[[article initialement paru en 2015 et augmenté de nouvelles sources visuelles et témoignages]]
Aujourd'hui, je me suis levé avec en tête de faire un petit pèlerinage rapide sur les lieux d'un événement que ceux qui l'ont vécu ne sont pas prêts d'oublier.
Pavillon Baltard • Nogent-sur-Marne
Billet de concert © Coll. Christian Lamet
IRON MAIDEN joue sa toute première date parisienne avec son nouveau chanteur, un certain Bruce Dickinson, que seuls les mordus de l'underground britannique connaissent à travers SAMSON sous le surnom Bruce Bruce.
Personnellement, du haut de mes 16 ans, passionné absolu de southern rock et dérivés sudistes, je lorgne davantage du côté de la première partie : BLACKFOOT. Le groupe est au sommet de sa carrière discographique, muni de son triptyque discographique, respectivement troisième, quatrième et cinquième albums, et notamment le sublime "Marauder" paru l'année précédente.
Badge et tour programme officiel de BLACKFOOT © Coll. Christian Lamet
Voir Medlocke, Spires, Walker et Hargrett est pour moi la seule et unique préoccupation de cette date.
Personne, ou presque, n'a entendu l'album "The Number of the Beast" : il est sorti deux jours auparavant et seul "Run to the Hills", au refrain très accrocheur, a déjà fait son apparition sur les ondes depuis un mois, sur RTL chez Francis Zégut.
Spéculation, déception, c'est en tout cas le gros débat entre fans dans la queue qui nous mène du RER à l'entrée du Pavillon Baltard.
Oui, j'ai oublié de préciser qu'à cette époque, en guise de date parisienne, c'est plutôt une localisation nogentaise qui est proposée au public. Le Pavillon, c'est une construction de type Eiffel, démontée des Halles parisiennes près de Chatelet au moment de la construction du Forum, et remontée pièce par pièce sur cette cote pentue des bords de la Marne à Nogent. Très jolie construction. Classée.
J'y ai déjà vu Rory Gallagher l'année précédente, puis THIN LIZZY quelques semaines plus tôt.
Acoustique douteuse : verrière et metal, ce n'est pas idéal, mais on se contente de ce qu'on a. Nos oreilles n'ont pas été éduquées à autre chose qu'aux grandes ondes, aux vinyles qui craquent et aux abattoirs transformés en salles de concerts, donc...
Ce 24 mars, le Pavillon Baltard est entré dans nos habitudes : c'est devenu un nouveau temple du rock. Assez éphémère néanmoins.
30 ans plus tard, les finales de la Nouvelle Star sont passées par là et tout le monde a oublié que JUDAS PRIEST, ROSE TATTOO ou encore DEF LEPPARD, pour n'en citer que quelques-uns, ont aussi goûté aux plaisirs de la banlieue Est parisienne.
Publicité française pour toute la tournée - Tour book officiel IRON MAIDEN en 1982
BLACKFOOT pulvérise tout en quelques titres. Je manque totalement d'objectivité, mais je ne crois pas avoir vu une seule fois dans ma vie une première partie retourner une salle de cette manière et, sans manquer de respect aux illustres Britanniques, voler la vedette à une tête d'affiche. On raconte que LYNYRD SKYNYRD avait infligé la même punition aux WHO en 73, mais on n'y était pas !
Pendant l'entracte, nous nous regardons avec mon pote Philippe et il nous faut de très longues minutes pour nous en remettre (comme du prix du merchandising en vente sur le stand).
Je n'ai pas eu l'occasion de pouvoir échanger depuis avec d'autres fans présents ce soir-là et ce n'est que récemment que j'ai appris que mon cher Pascal Larre y était aussi. Sur sa page Facebook, il raconte aujourd'hui : "Je ne m'attendais pas à prendre une de mes plus grosses baffes live de ma vie. Pendant 50 minutes, une furie a envahi la salle, un set de hard southern rock effectué avec brio. Rick Medlocke fusillait littéralement l'audience du regard. Il était impressionnant, lui et ses 3 acolytes ont pété la baraque ce soir-là. Personnellement, je ne m'en suis jamais remis. Quand la lumière, s'est rallumée, après un rappel (très rare pour une première partie), tout le monde était unanime : on venait de vivre un truc de fou."
