ULCERATE est un groupe à part. Unique. A l'image de son sixième et dernier album, « Stare Into Death And Be Still » qui signe son arrivée en grandes pompes sur le label francilien Debemur Morti. Son batteur, Jamie Saint Merat, l'a d'ailleurs expliqué sans détours lors de l'interview qu'il nous a récemment accordée : « le terme "maturité" résume bien notre approche sur ce dernier album. Je dirais même qu’il vient confronter d’autant plus le côté parfois fougueux, immature de nos premiers disques ». Oui Jamie, ce nouveau monstre de brutal death technique n'a jamais sonné aussi cohérent et maîtrisé. Il s'impose aussi comme la synthèse idéale de tout ce que le trio a pu proposer jusqu’à aujourd’hui au fil de son parcours discographique. Et son approche épique, majestueuse, plus que jamais présente, fait de lui l'un des rares groupes de death metal qui redéfinit la donne en la matière.
ULCERATE n'a pourtant pas renoncé, loin s'en faut, aux ambiances sombres et pesantes ni aux parties atmosphériques envoûtantes qui constituent l'une de ses marques de fabrique. Mais ici, il se fait plus mélodique, plus audacieux et affirme comme jamais un côté heavy, massif qui confère une puissance de feu irrésistible à l'ensemble. Les parties de guitares de Michael Hoggard en sont la plus belle illustration, prenant ici un malin plaisir à happer l’auditeur à grand coups de rythmiques addictives. Le bassiste Paul Kelland n'est pas en reste, sa maîtrise de l'instrument demeurant l'un des points forts du groupe, et ses growls sont proches de la perfection avec juste ce qu'il faut de sauvagerie.
Le premier titre, "The Lifeless Advance" est d'ailleurs un cas d'école avec son départ sous anabolisants brusquement stoppé par une superbe partie plus atmosphérique qui calme les débats à mi-parcours avant de céder sa place pour un assaut final imparable. Tout comme le morceau éponyme "Stare Into Death And Be Still", véritable brise-glace qui amorce un changement de bord improbable avec une mélodie subtile qui jaillit sans crier garde avant de repartir toutes griffes dehors pour un finish dévastateur. Un tour de force qui laisse l'auditeur vidé, à bout de souffle. Et ce n'est pas le seul puisque les embardées chaotiques et viscérales viennent tâtonner du trémolo en permanence et les nombreux breaks lâchés tout au long de ce disque en laisseront plus d'un sur le carreau. Les montées en puissance sont une nouvelle fois légions, le travail rythmique est lui explosif avec ces blasts administrés de main de maître par un Jamie Saint Merat au sommet de son art. Le tout procure de purs moments de grâce ("Visceral Ends", "Drawn Into The Next Void", "Dissolved Orders") renforcés par une structure et une progression toutes deux d'une logique indiscutable. Oui, la véritable prouesse de cette ode au côté obscur de la force est de rendre tout cela complètement intelligible, presque naturel.
Malgré sa durée qui dépasse l'heure de vol, cet album constitue un bloc compact, homogène, qui se digère plus facilement que ses prédécesseurs. Cela n’a rien de péjoratif bien sûr, la musique d'ULCERATE reste complexe et technique mais le tout est plus aisé à appréhender, surtout si l'on tente une comparaison avec certaines de ses réalisations précédentes telles « Vermis » ou « Of Fracture And Failure ». Ici tout semble couler de source, tout est logique, implacable, chaque riff est à sa place. « Stare Into Death And Be Still » est un véritable dédale dans lequel il n'a jamais été aussi délicieux de ne pas trouver la sortie.
