Auteurs de trois albums, portés tout à tour sur un black/thrash nerveux évoluant ensuite vers un magma de noirceur du meilleur effet (« Pillars Of Detest »), les Parisiens MOONREICH ont rapidement montré des prédispositions à sortir du cadre imposé pour apporter leur propre marque de fabrique. Post black ? Metal prog' ? Black atmosphérique ? L’œuf ou la poule ? Le quatuor se joue des étiquettes pour les retourner l'une après l'autre, proposant à nouveau sur « Fugue » un superbe tour de force qui ne dévoilera ses charmes diaboliques qu’aux oreilles les plus aventureuses.
Dotée d'une production puissante et peaufinée dans la moindre de ses tournures ainsi que d'un artwork énigmatique signé Drumshit, cette escapade, quatrième en date, est une sombre révélation. De celles qui réclament de nombreuses écoutes attentives et prolongées pour en saisir toutes les subtilités. Car le menu proposé par MOONREICH, s’étirant sur plus de cinquante-trois minutes, est riche et varié. Mais il rassasiera à nouveau les auditeurs et auditrices les plus exigeant(e)s. En témoignent ces riffs ciselés et mélodies tournoyantes qui mettent en lumière une paire de gratteux rivalisant d'inventivité harmonique ("Carry That Drought Cause I have No Arms Anymore" est exemplaire à ce sujet, tout comme "Heart Symbolism" : petit mais costaud !). Quant au préposé au matraquage de peaux, celui-ci fait preuve de variété dans son jeu cruel et le bougre sait aussi bomber le torse pour intensifier le mouvement avant de laisser place à une frappe pachydermique ("With Open Throat For Way Too Long" et ses moments de blasts intenses). Mais c’est surtout sur la création de ces ambiances crépusculaires que le groupe fait mouche (le finisher "The Things Behind The Moon" et son climax frissonnant) en trouvant un juste équilibre entre mélodies inspirées et parties plus intimistes, sombres et pertinentes.
Le tout évoque un style mesuré, mûr et réfléchi dans son approche sans pour autant prôner une quelconque intellectualisation de la chose. Pas de ça ici ma brave dame, c’est moderne et assumé certes, mais point de révolution à l’horizon… juste l’évolution logique de ce que MOONREICH a déjà entrepris sur son précédent méfait fort bien fait. Voilà qui suffira aisément à combler les attentes de ceux et celles qui rongeaient leur frein en attendant du neuf de la part de la bande à Weddir.