La panzer-machine de guerre Nuclear Blast est du genre impitoyable, c’est un fait. Au vu de ses dernières signatures tous genres confondus et à l’heure de faire les comptes en matière de formations deathcore qui roulent encore leur bosse en 2020... seule la tribu de Knoxville WHITECHAPEL résiste encore à la puissance de feu de l’ogre de Donzdorf. Les autres formations historiques que sont THY ART IS MURDER, CARNIFEX, DESPISED ICON ou encore FIT FOR AN AUTOPSY ont, elles, déjà rejoint ses rangs depuis longtemps et profitent de sa force de frappe sans pareil. SUICIDE SILENCE, leader incontesté du genre à la fin des années 2000-début 2010, y a également élu domicile lors de son comeback discographique en 2014... et revient aujourd’hui avec un sixième album dans sa besace, le troisième pour le label allemand.
« Become The Hunter » défend ainsi la vision traditionnelle d'un deathcore puissant et millimétré qui percute et perfore sans la moindre hésitation. Ici l’ambiance n'est pas à la rigolade : vocalises trempées dans l'acide chlorhydrique signées Eddie Hermida (qui reprend toujours avec classe le flambeau laissé par Mitch Lucker, décédé en 2012), solos héroïques et blasts qui dansent la gigue avec des breaks furibards : une recette certes reconnue mais qui n'a jamais aussi bien fonctionné. Il suffit d'ailleurs de jeter une oreille distraite sur le doublé gagnant qui ouvre l'album "Meltdown" / "Two Steps" pour achever de convaincre les plus réticents. Oui, SUICIDE SILENCE est bien l’un des tous derniers à pratiquer avec une ferveur intacte ce deathcore épileptique et sauvage, une représentation trempée dans le formol de ce qu'il considère comme la seule vision acceptable du style. Les preuves ne manquent pas à l'appel d'ailleurs : la production une nouvelle fois dantesque signée Steve Evetts (à la manœuvre chez SEPULTURA, THE DILLINGER ESCAPE PLAN et HATEBREED), le mixage de Josh Wilbur et le mastering réalisé par Ted Jensen, tout comme l'artwork sombre et mystique réalisé par Adrian Baxter complètent ce tableau que l'on jurerait droit sorti de la grande époque du genre. L'atmosphère menaçante est elle aussi toujours là, les breaks brise-nuques répondent présents ("Love Me to Death","Skin Tight" ou ce "Serene Obscene" sont tout bonnement monstrueux !) et la double pédale a encore son mot à dire !
Dans la continuité de l’éponyme « Suicide Silence » paru il y a trois ans, il se dégage de « Become The Hunter » une maturité évidente tant sur la structure aboutie des compositions que sur cette impression d'homogénéité globale. Bien sûr, SUICIDE SILENCE n'a pas la prétention de réinventer la roue : si vous aimez le deathcore velu qui sent sous les bras, un peu comme celui dont raffole ses camardes de label CARNIFEX, alors ce nouvel album réjouira à n’en point douter vos conduits auditifs. Quant aux autres, à l’affût de quelque chose d’un brin plus aventureux et original, ils auront lâché la chronique de cette lecture quelques lignes plus haut. Tant pis pour eux...