconter, ça peut marcher. Je suis sûr que Kurt citerait les BEATLES dans ses influences, il a cette facilité à faire comme des petites comptines, des morceaux qui vont te rester dans la tête. Au niveau des paroles, parfois, c’est très obscur, très abstrait et tout ça m’a parlé en tant qu’adolescent, même si je n’étais pas rebelle. Avec AC/DC, c’est le groupe qui m’a donné envie de faire de la musique.

J’ai commencé par la batterie. Un copain de collège qui en jouait m’a invité chez lui pour essayer. Il m’a montré ce qu’il fallait faire sur le temps 1, sur le temps 2 et j’y suis arrivé assez facilement. Il était assez impressionné parce que normalement, ça prend plus de temps. On va dire que j’avais quelques facilités. Ça m’a plu et j’ai eu envie de continuer. Mon père m’a acheté une petite batterie et je me suis installé dans une salle au sous-sol qui est devenue le local de répét’. On avait mis des boîtes d'œufs au plafond pour insonoriser mais ça n'a pas empêché les voisins de péter des petits plombs parfois…

J’ai commencé à faire de la musique avec mon demi-frère et des copains qu’on avait en commun au collège. Notre rêve ultime à l’époque, c’était de participer à une Fête de la Musique à Nantes (sourire). Au début, on faisait uniquement des reprises de NIRVANA. On était complètement fanatiques, moi, j’étais à la batterie et au chant et on reprenait tous les morceaux de tous les albums, même les titres pirates ! On n’avait pas de nom, notre seule ambition, c’était de nous marrer. Mais on jouait et on répétait beaucoup. Par la suite, je suis passé à la guitare et au chant.

Ma mère avait une guitare classique que mon frère avait ressortie et commencé à briquer, alors je l’ai essayée et là aussi, je suis assez rapidement arrivé à faire quelques trucs. Je crois que ça l’a un peu dégoûté et moi, ça m’a donné envie de continuer. Mon frère et moi, on n’est pas doués dans les mêmes domaines. Il est allé super loin dans les études alors que moi, à un moment, j’ai bloqué. C’est bien parce qu’il n’y a pas trop de rivalité entre nous du coup (sourire). »
 

SEPULTURA : « Roots » (1996)

« Il y a plein de groupes que j’aurais pu citer qui m’ont amené au metal. Si je parle de cet album, c’est vraiment pour faire râler Manard (NDJ : le batteur d’UV) parce que pour lui, c’est peut-être le moins bon de SEPULTURA.
Lui, il aurait certainement plutôt cité « Chaos A.D. ». Mais c’est avec « Roots » que j’ai découvert le groupe et il a été déterminant parce que je commençais à écouter pas mal de neo metal, KORN, COAL CHAMBER, etc.

A cette époque, avec mon groupe de reprises, on jouait toujours principalement du NIRVANA mais on rajoutait parfois du KORN, du MARILYN MANSON… Et quand j’écoutais ça, avec ce son grave et désaccordé, c’était trop violent. Pour moi, il y avait les groupes “gentils”, comme KORN, et ceux qui commençaient à donner dans le vraiment brutal, PANTERA, SEPULTURA, MACHINE HEAD.
J’aurais pu citer « Burn My Eyes » ou « Far Beyond Driven », qui sont pour moi meilleurs que « Roots », mais ça n’est pas par eux que j’ai découvert le style. La pochette m’avait intrigué, le mélange entre metal et influences brésiliennes aussi et j’ai bien aimé. »
 

MARILYN MANSON : « Antichrist Superstar » (1996)

« Celui-là, je l’ai cité pour la leçon. J’avais acheté cet album un peu par curiosité. L’esthétique me plaisait, j’en avais entendu parler, j’avais peut-être lu la chronique, ça avait l’air d’être bien mais je ne connaissais pas musicalement. J’achète l’album, je rentre chez moi, j’écoute et je n’aime pas (rires)… Je trouve ça trop glauque, trop bizarre, il y a des interludes chelous. J’aime pas… La “leçon”, c'est que si, aujourd'hui, j’avais vu ça sur YouTube ou que je l'ai écouté en MP3, j’aurais hyper vite zappé pour passer à autre chose.

Mais comme j’avais mis 120 francs (NDJ : autour de 20 euros, jeunes padawans) dedans, une partie de mes économies, je voulais que ça me plaise ! Alors je lui ai donné une seconde chance. Je l’ai réécouté, j’ai sorti le livret, lu les paroles, et au bout d’un moment, j’ai commencé à rentrer dedans. A “comprendre”. Ça a été la leçon : quand quelque chose ne te plaît pas, il faut parfois lui donner une seconde chance. Des fois ça marche, des fois non. Au contraire, il y a aussi des albums auxquels on accroche tout de suite et dont on se lasse très rapidement. Malgré tout, aujourd'hui, j’ai tendance à être flemmard et à ne pas faire des efforts immenses. J’ai un peu suivi le mouvement, maintenant, la musique s’écoute différemment. Mais je suis un peu nostalgique de cette époque où tu avais ton petit budget en poche et où tu faisais un pari en espérant qu’un album allait te plaire… »
 