Voici un extrait qui offre une restitution extrêmement fidèle du souvenir électrique, survolté, mélodique et énergique que j'ai gardé de BLACKFOOT. Au top !
Heureusement que nous sommes quelques-uns à pouvoir relater cette soirée, car il ne faut pas compter sur la presse spécialisée rock (et celle hard rock/metal n'existe pas à l'époque en France). Pour retrouver un compte rendu de cette date, il faut se cogner la chronique de Rock & Folk (dommage pour son auteur, Thierry Chatain, dont je ne partage l'avis que sur la prestation de BLACKFOOT). Je n'ai pas retrouvé trace d'un live report de BEST qui était bien plus favorable au heavy metal en ces temps reculés.
IRON MAIDEN, est-ce bien nécessaire de le dire, aura été à l'opposé de ce que décrit Chatain dans sa chronique. Avec un Bruce déchaîné comme s'il avait toujours été membre du groupe, qui, si ma mémoire ne me fait défaut, déroute tout le monde en s'adressant en français au public (ce qui ne se fait jamais jusqu'ici, sorti d'un "merci", "bonsoaaaar Parissse" et quelques politesses d'usage).
A l'époque, il n'y a pas encore McBrain (chez TRUST) et Clive Burr, quoique excellent, est un tout petit peu moins charismatique et démonstratif, mais toute la machine MAIDEN turbine à plein régime.
Dominique Farran de RTL présentera des morceaux des deux sets dans son émission "Live" en deux samedis distincts. Il circule pas mal de bootlegs de ces deux prestations, forcément incomplets car ils ne font que reprendre la sélection diffusée à l'antenne.
Le live de Baltard, dans son jus de l'époque, tel qu'il a été diffusé dans l'émission "Live"...
Le lendemain du concert, France Soir titre : "Ils revenaient d'un concert pop et rock à Nogent : une centaine de vandales saccagent le métro Nation". A cette époque, déjà et pour de très nombreuses années encore, le metal sera une bête (noire) pour la société française. Le Parisien titre : "96 jeunes vandales saccagent la station Nation.", puis, plus loin, on peut lire : "150 jeunes "casseurs" revenant d'un concert pop".
Un incident qui arrive aux oreilles du groupe, ainsi que le relate Chris Garrel, dans notre dossier consacré à MAIDEN et la France paru en 2020 dans le HARD FORCE COLLECTOR.
"J'étais dans la rame d'après. Quand je suis arrivé à la station RER de Nation, le sol des couloirs était jonché des débris de tous les éclairages qui avaient été détruits. Des potes ont eu moins de chance et étaient dans la fameuse rame. Il y avait parmi eux beaucoup de mineurs que les parents ont dû aller chercher au commissariat. Effet de groupe oblige, quelques mômes un peu bourrés ont commencé à casser des trucs et ça a dégénéré. Vu l'ambiance à la Nation, on n'a pas traîné et on a filé sans demander notre reste, parce qu'à l'époque, quand tu étais un hardos, tu étais régulièrement contrôlé par la police. L'incident est remonté jusqu'à MAIDEN et on a eu droit à quelques lignes en 1983 dans le programme du World Piece Tour".
Set-list IRON MAIDEN :
01. The Ides of March
02. Murders in the Rue Morgue
03. Wrathchild
04. Run to the Hills
05. Children of the Damned
06. The Number of the Beast
07. Another Life
08. Killers
09. 22 Acacia Avenue
10. Total Eclipse
11. Clive Burr's Solo
12. Transylvania
13. Guitar Solo
14. The Prisoner
15. Hallowed Be Thy Name
16. Phantom of the Opera
17. Iron Maiden
Rappel 1 :
18. Drifter
19. Sanctuary
Rappel 2 :
20. Prowler