Démarrer un album en alignant deux titres de plus de dix minutes chacun n’est pas chose simple, pour sûr. S’y risquer est donc indéniablement synonyme de danger, d’une embardée délicate sur une route de montagne qui n’en finit plus de délivrer ses lacets vertigineux. Sauf que dans le cas de notre désormais trio (le vocaliste Sascha Simms ayant plié bagage en 2017) issu du Vermont, BARISHI, cela apparaît presque comme une évidence. Son deuxième album, paru chez Season of Mist il y a plus de trois ans déjà, avait déjà montré de sérieuses prédispositions en matière de metal progressif sans peur et sans reproche. « Blood From The Lion’s Mouth » se révélait ainsi au fil des écoutes comme un kaléidoscope de sensations fascinant qui n'en restait pas moins une oeuvre délicate à assimiler. Quelque chose d’unique, oui, unique.
Sous son nouveau format trio de poche, BARISHI n’a pas renoncé à jouer le metal progressif à facettes et mystérieux qu’il affectionne tant. La durée des morceaux en témoigne avec une tendance en hausse mais, paradoxalement, son propos est plus concis. Comme si ce côté expérimental avait été remisé au profit d’une redondance presque sludge qui le rapprocherait des premiers albums des Georgiens de KYLESA. Moins complexe donc que son aîné de prime abord, plus compact et homogène, abordant des tempos ralentis propices à l’élaboration de climats hypnotiques, BARISHI joue la carte de la simplicité sur « Old Smoke ». Pas de celles qui réduisent sa portée introspective à peau de chagrin mais qui décuple inversement sa puissance de frappe ("The Longhunter" et "Entombed In Gold Forever" devraient d’ailleurs mettre tout le monde d’accord à ce sujet) et la force de l’ensemble. Aidé dans sa quête musclée par une section rythmique remontée comme jamais qui modèle riffs dissonants et quelques solos de premier ordre, distillant une mélancolie guerrière qui se fait la malle avec un coup de semonce monolithique, le clan du Vermont vise dans le mille. Et lorsqu’il choisit de baisser le tempo et de laisser parler les émotions, comme sur le magnifique final de treize minutes "Old Smoke", c’est pour mieux surprendre l’auditeur jusque-là pris dans un étau diabolique.
BARISHI signe donc un troisième album surprenant, pas si éloigné de ce qui faisait déjà son charme sur « Blood From The Lion’s Mouth ». Il faut dire que le bougre a de sérieux arguments à faire valoir en plus de sa musique débridée. La production est superbe de détails, Mikey Allred signe un son superbe, riche de nombreux détails, qui sied à merveille aux nouvelles aspirations plus frondeuses du groupe. INTER ARMA, GRACELESS et ACROSS TUNDRAS sont des clients réguliers du monsieur qui se révèle décidément à l’aise dans tous les domaines ! L’artwork n’est pas en reste, Kuba Sokolski signe lui aussi une de ses œuvres les plus abouties aux côtés de qu’il a pu réaliser sur les albums de DOPELORD, SUMA ou THOU. Artistiquement, BARISHI coche toutes les cases du bilan avec succès, il ne reste juste qu'à croiser les doigts pour que le public lui laisse une chance. Il le mérite vraiment.