Berceau du death metal, la Floride a vu nombre de ses enfants parmi les plus turbulents devenir au fil des ans de véritables légendes, vénérées à travers le monde entier. Des formations qui filent le frisson rien qu’à murmurer leur patronyme comme s’il s’agissait de ceux d’anciens dieux cyclopéens issus de la mythologie lovecraftienne. Que ce soit MORBID ANGEL, DEATH ou OBITUARY : autant de noms inscrits à jamais au panthéon des gloires éternelles du death. Sans oublier le légendaire Morrisound Studio de Tampa où tant de bons albums ont vu le jour sous la houlette de Jim Morris ou de Scott Burns !
Et puis il y a eu les autres enfants de Floride, victimes de malformations, tristes rejetons moins bien lotis par la nature et le destin, dont MONSTROSITY fait malheureusement partie en dépit d’un très haut niveau technique (notamment à la batterie avec l’excellentissime Lee Harrison). L’ancienne formation de George "Corpsegrinder" Fisher, l’homme au cou de taureau hurleur indéboulonnable de CANNIBAL CORPSE, sort enfin de son silence après un hiatus de près de 11 longues années.
Tout avait pourtant bien commencé en 1992 avec « Imperial Doom » : une signature sur Nuclear Blast Records, une pochette signée du très prisé Dan Seagrave pour un résultat de 40.000 copies vendues à travers le monde. Hélas le groupe, ne voyant pas trop la couleur de ce relatif succès d’estime, précipitera son départ du label.
Premier coup du sort...
Ainsi « Millennium » ne sortira que quatre ans plus tard sur Conquest Music, le propre label de MONSTROSITY. Avec un style qui se rapproche ostensiblement de celui de DEICIDE, autre groupe floridien de renom, cet album marquera surtout le départ de George "Corpsegrinder" Fisher... pour cause de cannibalisme aggravé !
Ce second coup du sort, qui aurait dû être fatal, semble n’avoir au contraire eu aucun effet sur « In Dark Purity » qui voit le jour en 1999 où un certain Jason Avery (ex-EULOGY) au micro assure désormais la relève. Pour « Rise To Power » (2003), MONSTROSITY renforce même ses rangs en s’adjoignant les services d’un second membre de TERRORIZER en la personne de Sam Molina en plus de Tony Norman arrivé quatre ans plus tôt. Après un bref passage de Brian Werner (INFERNAEON) au chant, le groupe recrute pour l’enregistrement de « Spiritual Apocalypse » en 2007 Mike Hrubovcak (VILE) plus connu dans l’underground pour ses talents d’illustrateur (on lui doit des dizaines de pochettes d’album dont celles de SIX FEET UNDER, AVULSED, GRAVE ou SINISTER).
Ainsi MONSTROSITY aura surmonté tout au long de sa carrière moult changements de line-up, totalisé une quinzaine de musiciens différents en tournée sans parler des invités de marque sur leurs albums : aux guitares Jason Gobel (CYNIC), Mike LaPorte (JON OLIVA’S PAIN), Jason Suecof (CHARRED WALLS OF THE DAMNED) et James Malone (ARSIS), aux backing-vocals Kelly Schaefer (ATHEIST).
Malgré tous ces coups du destin, malgré une pause de plus de 10 ans, MONSTROSITY répond une nouvelle fois à l’appel des ténèbres du death metal. « The Passage Of Existence » démarre même là où il avait arrêté les hostilités : on retrouve toujours ce haut niveau de brutalité et de technicité qui le caractérise ("Kingdom Of Fire"), Jason Suecof aux manettes comme à l’époque de « Rise To Power ». Mieux : l’album est de toute la discographie sans doute le mieux produit, le mieux mixé. Quant aux soli de guitares, plus mélodiques et plus véloces qu’avant ("Cosmic Pandemia"), ils apportent une vraie aération à la structure des titres sans leur faire perdre leur niveau de virulence. Seul point faible, récurrent chez MONSTROSITY depuis leurs débuts : toujours pas de titre fort pour inscrire durablement son nom dans le marbre et fédérer une puissante armée d’adorateurs autour de lui.
« The Passage Of Existence » constitue néanmoins un retour aussi inattendu qu’agréable.