NASUM : « Inhale/Exhale » (1998)

« Là, c’est plus underground. J’arrive au lycée et ça va être déterminant pour ULTRA VOMIT parce que je découvre des styles encore plus extrêmes, le black, le death, le grind. NASUM m’a appris que je n’avais pas envie de m’éterniser sur les riffs et sur les chansons, j’aimais bien le côté hyper “page de pub” de certaines qui diraient 20 secondes. J’aimais aussi l’alternance entre voix grave et voix aiguë. J’ai trouvé ça hyper efficace et fascinant de voir un album avec quelque chose comme 40 morceaux. Je regardais la track-list et je me disais : « Mais nan, c’est pas possible, il ne peut pas y avoir autant de morceaux en si peu de temps… » Ça m’a plu, je trouvais ça incroyable.

Je crois que j’ai découvert à peu près en même temps « Scum » de NAPALM DEATH qui est peut-être un de mes plus gros fous rires de l’époque. J’étais à la FNAC avec Camille (Potier), le pote avec qui j’ai formé ULTRA VOMIT au lycée, et on a décidé d’écouter ce groupe qu’on ne connaissait pas. On n’y comprenait rien, le chanteur n’articulait rien du tout, certains morceaux duraient quelques dizaines de secondes, les paroles faisaient trois paragraphes et lui faisait « Bahbahbahbahbah ». « Mais c’est pas possible, il a jamais le temps de tout dire !!? » On était broyé de rire. Et ça m’a donné la curiosité de découvrir d’autres groupes du même style. C’était aussi l’époque où j’ai découvert les films gore qui me faisaient autant marrer. Brain Dead, Bad Taste, Evil Dead… »
 

DYING FETUS : « Killing On Adrenaline » (1998)

« C’est la même époque que NASUM. J’ai cité ce groupe parce que c’est lui à qui je dois mon surnom de “Fetus”.
Le “dying” a été coupé pour faire un pseudo Caramail à l’époque sur les chats (sourire). Musicalement, ça a pas mal influencé ULTRA aussi, du gros death metal avec des parties lentes.
J’écoutais aussi « Molesting The Decapitated » de DEVOURMENT, je l'ai pas mal saigné ce truc. C'est assez inécoutable mais j'adorais.

Il y avait également CANNIBAL CORPSE, un des rares groupes qui nous a mis d’accord quand Manard est arrivé.
En fait, j’ai eu l’idée de faire un groupe avec Camille mais il n’est pas resté, il n’a jamais joué dedans. Mais c'est lui qui a dessiné la pochette de notre premier album, « M. Patate » (2004). C’est avec Manard que j’ai commencé à faire de la musique et à répéter. »
 

GRONIBARD : « Gronibard » (2001)

« C’est un peu mensonger parce que ce n’est pas l’album qui a changé ma vie, c’est les rencontrer et les voir en concert. Il y a eu un déclic. Ça m'a appris qu'on pouvait déconner mais faire ça de manière pro. Ils avaient un gros son, un batteur hallucinant, tout le monde jouait bien, c’est ça qui était impressionnant. Je me suis dit OK, c’est dans cette direction qu’il faut aller. Pour l’anecdote, quand on a commencé à faire des concerts avec ULTRA, GRONIBARD nous a invités à jouer avec eux du côté de Lille.

On était potes par copains interposés. Ils nous ont proposé de venir jouer en tête d’affiche, comme des invités d’honneur. On était gêné, on ne voulait pas mais ils ont vraiment insisté. Ça a été un cadeau empoisonné parce qu’on s’est fait dévorer (rires) ! On est arrivé avec moins de matos qu’eux, une expérience largement moindre, on était encore un peu timide, moi je n’étais pas hyper à l’aise au micro, on n’était pas hyper carré et eux, c’était déjà une machine de guerre… Ça, plus le fait qu’on était devant leur public, ça a été un peu difficile. Ça devait être vers 2003, je pense qu’on avait sorti notre démo (NDJ : Kebabized At Birth) mais pas encore notre premier album.

Et, même si je ne cite pas GOJIRA, je ne peux pas ne pas parler de la gifle administrée par un de leurs concerts, début 2001, au moment où ils ont sorti leur tout premier album, « Terra Incognita ». C'était dans un minuscule café-concert à Nantes et ils avaient réussi à sortir un son monumental. Et leur précision était déjà hallucinante. On se regardait avec les autres gens avec de grands yeux. Ce soir-là, je me souviens avoir songé à arrêter ULTRA (rires) tellement je me disais qu'on ne valait rien à côté. Et puis dès le lendemain, au contraire, ça m'a remotivé d'assister à un tel truc... J'ai compris aussi direct qu'ils allaient tout exploser sur leur passage ! ».

Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK